De notre correspondante
Le département du Pas-de-Calais expérimente depuis un mois un dispositif de gardes original. Afin de pallier la désaffection grandissante des médecins pour les gardes de nuit et de week-end, les médecins libéraux ont organisé leur propre système de régulation d'urgences.
Calqué sur le modèle des SAMU, le Centre de réception et de régulation des appels libéraux (CRRAL) joue un rôle de filtre pour les praticiens de garde. Lorsque le patient compose le numéro du médecin de garde, son appel est basculé automatiquement sur le standard du « 15 bis », où un permanencier et un médecin libéral assurent la régulation des appels. Les urgences vitales sont orientées vers le SAMU ; les autres vers le médecin de garde, qui propose alors une consultation à son cabinet pour tous les patients qui peuvent se déplacer.
« Notre objectif est de réduire au maximum les visites à domicile, explique le Dr Pierre Grave, généraliste installé à Saint-Pol-sur-Ternoise et président de l'Assum - Association des services d'urgences médicales -, qui pilote le projet. En dehors des personnes très âgées ou des malades en fin de vie, il est rare que les patients ne puissent se déplacer jusqu'au cabinet du médecin de garde pour une consultation le dimanche matin. »
Les premiers chiffres enregistrés après un mois d'expérience traduisent effectivement une baisse substantielle du nombre de visites : sur 1 500 appels, la moitié seulement a nécessité une visite à domicile, l'autre moitié a pu être réglée soit par conseils téléphoniques, soit par consultation. Un pour cent seulement des appels ont été transférés au SAMU, et 2 % ont nécessité l'envoi du patient dans un service d'urgence. Quant aux appels provenant de patients agités ou psychiatriques, ils sont systématiquement « sécurisés » car la police est appelée sur les lieux avant l'intervention du médecin de garde.
Expérimenté au départ pour les gardes du week-end - du samedi 8 heures au lundi 8 heures -, le système de régulation s'applique progressivement aux gardes de nuit en semaine, ce qui nécessitera d'adapter le nombre de permanenciers et de régulateurs aux pointes horaires d'appels. Les médecins libéraux assurant les gardes sont rémunérés par la structure sous forme de salaire.
Actuellement, le CRRAL couvre une trentaine de secteurs sur les 90 que compte le département. Lorsqu'il aura trouvé sa vitesse de croisière, un système décentralisé sera mis en place pour éviter aux médecins des secteurs les plus distants d'avoir à se rendre sur place. La base logistique demeurera à Arras, mais les régulateurs pourront assurer leur travail par visioconférence à trois.
Financée par le Fonds d'aide à la qualité des soins de ville (FAQSV), l'expérience du Pas-de-Calais est suivie de près par la CNAM (Caisse nationale d'assurance-maladie), qui voit là un moyen de désengorger le SAMU tout en donnant aux libéraux leur place dans le système de garde. « Le système a l'avantage d'être totalement transparent pour le patient et sécurisant pour le médecin de garde, estime Pierre Grave. Grâce à ce premier filtre, le permanencier peut donner quelques conseils par téléphone et dédramatiser la situation, ce qui diminue la pression sur le médecin de garde. »
Seul problème non encore résolu : celui des appels sociaux. « Nous manquons d'un SAMU social ou tout au moins d'une structure régionale vers laquelle orienter tous les appels ne relevant pas d'un médecin mais nécessitant une prise en charge. »
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