CONGRES HEBDO
D EPUIS les recommandations précédentes de 1993 concernant les antithrombotiques et les antiplaquettaires, le rôle prépondérant de l'activation de l'agrégation plaquettaire lors des interventions coronariennes percutanées (ICP) et de l'angor instable a été mis au jour. Le récepteur de la glycoprotéine IIb/IIIa plaquettaire constituant la voie finale de l'agrégation plaquettaire, de nombreux essais ont évalué les inhibiteurs du récepteur de la glycoprotéine IIb/IIIa (anti-GPIIb/IIIa). Ils ont montré que l'abciximab et l'eptifibadide, deux représentants, permettent de réduire l'incidence des événements ischémiques chez les patients bénéficiant d'une ICP avec pose d'un stent.
Malgré les bénéfices cliniques démontrés, ils ne sont administrés à l'heure actuelle que dans approximativement 50 % des interventions coronariennes.
Le Dr Popma a précisé les recommandations actuelles des experts de l'ACC/AHA concernant l'utilisation des antiplaquettaires classiques (aspirine, ticlopidine) et nouveaux (clopidogrel et trois inhibiteurs du récepteur de la GPIIb/IIIa).
L'aspirine doit être prise au moins deux heures avant l'intervention coronarienne, à la dose de 81 mg à 325 mg, et poursuivie indéfiniment par la suite, non pas en prévention de la resténose mais en prévention secondaire de l'infarctus du myocarde (IM) aigu.
Chez les patients ayant une hypersensibilité à l'aspirine, il est conseillé de prescrire soit la ticlopidine, soit le clopidogrel, soit un inhibiteur du récepteur de la GPIIb/IIIa ; idéalement, la prise de ticlopidine ou de clopidogrel doit avoir lieu au moins vingt-quatre à soixante-douze heures avant l'ICP.
Stent et aspirine, ticlopidine ou clopidogrel
Depuis les essais randomisés ISAR, START et FANTASTIC ayant permis de préciser les phénomènes particuliers survenant lors de la pose d'un stent, il est communément admis qu'un traitement adjuvant par aspirine ou ticlopidine (500 mg en dose de charge ou bien 200 mg deux fois par jour) permet de réduire l'incidence des thromboses subaiguës intrastent.
En raison du profil de tolérance de la ticlopidine, elle peut être remplacée par le clopidogrel, qui a démontré une efficacité comparable, notamment dans l'essai clinique d'équivalence CLASSICS.
La numération formulation sanguine doit être contrôlée régulièrement en cas de prescription de ticlopidine, et dans une moindre mesure, de clopidogrel, du fait de la possibilité de survenue d'une neutropénie (1 %) liée à la prise de ticlopidine, ou d'un purpura thrombotique thrombopénique secondaire, rapporté - exceptionnellement - avec ces deux molécules, mais plus souvent sous ticlopidine.
Afin de proposer des recommandations, le comité d'experts de l'ACC/AHA a étudié les résultats des essais cliniques (en particulier EPISTENT et ESPRIT) évaluant les trois produits actuellement disponibles pour administration par voie intraveineuse dans les interventions coronariennes - abciximab, anticorps monoclonal ; tirofiban, anti-GPIIb/IIIa non peptidique et eptifibatide, peptide de synthèse.
Leurs caractéristiques diffèrent, en particulier leur demi-vie d'élimination plasmatique, courte pour l'abciximab et plus prolongée pour l'eptifibatide et le tirofiban ; sont également distincts le rapport substance active/récepteur, plus élevé pour l'eptifibatide et le tirofiban que pour l'abciximab, de même que le pourcentage de substance active dans le bolus - et cela est très important lorsque l'on compare les différents essais.
L'essai EPISTENT, réalisé de 1996 à 1997, a démontré les bénéfices de l'abciximab chez les patients qui ont eu une implantation de stent pour sténose coronarienne ; les patients ont été randomisés en trois groupes : un groupe placebo plus stent, un groupe abciximab plus stent et un groupe abciximab plus angioplastie. On a observé, comme dans les autres essais avec l'abciximab, une réduction de près de 50 % du risque de décès, d'IM et de recours à une revascularisation urgente à trente jours de suvi, retrouvé six mois plus tard.
Il est à noter qu'au moment de l'élaboration des nouvelles recommandations le groupe de travail de l'ACC avait déjà connaissance des résultats préliminaires des études TACTICS-TIMI18, ESPRIT et TARGET, diffusés uniquement sous forme d'abstracts.
Résultats préliminaires d'ESPRIT et de TARGET
Dans l'essai ESPRIT, plus de 2 000 patients ont été randomisés dans le cadre d'une angioplastie coronarienne programmée avec pose d'un stent ; ils ont reçu soit l'eptifibatide en 2 bolus successifs puis en perfusion à la dose de deux microgrammes/kg/min pendant dix-huit à vingt-quatre heures, en association avec de l'héparine à la dose 60 mg/kg, soit un placebo et de l'héparine en bolus à raison de 60mg/kg, puis administrée en perfusion afin d'obtenir un TCA de 200 à 300 s.
Les résultats d'ESPRIT montrent, tant après quarante-huit heures (critère principal d'évaluation) qu'à trente jours et au sixième mois de suivi, une réduction du risque de décès et d'IM d'environ 35 % en faveur de l'eptifibatide.
L'essai TARGET avait pour objectif d'évaluer, dans les interventions percutanées réalisées chez 4 800 patients, non pas l'efficacité mais l'équivalence entre tirofiban et l'abciximab. Le pourcentage d'événements était un peu plus élevé dans le groupe tirofiban, sans atteindre le seuil de significativité statistique.
L'administration, avant un cathétérisme cardiaque, d'un inhibiteur du récepteur de la GPIIb/IIIa constitue un atout notable chez les patients présentant un syndrome coronarien aigu. Cette constatation découle des conclusions des essais CAPTURE, PURSUIT et PRISM-PLUS, qui ont mis en évidence une réduction de 30 à 50 % du risque de récidive d'infarctus avant la réalisation d'une angioplastie, avec un bénéfice très élevé lorsque les antiGPIIb/IIIa sont administrés quatre heures au moins avant l'intervention.
Plus récemment, l'essai TACTICS -TIMI18 a comparé, dans le cadre d'une intervention coronarienne chez 2 100 patients, une stratégie agressive (cathétérisme et revascularisation) à une attitude conservatrice médicale (qualifiée en fait d'« agressive sélective », car le cathétérisme cardiaque n'était pratiqué qu'en cas de récidive ischémique ou bien d'épreuve d'effort positive) ; tous les sujets ont reçu le tirofiban, poursuivi pendant les douze heures qui suivaient le geste interventionnel.
On a observé que la stratégie invasive était associée à une réduction significative du critère d'évaluation combiné décès, IM et récidive ischémique, à trente jours comme à six mois du suivi, réduction particulièrement importante chez les patients ayant une élévation du dosage de la troponine : cette diminution atteignant 54 % pour le critère d'évaluation principal et s'élevant à 53 % en ce qui concerne le critère combiné décès et IM.
Le Dr Popma précise que « l'abciximab et l'eptifibatide permettent de réduire l'incidence des événements ischémiques chez les patients subissant une ICP avec pose d'un stent ; un essai comparatif (TARGET) a démontré la supériorité de l'abciximab par rapport au tirofiban chez des patients ayant eu une intervention coronarienne percutanée. A ce jour, aucun essai n'a comparé abciximab et eptifebatide ».
Il conclut que « les recommandations des experts de l'ACC/AHA découlent de données globales, émises dans le contexte très évolutif des ICP, où des essais importants sont sans cesse en cours ; de ce fait, le choix de l'antiplaquettaire chez un patient donné doit se fonder sur l'appréciation du rapport bénéfice/risque ».
D'après la communication du Dr J. J. Popma, Boston, MA.
ACC/AHA* : American College of Cardiology/American Heart Association.
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