PLUSIEURS MILLIERS D'INTERNES, chefs et étudiants – entre 7 500 et 10 000 – ont défilé jeudi dans les rues de la capitale. Ils s'étaient mobilisés à l'appel des syndicats d'internes et de chefs (ISNIH, ISNAR-IMG, ISNCCA), de jeunes généralistes (SNJMG) et d'étudiants en médecine (ANEMF) pour demander la suppression des articles 32 et 33 du PLFSS 2008 qui prévoient de «revoir les conditions auxquelles est soumis le conventionnement en fonction de la densité de la zone d'exercice» (« le Quotidien » du 11 octobre).
Quelques représentants des syndicats de médecins libéraux avaient fait le déplacement. Plusieurs centaines de kinésithérapeutes et d'ortophonistes se sont également joints au cortège, inquiets que ces dispositions de régulation puissent également s'appliquer à leur profession.
«Mobiliser autant de monde en si peu de temps, c'est un signe qui ne trompe pas, analyse Raphaël Gaillard, vice-président de l'ISNIH. Tout le monde se sent concerné, l'enjeu est trop important» (voir ci-dessous).
Une lettre de la ministre.
Le mouvement a pris une ampleur considérable. La ministre de la Santé a adressé une lettre aux internes pour leur assurer qu'aucune mesure coercitive ne serait prise pour les «diriger dans les zones de faible densité médicale» ou pour les maintenir dans la région où ils ont effectué leurs études. Elle a reçu une à une les organisations étudiantes sans parvenir à les rassurer (« le Quotidien » du 8 octobre). La semaine dernière, à l'issue de la manifestation nationale, les présidents des associations ont été reçus par deux conseillers de la ministre de la Santé. La rencontre n'a permis aucune avancée notable. Roselyne Bachelot a fait savoir qu'elle souhaitait la tenue d'états généraux de la démographie médicale, préparés par le Pr Yvon Berland, auteur de plusieurs rapports sur la démographie médicale, restés lettre morte. Roselyne Bachelot a assuré que la rencontre organisée aujourd'hui avec l'ensemble des organisations étudiantes servirait de «prélude» à ces états généraux annoncés par la ministre pour le début 2008, qui définiront eux-mêmes «le cadre de négociations conventionnelles qui leur feront suite». «Je n'ai pas fixé de date butoir pour cette négociation afin de lui donner toutes les chances d'aboutir», a indiqué Roselyne Bachelot. Le débat pourrait donc être reporté après les élections municipales des 9 et 16 mars.
Proposition de loi d'un député UMP.
Etudiants et internes auront-ils la patience du ministère de la Santé ?
Les jeunes médecins ont posé en préalable aux discussions des états généraux de la démographie la suppression des articles 32 et 33 du PLFSS 2008. «Le maintien de ces articles rendrait de facto ces états généraux sans objet», écrivent-ils dans un communiqué commun. La tension est encore montée d'un cran.
D'autant que certains parlementaires sont partisans de la manière forte. Le député UMP des Côtes-d'Armor, Marc Le Fur, a déposé une proposition de loi qui vise à interdire l'installation de nouveaux cabinets dans les zones excédentaires (sauf remplacement d'un confrère), à l'instar du dispositif prévu pour les infirmières. Cette piste est «susceptible» de déboucher sur un amendement au PLFSS, indiquait-on en fin de semaine dans l'entourage du député.
Quelle est aujourd'hui la marge de manoeuvre de la ministre de la Santé ?
«Bachelot ne tient pas les cartes, assure un syndicaliste, disant tout haut ce que beaucoup pensent tout bas. Tout se joue à l'Elysée. Il nous reste peu de temps avant le discours de Nicolas Sarkozy sur la politique de santé.» Le président de la République a allumé la mèche en déclarant qu'il souhaitait que les médecins empruntent le même chemin que les infirmières libérales qui «ont accepté de ne pas s'installer dans les zones où elles sont trop nombreuses». Peut-il aujourd'hui faire machine arrière au risque de mécontenter les élus à la recherche de praticiens ? «Il a voulu satisfaire les maires avant les municipales. Tout ce qu'il a obtenu, ça a été de mettre le feu à l'hôpital», lâche un syndicaliste.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature