Tremblement d'action et d'intention
Il est de nature cérébelleuse par atteinte du cervelet ou des pédoncules cérébelleux supérieurs. Le tremblement s'accentue avec la vitesse du mouvement et à l'approche de la cible (tremblement intentionnel). Il n'apparaît pas au repos et au début du geste volontaire, mais lorsque le geste se développe, que des ajustements positionnels fins sont requis (lorsque le verre d'eau atteint les lèvres, lorsque le doigt atteint le nez…). Il se révèle sous la forme d'une oscillation irrégulière d'amplitude croissante, perpendiculaire à la direction principale du mouvement qu'il vient interrompre. Il est parfois très ample, qualifié alors de «dyskinésie volitionnelle d'attitude». Les gestes élaborés peuvent être extrêmement perturbés, entraînant une incapacité majeure dans la vie quotidienne.
Il touche particulièrement la racine des membres supérieurs et le tronc : chez certains patients, il s'exprime par une oscillation rythmique de la tête sur le tronc, voire du tronc lui-même. Il est irrégulier et lent (de 1 à 4 Hz). Il s'accompagne de signes caractéristiques d'un syndrome cérébelleux cinétique : hypermétrie (difficulté pour régler l'intensité et l'amplitude du mouvement), dyschronométrie (retard à l'exécution d'un geste), adiadococinésie (difficultés dans l'exécution de gestes alternatifs rapides), hypotonie.
Le contexte étiologique est souvent évident. Les causes les plus fréquentes sont la sclérose en plaques à un stade évolué, les séquelles de traumatisme crânien sévère avec lésions du tronc cérébral, les atrophies cérébelleuses acquises ou héréditaires, les lésions vasculaires ou toute autre lésion du cervelet et de ses voies de sortie.
Son traitement médical est limité, la toxine botulique est parfois indiquée. Dans la sclérose en plaques, la stimulation thalamique peut constituer une solution, mais elle est moins efficace que dans le tremblement essentiel ou parkinsonien.
Tremblement cortical
Son expression clinique est assez proche du tremblement essentiel sous la forme d'oscillations distales des membres supérieurs mais qui prennent un caractère irrégulier et augmentent à l'action. Sa fréquence est certainement sous-estimée. Ce type de tremblement appartient en fait au groupe des myoclonies corticales et peut être identifié après exploration EMG couplée à un électroencéphalogramme qui révélera une pointe EEG précédant la myoclonie. Il s'associe dans un cas sur deux à une épilepsie généralisée ou partielle. Il existe parfois un contexte familial (transmission autosomique dominante). Ce tremblement peut être idiopathique ou secondaire à une lésion corticale. Son traitement repose sur la prescription des antiépileptiques (clonazépam ou valproate de sodium).
Tremblement spécifique de l'écriture
C'est un tremblement spécifique de tâche. Il débute vers 50 ans, parfois plus tôt, souvent dans un contexte d'histoire familiale (transmission autosomique dominante). Il reste isolé et une sensibilité à l'alcool est parfois observée. Sa fréquence est de 4 à 7 Hz. L'exploration EMG permet de le différencier d'une dystonie avec tremblement.
Le traitement le plus souvent proposé est le même que celui du tremblement essentiel.
Tremblement orthostatique
Il apparaît spécifiquement en position debout. Le piège est lié au fait que la plainte fonctionnelle en lien avec ce symptôme est exceptionnellement une sensation de tremblement. Les patients se plaignent plutôt d'une impression d'instabilité quand ils sont debout, en précisant qu'ils ont peur de rencontrer quelqu'un dans la rue sous peine de devoir rester debout pour bavarder et ne se déplacent plus sans leur conjoint. Ils vivent dans la crainte permanente de chuter, mais néanmoins tombent très rarement. La marche est normale et fait disparaître immédiatement la symptomatologie. Le retentissement sur la vie courante est parfois tel que les diagnostics d'agoraphobie ou d'astaso-abasophobie névrotique sont parfois retenus. L'examen clinique ne permet pas facilement d'établir ce diagnostic car le tremblement se voit rarement en raison de sa fréquence élevée. On peut parfois le palper sous la forme d'un frémissement des cuisses ou l'entendre en auscultant les muscles. Le tremblement concerne essentiellement les membres inférieurs et parfois les membres supérieurs sous la forme d'un tremblement postural à 6-8 Hz, en tout point similaire à un tremblement essentiel, ou sous la forme de bouffées rythmiques plus rapides si ces derniers jouent un rôle dans le maintien postural (appui sur une table, par exemple). C'est l'exploration EMG des membres inférieurs qui établit le diagnostic de certitude en objectivant un tremblement de fréquence élevée (entre 14 et 18 Hz), cette fréquence, fixe pour un même patient, étant pathognomonique (avec le haut-parleur, on entend un bruit caractéristique d'hélicoptère).
Le tremblement orthostatique est électivement sensible au clonazépam.
Si ce tremblement est le plus souvent primaire, dans 25 % des cas il serait secondaire, notamment à un syndrome parkinsonien sous forme d'une maladie de Parkinson typique qui apparaîtrait après un délai de plusieurs mois à plusieurs années. L'effet positif de la L-dopa chez des patients handicapés par un tremblement orthostatique authentique sans syndrome parkinsonien associé, de même que l'atteinte des voies dopaminergiques objectivée par une diminution de fixation du [123I]-FP-CIT au sein du striatum en tomographie d'émission monophotonique, constituent autant d'arguments supplémentaires en faveur du caractère symptomatique de ce type de tremblement.
Tremblement psychogène
Il peut mimer tous les tremblements organiques. Dans tous les cas, il faut être prudent, il s'agit d'un diagnostic d'élimination. Certains critères sont cependant très évocateurs : un début brutal après un événement déclenchant, sa localisation à un seul membre, l'absence de rythmicité et son caractère très spectaculaire. Son atténuation à la distraction (brève suspension à l'épreuve du calcul mental ou au cours de la réalisation d'épreuves motrices complexes controlatérales : écriture dans l'espace, battement sur table en fréquence libre ou imposée par un métronome) et à la fatigue constitue de bons éléments séméiologiques d'orientation (voir illustration).
Lorsque le membre atteint est maintenu par l'examinateur, le tremblement peut migrer vers une autre partie du corps. Il est souvent présent d'emblée au repos, à la posture et à l'action ; il est moins sensible que les tremblements organiques aux changements de posture. La symptomatologie est changeante avec des périodes spontanées de rémission (plusieurs jours à semaines). La fréquence est parfois régulière, entre 4 et 10 Hz (jamais < 3 Hz ou > 15 Hz).
Il s'associe volontiers à d'autres plaintes fonctionnelles. Le contexte de névrose, de dépression connue ou de recherche d'un bénéfice secondaire est inconstant. La prudence s'impose car une pathologie organique neurologique serait associée dans 25 % des cas. Le pronostic dépend de la précocité de la prise en charge, ce tremblement étant volontiers sensible au placebo et à la psychothérapie.
Service de neurologie et pathologie du mouvement, CHRU, faculté de médecine Henri-Warembourg, Lille.
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