AU LENDEMAIN de la réouverture des salles incriminées, et après les nouveaux malaises du personnel. Un comité d'hygiène et de sécurité extraordinaire de l'hôpital Nord de Marseille, réunissant syndicats, direction et experts, a décidé de les fermer une fois encore tant que la lumière ne sera pas totalement faite sur cette affaire. Une cellule de crise a été créée, qui se réunit chaque jour pour prendre note des évolutions. Des capteurs-enregistreurs avaient été accrochés aux blouses des médecins et personnels concernés le jour de la reprise et d'autres déposés dans les salles d'opération. Leurs premières données sont en cours d'analyse. Une enquête épidémiologique a été lancée et un bilan toxicologique mené sur la cinquantaine de produits utilisés dans ces lieux. Bataillon chimique des marins-pompiers, laboratoire d'analyses de la qualité de l'air et médecine du travail sont ainsi mobilisés. Des ingénieurs du CHU de Nice ayant connu un tel problème (voir encadré) devaient venir épauler les équipes marseillaises.
La Drass évoque des traces d'oxyde de carbone ou de toluène, mais l'un et l'autre à doses non significatives. Elle envisageait, un temps, de possibles interactions entre des appareils biomédicaux et des particules de solvants industriels employés pour le nettoyage ou dans les travaux de remise aux normes des services voisins. Elle effectue aussi des analyses de l'eau du robinet, sans négliger une piste inattendue : de possibles effets du mistral.
Le directeur de l'agence régionale de l'hospitalisation explique en effet que des infrasons pourraient s'infiltrer dans les conduits de circulation d'air ou résonner contre l'immeuble et entraîner des perturbations de l'oreille interne. Il est vrai que le lundi où les salles avaient rouvert sans que le personnel ne ressentît les symptômes, était l'un des seuls jours où le mistral n'avait pas soufflé. Mais depuis la construction de l'hôpital Nord, Marseille a connu plus d'un épisode venteux sans que personne n'en fût incommodé à l'intérieur du bâtiment.
On peut aussi s'interroger sur les effets des ultrasons sur les irritations des yeux et de la gorge...
A noter que les malaises ne semblent pas avoir touché les patients accueillis dans ces lieux avant leur fermeture.
Les interventions chirurgicales programmées ont été différées ou réparties entre les trois blocs périphériques de l'hôpital Nord, habituellement spécialisés en ORL, stomatologie et gynécologie. Les autres hôpitaux de l'Assistance publique de Marseille se répartissent surtout les interventions d'urgence.
Le précédent niçois
Entre 1998 et 2000, le CHU de Nice avait connu un problème apparemment similaire à celui de Marseille, mais à une échelle beaucoup plus grande : au fil des mois, 644 agents du tout nouvel hôpital L'Archet avaient déclaré des nausées, céphalées, irritations des muqueuses ; l'état de certains avait même nécessité une brève hospitalisation.
La direction de l'époque, alors très contestée sur différents dossiers, avait tenté de minimiser l'affaire. Elle mettait en avant des phénomènes d'autosuggestion collective. Après deux ans d'enquête, les ingénieurs ont tout de même conclu à des problèmes liés au conditionnement et à la distribution de l'air. Mais certains membres du personnel ont dénoncé des analyses trop partielles, destinées à éviter tout scandale, et on se souvient même d'un agent qui a fait une grève de la faim devant l'hôpital pour dénoncer cette situation. Des actions en justice avaient conclu à un « manquement à une obligation » de l'hôpital. Aujourd'hui, d'autres actions sont en cours pour faire reconnaître ces symptômes comme maladies professionnelles, car une partie des agents intoxiqués à l'époque souffrent de troubles psychomoteurs ou neurologiques et sont désormais en arrêt maladie. Une affaire qui inquiète à la fois le personnel marseillais et la direction, bien décidée pour sa part à agir dans la plus grande transparence.
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