Tel qu'il est organisé aujourd'hui, l'hôpital public, surtout quand il est petit, surtout quand il soigne des enfants ou les fait naître, endort des malades, les opère ou les radiographie, manque de médecins.
En dépit de cette pénurie, identifiée depuis plusieurs années, les 55 000 praticiens qui y exercent leur art sont, 35 heures obligent, censés travailler vingt jours de moins par an depuis le 1er janvier. Ils doivent aussi, comme la réglementation européenne le demande, intégrer les gardes dans leur temps de travail dès l'année prochaine et donc réduire d'autant leur présence active à l'hôpital. « Intenable » en l'état actuel des choses, jugent avec le Dr François Aubart, président de la CMH (Coordination médicale hospitalière), la grande majorité des professionnels du secteur.
La réduction du temps de travail (RTT) des médecins hospitaliers a beau devoir s'accompagner, comme l'a promis le gouvernement de Lionel Jospin en octobre dernier, de la création à terme de 3 500 nouveaux postes de praticiens hospitaliers (PH) et d'assistants, dont 2 000 avant 2004, rien n'y fait. Car qui voudra de ces postes quand entre 15 % et 20 % des postes de PH sont déjà vacants aujourd'hui faute de candidats pour les occuper ? Personne, répondent en chur médecins et directeurs d'hôpital. Moins bien rétribuée que dans le secteur privé, en dépit des efforts consentis dans ce domaine par la gauche plurielle, soumise aux fortes contraintes du service public et de la permanence des soins, la médecine hospitalière ne fait plus recette.
Préexistante à la RTT, « l'inquiétude » de l'hôpital public quant à ses possibilités de recrutement de médecins n'a fait donc qu' « augmenter » avec elle : Patrice Barberousse, président du Syndicat national des cadres hospitaliers (SNCH), le confesse.
Dans la chasse aux médecins, tous les hôpitaux ne sont pas logés à la même enseigne. Les contrastes sont d'abord géographiques : « Tout le littoral méridional est par exemple épargné, ainsi que les villes moyennes proches de grosses agglomérations, comme Armentières ou Montauban », explique le président de la conférence des directeurs de centre hospitalier (CNDCH), Alexis Dussol, qui poursuit : « En revanche, pour les structures situées dans des zones enclavées, loin des métropoles régionales, le problème est réel et même, la situation s'est dégradée au cours des dernières années. » Les hôpitaux du Nord, de Champagne-Ardenne, du Centre, du Limousin, de Bretagne... ont des difficultés de recrutement dans des spécialités dont la liste s'est allongée. La chirurgie et la médecine d'urgence ont rejoint la classique cohorte des disciplines « sinistrées » : anesthésie, obstétrique, pédiatrie, psychiatrie et radiologie. Les CHU sont évidemment bien moins touchés que les centres hospitaliers mais ils n'échappent pas totalement à la pénurie. Une pénurie qui, quand elle ne conduit pas à des fermeture de services entiers, est gérée à la petite semaine : on engage des médecins qui n'ont pas l'autorisation d'exercer la médecine en France - et l'hôpital - ce faisant, est hors la loi - ou bien on a recours à l'intérim, en particulier pour les gardes - et cela coûte une fortune. Un bricolage qui ne passera pas l'épreuve de la RTT.
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