LE SOLO est un art difficile. Même au piano. Surdoué de la génération 1990, Brad Mehldau s'est lancé dans cette aventure après tant d'autres virtuoses des claviers, avec « Live in Tokyo » (Nonesuch/Warner Music), son dernier opus enregistré en direct le 15 février 2003 dans la capitale japonaise. Au programme, des standards de Cole Porter, Thelonious Monk, les frères Gershwin, voire Radiohead, et des compositions personnelles. Au final, une pure merveille, un bijou extatique, un délice pianistique. Héritier de glorieux aînés, le jeune homme - dont le jeu s'affine, se développe, s'embellit avec le temps - apporte la preuve que la race des magiciens des touches compte un nouveau membre actif, inventif et hyperémotif. Un grand moment du et pour le jazz.
Inspirateur de toute une génération de pianistes (dont Brad Mehldau !), Keith Jarrett - qui, en son jeune temps, savait également prendre des risques pour affirmer ses multiples talents - préfère aujourd'hui exploiter dans ses moindres recoins la formule de son trio - avec des camarades de plus de vingt ans, Gary Peacock (basse) et Jack DeJohnette (batterie) - pour en tirer une forme de quintessence. « The Out-of-Towner » (ECM/Universal), son dernier disque, enregistré aussi en direct à Munich en 2001, mêle standards de Cole Porter ou Gerry Mulligan et compositions personnelles qui permettent au soliste et à ses compères de développer une musique très concentrée, énergique, remplie de classe et cependant d'une grande légèreté. Le trio au sommet de son art.
A bientôt 80 ans - il est né au Canada en 1925 -, le pianiste Oscar Peterson est une authentique légende du jazz. Révélé au grand public en 1948 grâce au producteur Norman Granz, il a cotôyé tout le gratin du jazz moderne au cours de sa très longue carrière et avec ses divers trios et quartettes - où figuraient notamment l'incomparable Niels-Henning Orsted Pedersen (basse) et Joe Pass (guitare) - il a toujours revendiqué comme influences des musiciens comme Fats Waller, Earl Hines ou Art Tatum avant de devenir à son tour, une source d'inspiration. « A Night in Vienna » (Verve/Universal), son dernier album et le premier depuis 1964 pour le label, enregistré en direct à Vienne en 2003, confirme le statut mythique du pianiste - même diminué par des ennuis de santé depuis un peu plus de dix ans - et sa place au Panthéon des plus grands jazzmen contemporains.
L'histoire avec un grand H passionne le pianiste Bill Carrothers (1). Après avoir publié voici une dizaine d'années un disque en solo, « Civil War Diaries », dans lequel il revisitait des chants populaires de la guerre de Sécession aux Etats-Unis, le voici parti explorer certains thèmes propres à la Première Guerre mondiale, dans « Armistice 1918 » (Sketch/Harmonia Mundi), un très beau double album, comprenant un excellent livret avec paroles des chansons et images d'archives, qui narre une histoire d'amour entre un homme et une femme, sur fond de terrible guerre. Une démarche intéressante, unique, qui ravive les mémoires défaillantes en ces temps d'inculture. Et le jazz dans ce contexte ? Il est omniprésent grâce au travail sobre et magnifiquement arrangé du leader et de ses acolytes (augmenté d'un chœur), et en même temps, il retrouve sa place dans l'histoire puisque les premiers jazzmen à s'être produits en Europe sont arrivés en 1917 dans les bagages des troupes américaines, au sein du big band du bien nommé Jimmy Europe.
(1) JVC Jazz Festival Paris - New Morning (01.45.23.51.41) - 17 octobre - 21 h.
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