La survenue de multiples cas de méningites bactériennes, chez des enfants porteurs d'implants cochléaires, montre tout l'intérêt d'une vaccination antipneumococcique avant la chirurgie. La recommandation provient d'un groupe de médecins américains des Centers for Disease Control (Jennita Reefhuis et coll., Atlanta) eux-mêmes alertés par un fabricant d'implants cochléaires.
En pratique, en juin 2002, la FDA reçoit la notification de 15 cas de méningites bactériennes chez des sujets ayant reçu des implants. Les modèles comportant un « positionneur » (dispositif en silastic inséré près de l'implant et destiné à améliorer la transmission du signal électrique en pressant l'électrode contre la cochlée) semblent immédiatement impliqués. En l'absence de données objectives sur une telle pathologie, une enquête devient indispensable.
Des enfants de moins de 6 ans
Les médecins d'Atlanta ont donc mis sur pied une étude de cohorte incluant 4 264 enfants, âgés de moins de 6 ans lors de l'implantation, ainsi qu'une étude cas-contrôles. Les interventions avaient eu lieu entre janvier 1997 et août 2002. L'objectif du travail était d'établir l'incidence des méningites bactériennes parmi ces enfants et d'identifier les facteurs responsables. Dans leur article paru dans le « New England Journal of Medicine », les auteurs expliquent avoir ciblé les enfants, car ils « représentent la population qui recevra la majorité des implants dans le futur ».
L'analyse des chiffres ne laisse pas de place au doute. Les auteurs ont relevé 26 cas de méningite bactérienne, soit une incidence d'infections dues à S. pneumoniae de 138,2 cas pour cent mille personnes/an, soit plus de 30 fois l'incidence dans la population générale. La survenue d'une méningite est fortement associée à la pose d'un implant avec positionneur (odds ratio : 4,5), mais aussi avec la présence d'une malformation de l'oreille interne ou d'une fuite de LCR. Parmi les sujets ayant reçu un implant sans positionneur, l'incidence des méningites demeure malgré tout 16 fois plus élevée que dans la population générale. Cependant, les auteurs font remarquer que leur travail n'ayant pas déterminé la fréquence de ces infections chez les enfants sourds profonds non implantés, il se peut que l'incidence soit également plus élevée chez eux que chez les enfants tout-venant. En effet, comme le montre l'étude cas-contrôles, il existe chez ces enfants sourds plus fréquemment des malformations de l'oreille interne, de fuites de LCR ou des antécédents de méningite.
Les médecins américains s'expliquent mal le rôle du positionneur dans la survenue des infections. Peut-être faut-il impliquer la cochléostomie plus large, la présence d'un corps étranger supplémentaire, un traumatisme local dû au dispositif, une mauvaise cicatrisation ou...<\!p>une combinaison de ces divers facteurs.
La vaccination antipneumococcique
Le travail peut difficilement évaluer l'effet protecteur de la vaccination antipneumococcique chez ces enfants en raison du trop faible nombre d'enfants vaccinés. Les auteurs la recommande malgré cela, au moins deux semaines avant l'intervention, ainsi qu'une vaccination anti- haemophilus B. Parents et soignants doivent être informés et rester vigilants dans les mois qui suivent l'intervention. Les chirurgiens doivent, de plus, informer parents et médecin traitant de l'existence d'une malformation ou d'une fuite de LCR qui majorerait le risque infectieux.
Restait une question en suspens : faut-il pratiquer l'ablation des implants avec positionneur ? Non, répondent les Américains, car le mécanisme en cause reste inconnu, rien ne prouve que l'ablation diminuerait l'incidence des méningites et l'explantation apporterait ses propres risques chirurgicaux.
« New England Journal of Medicine », vol. 349, n° 5, 31 juillet 2003, pp. 435-445.
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