Au congrès de l'Asco à La Nouvelle-Orléans

Les gènes et les traitements anticancer

Publié le 08/06/2004
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UNE EQUIPE de cancérologues américains coordonnée par le Dr J. Sloan (Rochester, Minnesota) a présenté un travail sur le lien entre génome et qualité de vie chez 494 patients atteints de cancer du côlon métastatique et traités par chimiothérapie.
Avant toute prise en charge, les sujets ont rempli un questionnaire précis sur les composants de leur qualité de vie. Ils ont ensuite reçu un traitement antimitotique comprenant du 5-fluorouracile, de l'irinotecan et de l'oxyplatine. Dans le même temps, les investigateurs ont analysé le profil génomique des patients en se concentrant sur l'expression de trois gènes distincts -  Dpyd, Mthrf et Tyms - impliqués dans l'utilisation cellulaire des folates, une composante essentielle du bon fonctionnement cellulaire et utilisés parfois comme marqueur général de bonne santé. En cours et en fin de chimiothérapie, ils ont de nouveau soumis l'ensemble des patients à des questionnaires de qualité de vie afin de préciser l'effet du traitement et de l'évolution naturelle de la maladie sur différents facteurs.
Les chercheurs ont ainsi découvert que les sujets porteurs de deux isoformes du gène Dpyd étaient moins sujets à l'asthénie per- et post-thérapeutique que leur congénères ayant le même gène en deux exemplaires. En outre, les malades qui portaient à proximité de leur gène Tyms un marqueur dit Tser voyaient leur qualité de vie s'améliorer par rapport aux sujets contrôle (moindre état de fatigue, incidence moins importante de dépression associée).
En revanche, les variations génétiques sur le gène Mthrf ne semblent pas corrélées avec la qualité de vie des malades sous chimiothérapie. Pour les auteurs, « l'homéostasie des folates semble jouer un rôle important dans la qualité de vie des malades atteints de cancers colique et des études plus générales incluant différents types de cancers doivent maintenant être mises en place ».

Les effets secondaires.
Un deuxième travail a concerné un sujet plus concret : l'équipe du Dr R. Suk (Harvard) a étudié l'influence d'un gène spécifique ( Ercc1, qui code pour une enzyme impliquée dans la réparation nucléotidique à la suite de l'utilisation de chimiothérapie utilisant les dérivés du platine). L'existence du polymorphisme ERCC1 C8092A peut induire à une altération des capacités de régénération cellulaire des tissus sains et conduire à une majoration de la toxicité de certaines chimiothérapies. Les oncologues ont recherché ce polymorphisme chez 147 sujets atteints de cancer du poumon non à petites cellules à un stade avancé et traités par une combinaison de radio et de chimiothérapie à base de dérivé du platine ; 21 % des malades, en moyenne, ont ressenti des effets indésirables qualifiés d'importants, voire de majeurs (nausées, vomissements, œsophagite). L'analyse combinée de cette donnée et de la caractérisation du gène Ercc1 a permis de conclure que chez les sujets porteurs d'un variant allélique (C/A, A/A) le risque d'effets indésirable majeurs était de 30 % contre 14 % pour les patients contrôles. En revanche, l'existence d'un polymorphisme ne s'est pas traduite en termes d'effets secondaires hématologiques.

Le pronostic.
Enfin, une présentation a porté sur l'influence des variations génétiques sur le devenir des femmes atteintes de cancer du sein et traitées par tamoxifène. A l'heure actuelle, les deux principaux marqueurs de pronostic des cancers du sein restent les récepteurs aux estrogènes et à la progestérone. Néanmoins, même lorsque ces récepteurs sont présents, près d'un tiers des femmes développent à plus ou moins long terme une résistance au tamoxifène. Par analyse génétique, les chercheurs ont découvert que 19 gènes au moins étaient présents chez les femmes qui avaient échappé au traitement par tamoxifène en dépit de l'existence de récepteurs aux estrogènes et à la progestérone. L'analyse affinée a montré que l'existence de deux gènes -  HOX B13 et IL17BR - pouvait à elle seule suffire pour estimer le pronostic des malades. Ces deux gènes sont en rapport avec des gènes de la motricité des cellules épithéliales, ce qui laisse penser qu'ils pourraient favoriser l'envahissement local et à distance des cellules tumorales.

Congrès de l'American Society of Clinical Oncology (Asco), La Nouvelle-Orléans.

> Dr ISABELLE CATALA

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7556