Lors du congrès de la Société Française de rhumatologie qui s’est tenu en décembre dernier, le GRIO (Groupe de recherche et d’information sur les ostéoporoses), la SFR et diverses sociétés savantes ont proposé une mise à jour des recommandations sur la prise en charge de l’ostéoporose dont la précédente version (éditée par l’Afssaps) datait de 2006. Une des principales originalités de ces nouvelles guidelines : un arbre décionnel unique (Voir le schéma).
Présence de fractures sévères
Tout d’abord, ces recommandations 2012 mettent en avant la notion de fractures sévères, qui, lorsqu’elles sont présentes, doivent amener à la prescription d’un traitement anti-ostéoporotique, quels que soient l’âge et la valeur de la DMO. Les experts ont identifié sept types de factures sévères : extrémité supérieure du fémur, extrémité supérieure de l’humérus, vertèbres, pelvis, fémur distal, trois côtes simultanées et tibia proximal. Leurs conséquences en termes de morbimortalité sont des plus importantes : dans diverses études, elles sont associées chez les femmes à une surmortalité dans les 15 ans qui suivent la survenue de la fracture.
Cette notion de fracture sévère imposant le traitement n’était pas présente dans les recommandations de 2006. Ces dernières stipulaient que, en cas de fracture, le traitement était systématique pour un Tscore inf ou = à 2,5 (ostéoporose). Dans le cas d’un T-score entre -2,5 et -1 (ostéopénie), le traitement n’était pas systématique sauf en cas de fracture vertébrale ou de l’extrémité supérieure du fémur. En revanche, dans les nouvelles guidelines, on ne fait plus mention du concept d’ostéopénie.
La notion de chute
En l’absence de fracture, toujours dans les recommandations 2012, la décision de traiter dépend des facteurs de risques cliniques de fracture et du résultat de l’ostéodensitométrie (DMO). En cas de DMO très basse (inf ou = à -3), le traitement est recommandé. Il en sera de même en cas de risque de chute élevé.
Ainsi, un point essentiel des nouvelles recommandations est de repérer les femmes à risque de chute, ce qui n’était pas clairement mis en exergue dans les précédentes guidelines. Le facteur de risque le plus lourd est un antécédent de chute l’année précédente. Viennent ensuite les facteurs de risque extrinsèques (aménagement du domicile) et intrinsèques (pathologies chroniques, usage d’antihypertenseurs etc.), repérables à l’aide de tests simples en consultation du type « Get up and go » test, le test de l’appui unipodal, le test de la poussée sternale (2).
Risque de fracture : les outils d’évaluation
Enfin, en cas de fractures non sévères ou de DMO supérieure à -3 DS, la prise de décision pour traiter est plus complexe. On évaluera le risque de fracture afin de déterminer l’intérêt de traiter. Cette évaluation a été simplifiée. Jusqu’ici, elle était fondée sur la combinaison du résultat de la DMO avec des facteurs de risque de fracture indépendants (âge, antécédents personnels de fracture, corticothérapie au long cours...). Sans revenir sur cette liste qui a fait ses preuves dans l’évaluation du risque de fracture, le GRIO et la SFR attirent désormais l’attention sur trois facteurs principaux pour évaluer le risque fracturaire afin de prendre une décision thérapeutique : l’âge, la DMO et les antécédents personnels de fracture. Concernant ce dernier point, tout type de fracture de localisation évocatrice d’une ostéopathie fragilisante est concerné.
FRAX®, le nouvel élément décisif dans la décision de traiter
Par ailleurs, absent des précédentes recommandations, le FRAX ®, score de l’OMS, est désormais inclus dans les guidelines 2012. On y aura recours en cas de fracture non sévère et/ou de T Score ›-3. En revanche, il est inutile lorsque l’indication de traiter est évidente : antécédents de fracture sévères et T score <-3 sur le site lombaire ou de la hanche. Ce score quantifie à l’échelon individuel le risque absolu de fracture majeure (hanche, vertèbres, humérus) à 10 ans, en pourcentage (disponible sur le site shef.ac.uk/FRAX/). Les experts français ont choisi de ne pas fixer de valeur seuil arbitraire au-delà duquel on décidera de traiter, car le FRAX® est très influencé par l’âge. Dans l’Hexagone, le soignant doit ainsi repérer la valeur du FRAX® qui correspond à une femme du même âge déjà fracturée, au moyen d’une courbe de seuils cliniques en fonction de l’âge (bientôt disponible sur le site du GRIO). Par exemple, à 70 ans, le FRAX® des femmes ayant fait une fracture avoisine 10 %. Au-delà de 10 % le traitement devient donc légitime.
Traquer les fractures vertébrales
Un autre outil, le VFA, s’avère intéressant pour identifier les fractures vertébrales. Fréquentes, celles-ci sont considérées comme des fractures sévères et sont fortement associées aux autres fractures. Or, dans les trois quarts des cas elles passent inaperçues : elles sont peu symptomatiques ou non repérées à la radiographie. « D’où l’importance de les traquer », souligne Karine Briot (hôpital Cochin, Paris). Bien entendu il n’est pas recommandé de réaliser de radiographies du rachis à tout patient dans ce dessein mais une évaluation morphologique du rachis est fortement conseillée chez les femmes qui souffrent de rachialgies ou répondent à l’un des critères suivants : âge ≥70 ans, perte historique de taille de 4 cm ou plus, perte de taille prospective de 2 cm ou plus, antécédents de fractures vertébrales, pathologies chroniques avec risque de fracture vertébrale. Ceci peut être réalisé soit par radiographie standard (dorsal face/ profil, lombaire face/profil) soit par VFA (morphométrie vertébrale), un logiciel disponible sur les appareils de densitométrie. Vu la faible irradiation de la VFA comparée à la radiographie, les experts ont émis des indications élargies de la VFA pour rechercher des fractures de vertèbres chez les femmes ménopausées dont la DMO est basse et avec au moins deux des critères suivants : âge compris entre 60-69 ans, fracture non vertébrale, perte de taille historique entre 2 et 4 cm, maladie chronique avec risque de fracture vertébrale. Les recommandations internationales, suivies par les experts français, vont même plus loin en conseillant la VFA chez les femmes ostéoporotiques si le fait de documenter la présence d’une ou plusieurs fractures vertébrales modifie la prise en charge. Un bémol : cet outil ne figure pas à ce jour dans la nomenclature.
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