Le bataillon des doctorants et postdoctorants, plutôt dispersé d'ordinaire, resserre aujourd'hui les rangs. Les jeunes chercheurs de différents instituts (dont l'institut Cochin, l'Institut Pasteur, l'institut Curie, le Muséum d'histoire naturelle, l'Ecole normale supérieure), rassemblés en collectif, lancent un appel pour fédérer les doctorants et postdoctorants.
« Les récentes coupes budgétaires dans le financement de la recherche publique ont soulevé une vive inquiétude des laboratoires de recherche, qui voient mal comment maintenir une recherche publique de qualité dans ce contexte, écrit le collectif. Les doctorants et postdoctorants du collectif des jeunes chercheurs souhaitent inscrire leur mouvement dans un cadre plus large. En effet, cette nouvelle coupe de crédits, frappant par son ampleur malgré le récent recul gouvernemental, a révélé une volonté politique de privatisation de la recherche de notre pays. »
Aucun statut
Les revendications des jeunes chercheurs, touchés directement par le désengagement de l'Etat, sont aussi pragmatiques, face à l'absence d'un statut social, à l'allocation de recherche au niveau du SMIC, à la baisse des recrutements.
En troisième année de thèse au sein du département de biologie cellulaire à l'institut Cochin, Vincent Feuillet, 27 ans, travaille sur l'immunothérapie antitumorale. Un travail à temps plein la semaine et un week-end sur deux. Après avoir obtenu une bourse ministérielle pour trois ans (à moins de 1 000 euros par mois), Vincent est aujourd'hui obligé de faire une demande de bourse auprès d'une association caritative. « Ces bourses, qui sont très courantes parmi les jeunes chercheurs, ne nous donnent toutefois aucun statut », explique-t-il. Pas de cotisation à l'assurance chômage, pas de cotisation pour les retraites, pas de couverture sociale.
« Je suis assez démoralisé, confie Vincent Feuillet au "Quotidien". Nous sommes mis à l'épreuve pendant des années pour nous entendre dire ensuite qu'il n'y a plus de poste. » En effet, l'emploi scientifique ne devrait pas être exclu du plan gouvernemental de réduction des fonctionnaires. En 2003, le gouvernement a déjà supprimé 150 postes permanents dans les organismes, au lieu des 125 qui devaient être créés.
Renonçant peu à peu à son choix initial, la recherche fondamentale, faute de visibilité de carrière, Vincent Feuillet pense aller faire son postdoctorat à l'étranger. « Je suis passionné par ce que je fais, poursuit-il. Mais je trouve que l'alibi de la passion est trop facile : nous voulons aussi une vie de famille décente. »
Pour l'heure, le Collectif des jeunes chercheurs réclame :
- un plan pluriannuel du ministère de la Recherche « exposant clairement les orientations de la politique de recherche en France à court et à long terme » ;
- la création d'un statut pour tous les doctorants et postdoctorants qui leur permettrait de cotiser à l'assurance chômage, de cotiser pour les retraites et d'être surtout reconnus et recensés ;
- une politique de recrutement afin de redynamiser les laboratoires ;
- un budget « permettant aux équipes qui le désirent de réaliser une recherche fondamentale en toute autonomie et de garantir la pérennité du haut niveau scientifique de la recherche publique ».
Les jeunes chercheurs ont l'intention de se battre, aux côtés de leurs aînés, pour l'avenir d'une recherche publique libre, forte et dynamique. Sujet qui ne manquera pas d'être évoqué le 30 juin prochain, lors de la réunion, en session extraordinaire, du Comité national de la recherche scientifique, principale instance d'évaluation et de prospective de la recherche.
Contact : doctorantspostdocs@free.fr.
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