Lors de ce congrès a eu lieu la présentation de la première étude randomisée spécifiquement conçue pour étudier le bénéfice d’une plastie mitrale associée à un pontage coronaire en cas de cardiopathie ischémique avec dysfonction ventriculaire gauche compliquée d’une IM ischémique modérée. Les 301 patients inclus ont été randomisés entre pontage coronaire seul ou pontage associé à une annuloplastie sous-dimensionnée. L’âge moyen de 65 ans et la fraction d’éjection ventriculaire gauche moyenne de 40 % correspondent à la présentation habituelle de cette pathologie.
Après un an de suivi, il n’y a pas eu de différence significative sur le critère principal de volume télésystolique indexé à la surface corporelle : 46,1±22,4 ml/m² dans le groupe pontage seul et 49,6±31,5 ml/m² dans le groupe pontage + plastie. Il n’y a pas eu non plus de différence entre les 2 groupes concernant la mortalité (respectivement 7,3 et 6,7 %) ou le critère composite combinant mortalité et événements cardiaques ou vasculaires cérébraux (respectivement 25,2 et 25,3 %). La mortalité opératoire ne différait pas entre les 2 groupes (2,7 et 1,3 %), mais la durée de séjour était plus longue et les accidents vasculaires cérébraux plus fréquents lorsqu’une plastie mitrale était associée au pontage.
Dans l’IM ischémique, la valve mitrale est anatomiquement normale, mais à l’origine d’une régurgitation en raison des modifications géométriques du ventricule gauche qui causent une traction sur la valve et donc un défaut de co-aptation. Il ne s’agit donc pas initialement d’une maladie de la valve, mais du ventricule gauche, d’origine ischémique dans la moitié des cas. Ces caractéristiques opposent l’IM ischémique à l’organique dans laquelle une anomalie structurelle de la valve mitrale est la cause de la régurgitation. Dans l’IM organique, la dilatation ventriculaire gauche est la conséquence de la régurgitation alors qu’elle en est la cause dans l’IM ischémique. Cependant, le volume régurgitant lié à l’IM ischémique aggrave la dilatation ventriculaire gauche causale. Ainsi, la correction chirurgicale de l’IM ischémique peut être justifiée dans le but d’interrompre ce cercle vicieux, même s’il ne peut s’agir d’un traitement de la cause de la maladie comme dans le cadre de l’IM organique.
Les études observationnelles ont montré que le risque chirurgical est plus élevé dans l’IM ischémique que dans l’IM organique, la survie tardive est moins bonne. L’analyse de ces données est difficile en raison des nombreux facteurs confondants qui influencent le pronostic, en particulier la fonction ventriculaire gauche et la possibilité d’une récupération de la fonction ventriculaire gauche après pontage. C’est tout l’intérêt de l’étude randomisée qui est la seule possibilité d’évaluer objectivement l’influence propre de la chirurgie mitrale.
Les résultats de l’étude Mitra-Fr
Les recommandations actuelles sont nettement plus restrictives pour l’IM fonctionnelle que pour l’organique (2). La chirurgie mitrale est recommandée en cas d’IM ischémique sévère s’il y a par ailleurs une indication de pontage coronaire. L’étude récente n’apporte pas d’argument pour étendre les indications aux IM modérées. Enfin, dans les IM ischémiques sans indication de pontage ou dans les autres IM fonctionnelles sur cardiopathie non ischémique, la chirurgie est à discuter uniquement chez des patients restant symptomatiques sous traitement médical optimal et si le risque opératoire n’est pas excessif. Il existe un regain d’intérêt pour le traitement des IM fonctionnelles en raison du développement de techniques percutanées associées à un risque plus faible que la chirurgie, comme le MitraClip. Les résultats de plusieurs registres sont prometteurs mais il est indispensable d’attendre le résultat des études randomisées en cours, en particulier de l’étude française Mitra-Fr avant d’en préciser le bénéfice clinique et donc les indications.
(1) Smith PK, Puskas JD, Ascheim DD, et al. Surgical treatment of moderate ischemic mitral regurgitation. N Engl J Med 2014;371:2178-88
(2) Vahanian A, Alfieri O, Andreotti F, et al. Guidelines on the management of valvular heart disease (version 2012). Eur Heart J 2012;33:2451-96
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