« Il y a une bascule des comportements, due à une coresponsabilité des patients, des associations, du corps médical et des médias », a reconnu Bertrand Riff, le président du Corevih Nord-Pas-de-Calais en introduction de la rencontre Corevih en Actions* qui s’est tenue à Lille le 11 décembre dernier.
Véronique Baclet, infectiologue au CH Tourcoing, a présenté les données des enquêtes régionales qui dressent le constat de cette augmentation. À travers les interrogatoires qui accompagnent la réalisation des tests, « on a le sentiment d’une réelle banalisation des IST, a-t-elle confié. Les préservatifs sont de moins en moins utilisés. Si l’idéal est évidemment de prévenir les infections, il est indispensable de sensibiliser les patients à la nécessité de se faire dépister en cas de prise de risque ».
Etre pragmatique pour résoudre les problèmes
Mais la question est loin d’être uniquement médicale. Elle interroge les comportements individuels et les représentations de la sexualité. Stéphane Perez, médecin sexologue, a ainsi tenu à souligner combien la notion de prise de risque avait évolué : pour le spécialiste, les gays ou les jeunes ne doivent pas être stigmatisés, car c’est bien toutes les franges de la société qui réduiraient leur vigilance, devant l’évolution des représentations sociétales de la sexualité.
Michel Ohayon, coordinateur médical du Centre 190 de Paris, a pour sa part décrit la prise de risque des hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (HSH). Dans la « communauté » des gays, l’incidence des IST et notamment du VIH est supérieure à celle relevée dans le reste de la population. Mais il y a aussi le contexte environnemental : « Le droit à une vie matrimoniale leur étant refusée, beaucoup d’HSH ont fini par mettre la sexualité de côté, comme un loisir. » Dès lors qu’elle n’est pas affective, « cette sexualité a tendance à se décaler vers le transgressif », d’autant que l’homosexuel a dès le départ endossé ce rôle de transgression, du fait qu’il n’ait pas fait le « choix » d’une sexualité classique.
Par ailleurs beaucoup vivent seuls. Ce qui, comme chez les hétérosexuels, « ne favorise pas le fait de prendre soin de soi ». Sans compter certaines évolutions, loin d’être anecdotiques selon Michel Ohayon, qui favorisent de nouveaux modes de rencontres à risque (rencontres géolocalisées, voyages low cost vers les évènements festifs…). Dans cette population, « la société contraint les interactions sociales à l’espace privé, ce qui ne laisse pas de place pour la prévention », a résumé Michel Ohayon. Pour résoudre cette difficulté, il faudra donc miser « sur une prévention environnementale et non pas seulement comportementale, comme celle qui est aujourd’hui déployée ».
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