Prise en charge hospitalière des exacerbations

Les leçons de l’étude Urgence Bpco 2003

Publié le 26/01/2006
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10° Congrès de Pneumologie de Langue Française (CPLF)
27 - 30 janvier 2006 à Nice

LA BRONCHO-PNEUMOPATHIE chronique obstructive (Bpco) représentait en 1990 la sixième cause de mortalité dans le monde et passera en troisième position en 2020. Elle est la seule maladie dont la mortalité attribuable augmente. Dans les pays industrialisés, sa prévalence est de 5 à 10 % de la population adulte et elle peut atteindre 20 % chez les fumeurs de plus de 40 ans. Les exacerbations ont un poids important sur les conséquences médicales et économiques de la maladie. Dans ce contexte, par exemple, la mortalité hospitalière des décompensations de Bpco varie de 2 à 30 % selon les études et la mortalité atteint 35 à 50 % dans les deux années qui suivent l’exacerbation. Par ailleurs, les exacerbations fréquentes sont associées à un déclin du Vems et de la qualité de vie des patients.

L’étude Urgence Bpco 2003 a inclus des malades consultant en urgence à l’hôpital pour une exacerbation de Bpco. Elle avait pour objectif de préciser leurs caractéristiques ainsi que celles de leur maladie et de leurs exacerbations, tout en décrivant la prise en charge aux urgences et le suivi hospitalier (1).

Un suivi exemplaire de type cohorte.

Urgence Bpco 2003 est une étude prospective multicentrique de cohorte portant sur des patients consultant en urgence à l’hôpital et ayant une Bpco connue ou suspectée. Elle a porté sur plus de 1 200 patients, dont trois quarts environ étaient des hommes, issus de 103 centres. Plus de deux patients sur trois ont été reçus aux urgences, un tiers ayant été admis directement en urgence dans un service de pneumologie.

Deux fois sur trois environ, le patient a été adressé par un médecin ou un établissement de soins. Plus rarement, il est venu spontanément, adressé par un tiers ou le Samu. Les signes fonctionnels qui ont motivé l’hospitalisation ont été une augmentation de la dyspnée, de la toux ou du volume de l’expectoration, moins souvent une augmentation de sa purulence. Les traitements de fond reçus avant l’exacerbation étaient des anticholinergiques, des bêta 2-mimétiques, des corticostéroïdes inhalés ou, plus rarement, peros, ou encore une oxygénothérapie. Dans la quasi-totalité des cas, une radiographie pulmonaire et un électrocardiogramme ont été réalisés.

Les traitements instaurés à l’hôpital ont été essentiellement des anticholinergiques, des bêta 2-mimétiques et une oxygénothérapie, beaucoup plus rarement des corticostéroïdes, quelle que soit leur voie d’administration. Après un passage aux urgences, pratiquement un malade sur deux a été transféré en pneumologie ou dans un autre service. La durée du séjour à l’hôpital a été de l’ordre de dix jours, le diagnostic d’exacerbation de Bpco ayant été retenu dans presque tous les cas. Le mode de sortie a été le retour à domicile, avec ou sans aide, dans la très grande majorité des cas. Le traitement de sortie du service de pneumologie a comporté le plus souvent des bêta 2-mimétiques, mais aussi des corticostéroïdes et des anticholinergiques. L’oxygénothérapie de longue durée faisait partie de l’ordonnance de sortie environ une fois sur trois.

Vers un score de sévérité.

Un dixième des patients ayant une Bpco venus aux urgences pour une poussée passent en réanimation puis sont transférés en pneumologie ou en médecine. La moitié est directement retournée au domicile. Après un passage en pneumologie, près de trois patients sur quatre sont à leur tour retournés à domicile.

Le nombre de patients inclus dans l’étude a permis d’identifier les facteurs prédictifs de mortalité hospitalière et de la nécessité de soins de suite. Un score de sévérité clinique de l’exacerbation a pu être établi, selon le nombre de critères de gravité, qui étaient au nombre de six dans ce travail : la cyanose, les troubles neurologiques, l’?dème des membres inférieurs, l’astérixis, la mise en jeu des muscles inspiratoires accessoires et la respiration abdominale paradoxale.

La qualité des données recueillies dans cette étude prospective portant sur un très grand nombre de patients permet des analyses explicatives pertinentes, même si la population considérée n’est pas exhaustive et qu’un petit nombre de cas inclus n’a pas vu son diagnostic confirmé. L’étude Urgence Bpco 2003 a également été caractérisée par une collaboration exemplaire entre des instances diverses, de nombreux centres, des médecins de spécialités différentes (pneumologues et urgentistes) et l’Inserm.

Elle va permettre de mieux défi-nir les circuits et modalités de prise en charge de la Bpco et de ses exacerbations, en particulier la prescription de corticoïdes inhalés, qui est, dans cette étude, très hétérogène entre les cen tres (2).

D’après un entretien avec le Dr Nicolas Roche (service de pneumologie et réanimation, Hôtel-Dieu, Paris).
1. Roche N., et coll. L’étude « Urgence Bpco 2003 » : une description de la prise en charge hospitalière des exacerbations de Bpco. Rev Mal Respir 2004 ; 21 : 117-22.
2. Roche N, et coll. Guidelines Versus Clinical Practice in the Treatment of Chronic Obstructive Pulmonary Disease. Eur Respir J 2001 ; 18 : 903-8.

> Dr GERARD BOZET

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7886