CETTE ENQUÊTE NATIONALE est une première. Jamais, jusqu'à présent, les reports de charges des hôpitaux n'avaient été évalués avec précision. A l'heure du passage à la T2A (tarification à l'activité), qui introduit de nouvelles incertitudes sur le financement des hôpitaux, la Fédération hospitalière de France (FHF) et les Conférences de DG de CHU et de directeurs de CH ont souhaité connaître la réalité de la situation en menant une étude approfondie.
Un tiers des hôpitaux représentant 57 % des budgets hospitaliers publics ont répondu à l'enquête. Les diverses origines possibles des reports de charges, ces dépenses reportées sur l'exercice suivant et qui se cumulent d'année en année, ont été passées en revue. Des causes structurelles s'ajoutent à l'insuffisance des crédits budgétaires. La FHF et les conférences ont intégré dans leur enquête les différés de paiement (certains hôpitaux, contrairement à ce que prévoit la réglementation, payent la taxe sur les salaires et la prime de service avec les crédits de l'année suivante), ainsi que les créances irrécouvrables, ces factures que les patients oublient ou refusent de payer. « En Ile-de-France, cela représente de grosses sommes d'argent, dit Yves Gaubert, responsable des finances à la FHF. Après des mois de relances infructueuses, le directeur est contraint d'intégrer ce manque de recettes dans son budget. Il doit trouver un moyen pour financer ces consultations non réglées. »
Plus 25 % entre 2002 et 2003.
Pour financer ces dépenses, masquer les reports de charges et combler leur déficit, certains hôpitaux utilisent les crédits correspondants à des postes de médecins non pourvus ou des provisions affectées par l'ARH (agence régionale de l'hospitalisation) en vue d'une opération ciblée, comme la création d'un nouveau service. Ces pratiques ont également été mesurées, de manière à dresser un tableau exhaustif de la situation. Les résultats, rendus publics ces jours-ci, sont « extrêmement préoccupants », s'alarment la FHF et les deux conférences.
Entre 2002 et 2003, les budgets hospitaliers ont augmenté de 5,5 à 6 % et les seuls reports de charges comptables ont progressé de 25 % hors Assistance publique-Hôpitaux de Paris (ils ont été multipliés par 2,6 avec l'AP-HP). Sur la seule année 2003, pour les établissements ayant répondu à l'enquête, le montant des reports de charges s'élève à 310 millions d'euros, auxquels s'ajoutent 93,5 millions d'euros, une somme qui a couvert artificiellement les reports de charges en raison des postes médicaux vacants. En y rajoutant les reports cumulés, on atteint, à fin de 2003, un montant d'au moins 650 millions d'euros.
En additionnant les 126 millions d'euros de sous-dotation structurelle, le besoin total de financement pour les établissements ayant répondu se monte à 776 millions d'euros, chiffrent la FHF et les conférences.
Une somme bien supérieure aux 300 millions d'euros promis en mai dernier par le ministère de la Santé pour faire repartir les hôpitaux sur des bases économiquement saines - au congrès Hôpital expo Philippe Douste-Blazy disait vouloir « apurer les comptes, et remettre les compteurs à zéro ». Cette enveloppe de 300 millions doit être débloquée cet été ; la FHF et les conférences attendent des précisions sur sa répartition. Pour ces organisations, l'effort est louable, mais insuffisant : il faut remettre au pot. « L'amélioration définitive passe par le rebasage des dotations hospitalières, disent-elles. Le financement à l'activité doit, à terme, régler cette situation. Mais la progressivité de sa mise en œuvre ne règle pas la situation des établissements qui sont structurellement en reports de charges ». Pour cette raison, « il convient d'abonder l'enveloppe de 475 millions d'euros » supplémentaires, car, explique Yves Gaubert, « il serait dramatique de démarrer dans un nouveau mode de financement (la T2A) en accumulant le passif ».
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