EN CE QUI concerne plus particulièrement le célécoxib (Celebrex), les données de la littérature déjà abondantes plaident en faveur d'une bonne tolérance cardio-vasculaire. Ainsi, une étude rétrospective portant sur 54 000 patients âgés de plus de 65 ans (« Circulation », 2004) et ayant pour objectif de comparer le risque d'infarctus, a montré que le célécoxib n'augmente pas ce risque aussi bien par rapport aux Ains traditionnels que par rapport à un groupe témoin ne recevant pas d'Ains.
Une autre étude importante, étude de cohorte rétrospective, a porté sur près de 176 000 patients âgés de 50 à 84 ans (Ray, « Lancet », 2002) : là encore, les auteurs concluent qu'il n'y a pas d'augmentation du risque de survenue d'infarctus du myocarde ou de coronaropathie mortelle chez les patients recevant du célécoxib par rapport aux patients ne prenant pas d'Ains. D'autres études (Graham, Whelton...) aboutissent à des conclusions similaires sur de très grands nombres de patients. L'étude de Whelton est particulièrement intéressante puisqu'elle porte sur plus de 3 millions de patients hypertendus et, donc, à risque cardio-vasculaire et qu'elle a porté sur le risque d'infarctus et d'AVC : le taux d'événements n'est pas différent chez les patients sous célécoxib par rapport à ceux prenant un Ains classique et par rapport à ceux ne prenant pas d'Ains. Signalons enfin l'étude de Mamdani (« Lancet », 2004) qui montre un risque inférieur de décompensation d'insuffisance cardiaque chez les patients prenant du célécoxib par rapport à ceux prenant des Ains classiques. Même si cette différence n'atteint pas le seuil de significativité, elle mérite d'être notée.
L'hétérogénéité des anti-inflammatoires.
De fait, souligne le Pr Montalescot, il n'est pas pertinent d'amalgamer tous les anti-inflammatoires, qu'ils soient ou non spécifiques de la Cox2, au plan de la tolérance cardio-vasculaire. Ainsi, pour les Ains classiques, il est certain que le naproxène a montré des effets cardioprotecteurs alors que d'autres, comme l'indométacine et l'ibuprofène, peuvent avoir des effets délétères, notamment en ce qui concerne la dernière molécule en inhibant l'effet antiagrégant de l'aspirine.
En ce qui concerne les coxibs, poursuit le Pr Montalescot, plusieurs études suggèrent la bonne tolérance cardio-vasculaire du célécoxib et même, peut-être, un effet bénéfique de cette molécule : cela justifierait en tous cas une étude où l'on associerait au traitement classique d'un syndrome coronarien aigu, le célécoxib, pour voir si la théorie inflammatoire de la pathologie coronarienne aiguë a des conséquences cliniques et thérapeutiques.
Etant entendu, insiste le Pr Montalescot, que tous les patients à risque coronarien élevé doivent être sous aspirine : cette règle étant appliquée, le débat sur la tolérance cardio-vasculaire du célécoxib mérite d'être considérablement relativisé. Car souligne le Pr Montalescot, il n'est pas bon de laisser un patient à haut risque cardio-vasculaire sans traitement adapté qu'il prenne ou non du célécoxib.
D'autres études en cours.
A côté de la littérature déjà publiée, plusieurs études actuellement en cours, mais dont on connaît les résultats intermédiaires, sont pour l'instant rassurantes. D'autant que deux de ces études (APC et Presap) portent sur la prévention de la polypose adénomateuse familiale, type de recherche qui a été à l'origine du retrait du rofecoxib. Ces études qui sont d'une durée de cinq ans ont déjà permis des analyses intermédiaires, un nombre significatif de patients bénéficiant d'un recul de deux à trois ans. Là encore, on ne décèle pas de problème de tolérance cardio-vasculaire au long cours. Tout comme dans une dernière étude menée dans la prévention et le ralentissement de la maladie d'Alzheimer et qui a inclus 2 400 patients depuis trois ans.
Ne pas conclure trop vite.
Tout ces éléments font dire aux Prs Bertin et Montalescot qu'il ne serait pas raisonnable d'abandonner les coxibs, qu'il s'agisse du célécoxib (le seul qui demeure commercialisé en France) ou d'autres molécules en cours de développement. En effet, cette classe thérapeutique, grâce à une meilleure tolérance digestive, a incontestablement permis d'élargir le champ de prescriptions des anti-inflammatoires, souligne le Pr Bertin.
Le retour massif aux Ains classiques ne serait pas logique, aussi bien pour le Pr Bertin que pour le Pr Montalescot, compte tenu, d'une part, de l'hétérogénéité des deux classes d'anti-inflammatoires et, d'autre part, du caractère souvent sommaire des dossiers cliniques, des Ains les plus anciens, commercialisés à une époque où la recherche clinique était beaucoup moins exigeante qu'elle ne l'est aujourd'hui... pour les coxibs.
(1) Conférence de presse organisée par Pfizer .
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