POUR LES GÉNÉRALISTES, certaines coïncidences de calendrier se révèlent bien malheureuses.
à la date même où la convention médicale avait programmé la revalorisation du tarif de la consultation (il y a un an, le principe du passage du C à 23 euros avait été prévu au «1erjuin 2008» en fonction des marges financières et de l'engagement des médecins dans la maîtrise et la prévention), augmentation plus virtuelle que jamais, le droit s'est montré également défavorable aux généralistes qui réclament l'accès à la nomenclature spécialisée (en premier lieu au CS pour facturer leur consultation). Dans son jugement au fond, le premier du genre, sur l'habilitation des spécialistes de médecine générale à coter leurs actes en CS (et au remboursement des patients sur cette base), le tribunal des affaires de Sécurité sociale (TASS) de Valence, dans la Drôme, vient de débouter les onze médecins concernés. Ces praticiens avaient testé les cotations CS avant de porter plainte contre la caisse locale qui refusait tout remboursement des actes en CS (même partiel), ce qui aboutissait à un déconventionnement de fait.
Pour MG-France, qui a encouragé les médecins à entamer des procédures, le coup est rude. Même si l'espoir était mince, confient plusieurs cadres, le syndicat de généralistes misait sur une jurisprudence favorable pour ouvrir la brèche tarifaire à l'heure où plus de 20 000 spécialistes de médecine générale sont déjà qualifiés comme tels. Ce n'est pas encore pour cette fois. MG-France a aussitôt fait appel de cette décision (devant la cour de Grenoble) afin que les spécialistes de médecine générale puissentutiliser «comme tous les autres spécialistes» l'intégralité de la nomenclaturespécialiséeet que les patients soient remboursés sur cette base.Vice-président du syndicat, le Dr Vincent Rebeillé-Borgella voit dans ce jugement de première instance une «péripétie dommageable mais qui n'entame en rien notre détermination». Carole Younes, avocat pour MG-France dans ce dossier et spécialiste du droit des médecins, enfonce le clou. «La décision du TASS de Valence ne repose sur aucun raisonnement construit.»
Consignes de fermeté.
Dans son jugement exécutoire, le TASS de Valence reconnaît la création de la spécialité de médecine générale (difficile de faire autrement), mais il souligne que la tarification est régie dans le cadre conventionnel. Or la nomenclature «n'a pas été modifiée et persiste dans sa distinction» des cotations C et CS. En substance, l'analyse est que le législateur comme l'assurance-maladie assimilent toujours la médecine générale à une catégorie « particulière » de spécialité, discipline identifiée par des mécanismes conventionnels et dispositions tarifaires propres. D'où les consignes de fermeté de la direction de la CNAM à son réseau de caisses pour rejeter les cotations en CS.
Le Dr Geneviève Royannez, déléguée régionale (Rhône-Alpes) du syndicat de généralistes, estime avoir perdu une bataille mais pas la guerre. «Nous sommes convaincus que ce combat pour l'égalité de traitement et l'équité tarifaire est juste. Nous allons analyser la situation à tête reposée mais on ne s'arrêtera pas.àtitre personnel, je suspends mon activité d'enseignement clinique ambulatoire à la faculté de Lyon en guise de protestation.»
Décalage.
Comme beaucoup de ses confrères, cette responsable dénonce le décalage croissant entre les discours officiels de promotion de la médecine générale (aux états généraux, par exemple) et les «signaux négatifs» adressés à la profession, et notamment à la nouvelle génération qui ne se bouscule pas pour visser sa plaque en médecine générale. Des signaux envoyés, qui plus est, dans un contexte de fléchissement d'activité des médecins généralistes en 2008 (- 2,7 % fin avril), ce qui ne va pas non plus dans le sens d'un rééquilibrage des revenus avec les autres spécialités.
Autre syndicat engagé dans les contentieux sur le CS (une dizaine de cadres sont concernés), Espace Généraliste (EG) n'entend pas abdiquer pour arracher dans les tribunaux l'équité tarifaire. «Le jugement du TASS de Valence n'est pas une surprise, lâche le Dr Jacques Marlein, secrétaire général adjoint d'EG. On sait qu'il faudra aller en appel et probablement en cassation. On nous dénie un droit, pas question de rentrer dans le rang!» D'autant que, avance-t-il, les contrats RCP, sauf exceptions, comportent une clause « assistance juridique » qui fonctionne dans le cadre des conflits avec les caisses...
Le Dr Michel Combier, chef de file des généralistes de la CSMF, tient un tout autre discours. «Que les généralistes ne perdent pas leur temps dans ces procédures. Ce combat est évidemment légitime, bien sûr que les généralistes méritent le CS, mais le problème n'est pas juridique, il est politique et économique.» Une façon de replacer la conquête tarifaire sur le terrain conventionnel. Un terrain en jachère depuis bientôt six mois.
La CNS demande aux pouvoirs publics d'être plus fermes
La Conférence nationale de santé (CNS) a demandé aux pouvoirs publics d' «agir plus fermement» pour limiter les dépassements d'honoraires. Dans un « voeu », la Conférence «observe que nombre de nos concitoyens ne peuvent plus accéder aux soins sans être astreints à ces dépassements». Pour elle, «l'information obligatoire sur les coûts et la remise d'un devis au-delà d'un certain seuil de dépassement, de même que l'élargissement des procédures de saisine des instances de régulation disciplinaire ou tarifaires, s'ils sont nécessaires, (sont) néanmoins insuffisants».
La CNS va loin en estimant que «l'élargissement des procédures de saisine doit aller jusqu'à garantir la présence de droit des représentants des usagers du système de santé dans les commissions paritaires de la convention médicale» ; elle rappelle aussi avoir recommandé en mars 2007 qu'une proportion de tarifs remboursables soit garantie dans toutes les régions du pays.
La Conférence nationale de santé est composée de 113 membres représentant tous les acteurs et institutions du secteur. Elle joue un rôle consultatif auprès du ministère de la Santé et doit notamment formuler des propositions en vue d'améliorer le système de santé publique.
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