Les députés viennent d’adopter un amendement au PLFSS 2010 qui contraint les généralistes à prescrire dans le répertoire des groupes génériques. Qu’en pensez-vous ?
Sur la forme, je n comprends pas bien l’articulation avec le Capi : on passe d’un contrat qui encourage les médecins à prescrire dans le cadre du répertoire à une obligation. Sur le fond, la démarche n’est pas positive pour le patient et est contraire à la vocation des industriels, puisqu’elle incite les médecins à prescrire les produits anciens donc à tourner le dos à l’innovation thérapeutique. C’est vrai, dans de nombreuses situations les produits anciens répondent aux besoins de santé publique, mais cela ne justifie pas que l’on élargisse la notion de générique à des produits pas totalement identiques, ni que l’on porte atteinte à la protection des données thérapeutiques.
Un deuxième amendement récemment adopté autorise un générique à adopter la forme et la couleur du princeps…
On part du principe qu’il y a un problème générique dans ce pays, ce qui n’est pas exact. Un médicament délivré sur quatre est aujourd’hui un générique. Les Français y adhèrent. C’est le résultat de 10 ans d’une politique intelligente de développement du générique, sans qu’il n’y ait jamais eu d’accident thérapeutique ! Ce développement équilibré assure la sécurité et repose sur un rapport de confiance entre médecins, malades et pharmaciens. Demain, si le générique adopte le même conditionnement, la même forme, la même couleur, on entre dans le registre de l’imitation. Le patient ne saura plus s’il prend un générique ou un princeps. On tue une politique de transparence, de qualité, de sécurité et on entre dans un engrenage qui favorise la contrefaçon. C’est un mauvais signal que l’on donne aux industriels en termes de droits commerciaux. Il y a tromperie sur la marchandise. A quand le même nom que le produit princeps sur la boîte du générique ?
Où en est par ailleurs le recours du Leem contre le Capi ?
Nous avons été les premiers à déposer un recours devant le Conseil d’Etat, mais pas les seuls. Notre recours se base sur la non conformité des thèmes retenus aux avis de la HAS et sur la rupture de l’égal accès aux soins des patients.
Comment les industriels perçoivent-ils les mesures d’économie du PLFSS 2010 ?
Le problème de ce PLFSS est qu’il fait les fonds de tiroirs pour tenter de rééquilibrer les comptes sociaux. Les industriels ne nient pas cette nécessité, mais ils préconisent d’autres mesures. Ainsi, ils ne comprennent pas les baisses de remboursement de 35 à 15%. Ce n’est pas une bonne mesure. D’abord, elle amalgame SMR insuffisants et faibles. Ensuite, plusieurs industriels auraient préféré que certains de leurs produits soient déremboursés et font des propositions dans ce sens. Enfin, cela va fragiliser de nombreux sites sur le territoire français : 400 personnes à Giens, 200 à Compiègne et 200 à Quimper, ce sont autant d’emplois menacés. Cette mesure est mauvaise aussi pour le patient et pour la Sécurité sociale, car le premier devra payer davantage et la seconde ne fera pas d’économies, car on sait bien qu’il y a aura des transferts de prescriptions vers des produits plus onéreux.
Quelle impression retirez-vous du Conseil stratégique des industries de santé qui a réuni les industriels le 26 octobre autour de Nicolas Sarkozy ?
Le président a répété « je voudrai que vous ayez le sentiment que la France a changé » ; et effectivement, je crois que les représentants des laboratoires, notamment internationaux, sont repartis avec cette impression. Les 11 points qui ont été arrêtés donnent du souffle pour l’innovation et la recherche, et le développement des biotechnologies et de l’emploi. Un prochain CSIS autour du Président est prévu pour 2012. Et entre temps, nous aurons des rendez-vous réguliers pour le suivi des orientations arrêtées.
Comment qualifieriez-vous le partenariat industriels-pouvoirs publics autour du H1N1 ? Que pensez-vous des critiques formulées sur le trop grand nombre de commandes de vaccins ou sur leur coût ?
Restons sérieux, et ne tombons pas dans le procès d’intention ! Sur ce besoin de santé publique, la coopération a été exemplaire avec les différents ministères. Et les industriels se sont inscrits dans une politique sérieuse de réponse à une pandémie annoncée dont on ne sait pas très bien comment elle peut évoluer. Les vaccins ont été produits depuis juillet dans des conditions de sûreté optimale, ce qui explique que tous ne soient pas encore là. On ne peut pas à la fois mettre en doute la fiabilité des vaccins et regretter une mise à disposition trop lente !
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