DEPUIS 2005, différents Etats ont élaboré des plans pandémie grippe aviaire en se fondant sur les recommandations de l’OMS. Tous ces plans ont en commun de stratifier les distributions de médicaments antiviraux, de mettre en place des campagnes de vaccinations, de proposer des restrictions de voyages et d’activités sociales. Pour affiner les mesures et les adapter de façon appropriée aux éléments géographiques et démographiques, les chercheurs en épidémiologie élaborent des modèles mathématiques prenant en compte les paramètres propres du pays. L’équipe de biomathématiciens de Los Alamos propose, dans les « Proceedings » de l’Académie des sciences américaine, une analyse des besoins en antiviraux et vaccins selon le taux de reproduction de base (RO qui désigne le nombre de personnes atteintes par chaque porteur de la maladie), et les mesures de confinement des personnes.
Le modèle mathématique a été développé pour une population de 281 millions d’habitants. En moyenne, les chercheurs ont considéré que, durant les douze heures de jour, les personnes pouvaient être mises en contact proche avec d’autres en moyenne dans trois ou quatre circonstances distinctes selon les âges et les jours de la semaine : domicile, voisinage, garderie, écoles, aires de jeux, travail, transports et commerces. Ils ont pris en compte les éventuels voyages réalisés au cours de la période analysée : en moyenne chaque individu effectue trois voyages de longue distance (pendant 4,1 jours en moyenne) chaque année. Les auteurs ont considéré que, même en période pandémique, les frontières des Etats-Unis ne pourraient jamais être complètement infranchissables pour les malades : ils estiment que 0,04 % des voyageurs qui débarqueraient sur le sol américain seraient en période d’incubation et développeraient la maladie au cours de leur séjour aux Etats-Unis. La simulation a en outre été établie en considérant une période épidémique de 180 jours et en prenant en compte un nombre de nouveaux malades journaliers de 10 000 au moment du pic épidémique.
Mesures de protection.
Tous ces facteurs étant pondérés, les auteurs ont procédé à plusieurs analyses distinctes correspondant à différents trains de mesures de protection des populations : traitement antiviral prophylactique généralisé ou ciblé, conjonction de ce traitement avec la mise en place de campagnes de vaccinations, restriction des transports, mise en place du confinement des enfants ou de toute la population, à l’exception des catégories socioprofessionnelles indispensables.
Pour que la stratégie fondée sur l’utilisation d’un traitement antiviral prophylactique généralisé, mais distribué spécifiquement dans les zones atteintes, puisse se révéler efficace, il faudrait disposer de 10 millions de traitements par oséltamivir (2 cp par jour pendant 5 jours), si le taux de reproduction de base de l’infection est de 1,7. Si ce taux est de 1,8, le nombre des traitements nécessaires serait de 51 millions et, s’il est supérieur à 2, il faudrait plus de 182 millions de traitements pour circonscrire la maladie. Actuellement, seulement 2,8 millions de traitements par oséltamivir sont stockés aux Etats-Unis. Dans ces conditions, il est plus raisonnable d’envisager des mesures de distribution des antiviraux ciblées sur les personnes en contact proche avec les malades. Toutefois, en raison de la similitude des symptômes avec ceux de la grippe saisonnière, les auteurs estiment que près de 10 % des traitements seraient prescrits à des personnes qui ne présenteraient pas de risque réel d’infection par le virus H5N1.
La vaccination.
La vaccination pourrait, elle aussi, être utilisée pour limiter l’extension de la maladie. Si le nombre des doses vaccinales disponibles est insuffisant pour qu’on puisse procéder à deux injections chez tous les individus, l’injection d’une seule dose de vaccin pandémique à 10 millions de personnes par semaine pendant vingt-cinq semaines permettrait de limiter la progression de la maladie dans le cas où le RO est inférieur à 1,6. Pour un RO compris entre 1,9 et 2,4, la vaccination ne serait efficace que si elle était accompagnée de distribution d’antiviraux ciblés et de mesures de restriction des voyages et des activités sociales.
« Proc Natl Acad Sci USA », édition avancée en ligne.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature