Etrange rituel tous les cinq ans autour du « totem » de la bioéthique. Tout se passe comme si, dans ce domaine, la science n’avançait que par demi-décennie ! Ou comme si les principes posés un jour devaient -tels les yaourts ou le ketchup- périmer le lendemain. Père de la loi de 2004, Jean-François Mattei trouve ridicule cette obligation quinquennale de révision de notre législation de bioéthique. Il n’a pas tort. Cinq ans, c’est à la fois trop tôt pour légiférer sur certaines questions, et trop tard pour intervenir sur d’autres. Ainsi, l’échéance 2009-2010 apparaîtra encore prématurée pour trancher sur la recherche sur les cellules d’embryon, mais à la traîne d’une loi Léonetti qui encadre depuis trois ans la fin de vie.
On légifère beaucoup trop en France. Les médecins le savent plus que d’autres. Et si, s’agissant de la bioéthique, si on peut se réjouir que l’Hexagone soit en avance, ce n’est pas une raison pour donner dans la frénésie législative qui caractérise notre époque. Le risque serait une instabilité chronique des règles du jeu, ou de voir la bioéthique devenir le champ clos des affrontements entre lobbies. De ce point de vue, le dernier livre de la philosophe Sylviane Agacinski est venu opportunément siffler la fin de la récréation, en rappelant que, pour la femme comme pour l’enfant, une légalisation de la gestation pour autrui serait plus qu’une trangression, un séisme. Sur cette question, comme sur d’autres, sacrifier à la mode reviendrait en fait à confondre progrès et fuite en avant.
En d’autres termes, ce n’est pas parce que les dispositions de bioéthique sont révisables tous les cinq ans, que l’on se doit de les réviser. Reconnaissons pourtant une vertu à ce remue-méninges : sur des questions qui concernent tout le monde, mais qui n’intéressent que les experts, voilà une occasion rêvée de populariser le débat. Dans quelles conditions développer le diagnostic préimplantatoire ? Comment encadrer la délivrance des tests en médecine prédictive ? Faut-il faciliter le consentement au don d’organes ? La société en général, et les médecins en particulier, doivent d’urgence se réapproprier ces questions, sous peine d’être un jour victime d’un législateur trop zélé. Alors, puisque la parole vous est offerte, saisissez-là ! A l’occasion des Etats généraux de la bioéthique qui se déroulent jusqu’à l’été, donnez votre opinion sur le site ouvert par le gouvernement www.etatsgenerauxdelabioethique.fr.
Ou mieux, écrivez au Généraliste, pour que ce débat ne se fasse pas sans vous.
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