LE TEMPS DE LA MEDECINE
Dans son livre de souvenirs, « Out », à paraître à la fin du mois*, le Dr Xavier Emmanuelli, fondateur du SAMU social et ancien secrétaire d'Etat chargé de l'Action humanitaire d'urgence, évoque le sort des malades mentaux sans abri, ces exclus d'entre les exclus.
« La rue ne rend pas fou, mais elle contribue évidemment à aggraver massivement la souffrance des malade mentaux et de tous les autres, marginaux ou zonards, qui y sont confrontés », constate Xavier Emmanuelli.
« Comment en sommes-nous venus à laisser dans un abandon si complet, si sauvage, si intolérable, d'authentiques malades, nous qui nous enorgueillissons de notre merveilleuse couverture sanitaire et sociale ? demande-t-il. Que dirions-nous si les cardiaques, les cancéreux, les diabétiques ou les malades du sida n'avaient plus que la rue pour refuge ? Les psychotiques que les équipes du SAMU social vont voir toutes les nuits sur leurs pauvres territoires sont aussi gravement atteints dans leur santé, sinon plus, que n'importe lequel de ces malades du cur, du foie, ou du système immunitaire. Et pourtant, aucune institution ne veut s'en occuper. »
« Comment ! s'étonnera-t-on. Il n'y a pas d'asiles psychiatriques ? Il n'y a pas de maisons de repos, de cliniques spécialisées, de foyers semi-médicalisés, de centres, de sanas, ou tout autre établissement "fait pour' - pour les recueillir et les soigner ? La réponse est non. Quand un fou n'a pas de famille ni d'amis, ou quand il n'est pas fermement soutenu et protégé par son entourage, il aboutit inévitablement à la rue. C'est eux que nous appelons les "grands exclus" . »
Pour réconcilier l'institution psychiatrique avec la maladie mentale du SDF, le Dr Emmanuelli a monté il y a six ans un réseau national qu'il a baptisé Souffrance psychique et précarité. Un réseau qui essaie de regrouper les bonnes volontés confrontées aux mêmes difficultés. Une sorte d'asile hors les murs qui depuis six ans a établi 1 500 contacts en apportant aux malades leur traitement et leurs soins, avec le minimum de médicaments, eu égard au contexte de la rue, et en dirigeant les patients vers les structures de soins quand c'est nécessaire.
* « Out, l'exclusion peut-elle être vaincue ? », Robert Laffont éditeur, 276 pages, 20 euros.
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