DANS UN AMPHITHÉÂTRE de la faculté parisienne de Necker, une soixantaine d’internes applaudissent à tout rompre. Matthieu Schuers, président de l’Intersyndicale nationale autonome représentative des internes de médecine générale (Isnar-IMG), vient de prendre la parole : «Depuis dix ans, la médecine générale, pierre angulaire du système de santé, cherche sa place à l’université. Le DES de médecine générale est un cache-misère, un placard à balais que l’on a daigné nous accorder. Devant l’absence totale de projet de nos ministères de tutelle et avant qu’il ne soit trop tard, c’est à Matignon que nous allons demander des garanties.» Depuis la création en 2004 du diplôme d’études spécialisées (DES) de médecine générale, internes de médecine générale et enseignants de la discipline travaillent conjointement à la mise en place d’une filière universitaire. Trois réunions de travail «stériles» ont été organisées ces derniers mois avec le ministère de l’Education nationale, toujours en l’absence du ministère de la Santé. «Aujourd’hui, nos enseignants ne sont pas titulaires de leur poste, les thèses de médecine générale ne sont pas présidées par des généralistes et la médecine générale n’est pas présente dans l’enseignement des 1eret 2ecycles», constate Catherine Laporte, porte-parole de l’Isnar-IMG. Sur le plan démographique, la situation est préoccupante, puisque 1 400 postes d’interne n’ont pas été pourvus ces deux dernières années à l’issue des épreuves classantes nationales (ECN). Les candidats ont préféré redoubler plutôt qu’opter pour la nouvelle spécialité.
Les internes dans le flou artistique.
L’Isnar-IMG réclame depuis de longs mois la création d’une section autonome au Conseil national des universités (CNU) et de postes d’enseignant titulaire. Le syndicat revendique également l’ouverture de postes de chef de clinique de médecine générale pour 2007, année de sortie des premiers diplômés du DES. Il demande, en outre, une équivalence de diplômes entre les résidents et les titulaires du DES. «Les résidents ont suivi la même formation que les internes. Cette équivalence leur donnerait accès aux diplômes complémentaires (Desc) , explique Catherine Laporte. On nous a laissé entendre la création d’une commission d’équivalence, mais il n’en est plus question aujourd’hui. On est dans le flou artistique.» A l’issue de leur marche symbolique vers Matignon, les internes de médecine générale n’ont pu être reçus par le Premier ministre, en déplacement à la Réunion. Ils espèrent obtenir un rendez-vous ultérieur avec Dominique de Villepin. L’intersyndicale va décider avec les présidents des associations régionales d’éventuelles actions à tenir et va poursuivre son lobbying auprès des parlementaires. Présent samedi à la réunion de l’Isnar-IMG, le Pr Pierre-Louis Druais, président du Collège national des généralistes enseignants (Cnge), a fustigé l’attitude des syndicats de médecins «obnubilés» par les élections professionnelles de mai prochain : «Ils ne comprennent pas l’ampleur de l’enjeu et font de la mendicité pour un euro par acte. La vraie question est de savoir si l’on aura une médecine générale demain. J’ai l’impression que la stratégie actuelle est de la faire disparaître. Le DES est une poupée que l’on nous a donnée pour nous calmer. Si, en juin, nous n’avons pas de perspective de filière au CNU et la titularisation des enseignants, c’est perdu pour 2007.» Structure scientifique, le Cnge entend davantage peser sur le plan politique et n’exclut pas de se transformer en structure syndicale si le dossier n’évolue pas plus vite. Le bureau du collège doit en décider le 4 mars. «Les syndicats roupillent, ils ne sont pas concernés par ce problème. Aujourd’hui, seuls les étudiants sont capables de faire bouger les politiques», conclut, fataliste, Pierre-Louis Druais.
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