L'ENQUÊTE IPSOS sur le coût de la santé et l'accès aux soins des Français (1) réalisée pour le Collectif interassociatif sur la santé (CISS, usagers) tombe doublement à point nommé : à la veille du débat parlementaire sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2008, mais aussi après que Nicolas Sarkozy a annoncé un «grand débat sur le financement de la santé», qui définira l'an prochain ce qui relève de la solidarité nationale et de la responsabilité individuelle.
Les cabinets de groupe ont le vent en poupe.
Premier enseignement : l'attachement massif des Français au système actuel de solidarité entre les assurés (avec cotisation obligatoire et recours éventuel aux complémentaires). Ainsi 84 % d'entre eux estiment que ce système solidaire est le plus à même de garantir l'accès aux soins des générations futures ; seulement 15 % jugent qu'un système où chacun paye pour sa propre assurance santé (avec niveau de remboursement variable selon la cotisation) serait plus efficace pour assurer l'accès à la santé.
Interrogés sur les nouvelles recettes pour la Sécu, débat qui monte en puissance avec la taxation des stock-options, les Français résistent à toute idée de contribution supplémentaire à leur charge : une très nette majorité d'entre eux (70 %) sont opposés aux franchises médicales, dont l'entrée en vigueur est prévue à partir de 2008 ; 70 % refusent la baisse du niveau de remboursement des frais de santé par la Sécu ; et 60 % rejettent l'augmentation du taux de la CSG. Quant à la création de taxes sur la consommation dont le produit serait affecté à l'assurance-maladie, elles sont encore moins populaires, puisque 75 % des Français ne sont pas d'accord avec cette option.
L'enquête IPSOS passe au crible l'organisation de l'offre de soins et les réformes possibles pour mieux réguler les dépenses de santé. Les Français, à l'évidence, sont ouverts au changement dès lors qu'il consolide, à leurs yeux, le principe de solidarité : 84 % plaident pour la constitution de cabinets de groupe et 82 % souhaitent le développement d'actes de médecine ambulatoire pris en charge en ville ou à domicile (sans hospitalisation).
En revanche, s'il s'agit de fermer certains services hospitaliers à faible activité, la réponse est sans appel : 73 % rejettent cette hypothèse. Côté rémunération des médecins, le paiement à l'acte est loin d'être tabou. Une légère majorité de Français (53 %) sont déjà ralliés au principe d'un paiement au forfait ou à la capitation (par patient).
L'accès aux professionnels est-il aujourd'hui entravé? 14 % des personnes interrogées déclarent en tout cas avoir déjà eu recours aux urgences en raison du coût trop élevé ou de délais de rendez-vous trop longs.
Quelles que soient les raisons invoquées, le renoncement aux soins est moins fréquent en médecine générale que chez les spécialistes. Seulement 5 % des Français se sont déjà passés de soins chez un généraliste à cause du «coût de la consultation», contre 13 % chez un spécialiste pour cette même raison ;6 % ont abandonné des soins de médecine générale à cause de l' «éloignement géographique du praticien», contre 9 % pour ce motif chez un spécialiste ; quant aux délais de rendez-vous pas assez rapides, ils restent la première cause de renoncement aux soins (23 % en médecine générale et 32 % chez le spécialiste !).
« Dessous-de-table » : 3 % seulement des Français concernés.
L'enquête confirme que les dysfonctionnements liés aux pratiques tarifaires sont d'ampleur inégale.
Au cours des trois dernières années, un Français sur trois (35 %) a dû verser un dépassement d'honoraires non remboursé par la Sécu (mais facturé et prévu par les textes en vigueur), taux qui chute à 25 % pour les bénéficiaires de la CMU. Les cadres et professions intellectuelles sont plus concernés par ces suppléments tarifaires (46 %), ce qui accrédite l'idée de pratiques variables selon la catégorie de patients. En revanche, ce sondage tord le cou à l'idée de « dessous-de-table » généralisés (en espèces, sans facturation), puisque seulement 3 % des personnes interrogées disent y avoir été confrontées. A noter que les cas de dessous-de--table ont été les plus fréquents dans une clinique (60 %), puis dans les cabinets (37 %) et, enfin, à l'hôpital (12 %), ce qui ne caractérise pas ici l'ampleur de la somme réclamée. Enfin, selon les Français, la transparence tarifaire laisse à désirer : 32 % jugent que l'affichage (obligatoire) des tarifs par les professionnels n'est pas respecté. Un article du PLFSS 2008 propose de mettre en place un système de devis systématiques (tarifs et dépassements) pour les actes lourds (chirurgie, radiologie, odontologie).
(1) Sondage réalisé par téléphone (méthode des quotas) du 15 au 24 septembre 2007 auprès de deux échantillons nationaux représentatifs de la population française âgée de 15 ans et plus et de la population des personnes prises en charge au titre d'une ALD.
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