Préalables
Représentant la solution thérapeutique de dernier recours, la décision d’une intervention prothétique totale du genou résulte de la confirmation d’un certain nombre de préalables : l’histoire naturelle du processus pathologique en cause est irréversible ; les dégâts anatomiques ont atteint un degré irrattrapable de sévérité ; la dégradation fonctionnelle du membre inférieur compromet immédiatement ou à terme la qualité de vie et/ou les capacités d’autonomie du (ou de la) patient(e) candidat(e).
Le spectre des maladies en cause est toutefois très large : pathologie dégénérative primaire ou secondaire, pathologie inflammatoire chronique (rhumatismale, métabolique, hémophilique...), pathologie séquellaire posttraumatique (distincte ou non d’une gonarthrose secondaire posttraumatique), pathologie vasculo-squelettique (ostéonécrose)...
Gonarthrose
En nombre, c’est la pathologie dégénérative (gonarthrose) qui reste le plus gros pourvoyeur de patients bénéficiant de cette arthroplastie (plus de 60 %).
Que cette gonarthrose soit secondaire (déviation axiale en varus ou en valgus, surcharge pondérale...) ou en apparence primitive, lorsque son stade évolutif dépasse un certain stade, elle ne peut plus raisonnablement justifier une chirurgie conservatrice (arthroscopie, ostéotomie...) et relève alors d’une prothèse totale de genou.
Quant à la pathologie non dégénérative, elle relève de la même logique de décision (perte de contrôle de la symptomatologie malgré les médicaments, destruction cartilagineuse avancée...), mais peut s’en distinguer par d’autres particularités (fragilisation osseuse et cutanée liée à la corticothérapie, risque infectieux accru...).
La candidature à l’intervention
La symptomatologie devenue plus sévère au fil des mois ou des années d’évolution associe un ou plusieurs des éléments classiques bien connus suivants : douleurs (dont on précise le caractère mécanique ou inflammatoire et l’intensité), boiterie, sensations de dérobement (imposant ou non l’usage d’une canne), limitation des rayons d’autonomie (périmètre de marche réduit, impossibilité d’usage des escaliers, confinement à domicile), gonflement (occasionnel ou chronicisé).
L’examen clinique s’attachera, au minimum, à vérifier quelques données fondamentales :
– tout d’abord, la mobilité et l’état de la hanche sus-jacente pour éviter le piège classique des algies de genou provenant de cette région ;
– l’alignement et la stabilité debout de ce genou (en appui bipodal, plus difficilement en appui monopode souvent compromis...) ;
– la mobilité articulaire plus ou moins altérée, tout particulièrement en mesurant la perte fréquente de l’extension (degré de flessum) ;
– la stabilité, surtout dans le plan frontal (valgus-varus) ;
– la puissance d’extension active témoin de la qualité fonctionnelle de l’appareil extenseur ;
– la présence éventuelle d’un épanchement et sa quantification ;
– l’état cutané de la région (éventuelle présence de cicatrices d’interventions antérieures, dermatose de voisinage...) ;
– l’état artériel et veineux du membre inférieur concerné.
Evaluation radiographique
Si quelques clichés simples de radiographie conventionnelle suffisent le plus souvent au chirurgien à proposer l’indication, il est, dans certains cas, préférable d’élargir cette étude radiographique.
La radiographie conventionnelle de base se contente d’un cliché étendu de face en charge, d’un profil strict et d’incidences fémoro-patellaires.
La réalisation d’une pangonographie en appui autorise une mesure plus précise de la déviation angulaire.
Deux examens supplémentaires sont optionnels et ne sont pas systématiquement prescrits : le scanner qui fournit une appréciation plus exacte des désordres fémoro-patellaires et d’éventuels defects ostéo-chondraux de la fémoro-tibiale ; l’IRM qui apporte parfois d’intéressantes précisions en cas d’ostéonécrose ou de lésions méniscales symptomatiques.
Bilan préopératoire
Comme pour toute démarche thérapeutique de chirurgie orthopédique programmée (par essence fonctionnelle), elle ne tire sa légitimité que d’une parfaite appréciation du rapport entre les risques encourus et les bénéfices attendus de l’intervention. Cette notion réclame d’ailleurs d’être totalement intégrée par le patient au terme d’une approche pédagogique d’information détaillée.
La population candidate à la prothèse totale de genou (plutôt gériatrique) étant majoritairement porteuse d’une comorbidité non négligeable, les recommandations du médecin traitant (ou de l’interniste) sont essentielles.
L’avis du cardiologue (après ECG et écho-Doppler artério-veineux des membres inférieurs et éventuellement carotidien) est précieux.
Bien entendu, la visite anesthésique préopératoire est obligatoire et permet de planifier le projet de ce strict point de vue (usage d’une anesthésie générale ou régionale des membres inférieurs, protocole d’autotransfusion...).
Le profil biologico-métabolique doit être strictement cerné (diabète, trouble de l’hémostase, insuffisance hépatique ou surrénalienne...).
Enfin, ce bilan ne saurait se passer d’un contrôle optimalisé (sans certitude cependant d’éradication...) du risque infectieux (radiographie panoramique dentaire suivis de soins endo- ou périodontiques, examen cytobactériologique urinaire suivi d’une éventuelle consultation urologique).
Indication et processus décisionnel
Au terme de ce bilan locorégional (genou au sein du membre inférieur) et général approfondi, qui ne peut être précipité, l’équipe médico-chirurgicale est en mesure de catégoriser le(la) patient(e) candidat(e) à l’intervention :
– intervention confirmée dans sa programmation ;
– intervention susceptible de confirmation moyennant précautions particulières et/ou corrections préalables ;
– contre-indication à l’intervention.
Les deux premières catégories ont été évoquées à propos du bilan. La dernière appelle une description plus spécifique : certaines contre-indications sont en général absolues et définitives et comprennent :
– un antécédent d’arthrite septique et/ou une source persistante d’infection dans l’organisme ;
– une maladie vasculaire évoluée du membre inférieur en cause ;
– une sévère dysfonction de l’appareil extenseur ;
– une disqualification anesthésique (non obligatoirement liée à un âge très avancé) ou liée à des capacités compromises de récupération postopératoire (projet de parcours rééducatif ultérieur).
D’autres contre-indications peuvent être plus nuancées : altérations cutanées de la zone opératoire (anciennes cicatrices, dermatoses entre autres psoriasiques...), obésité morbide, arthropathie tabétique (altérations neuropropioceptives...).
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