Le constat est sans appel. Alors qu’en France, le risque de décès par cancer bronchique diminue régulièrement chez l’homme depuis une vingtaine d’années, le poids de la mortalité liée à ces maladies ne cesse d’augmenter chez la femme. Ainsi, selon, une étude parue mardi dernier dans le Bulletin épidémiologique hebdomadaire*, en 15 ans, la mortalité par cancer du poumon a été multipliée par 4 chez les femmes de 40 ans alors qu’en 10 ans, elle a diminué de moitié chez l’homme du même âge. En cause?: l’augmentation explosive de la consommation de tabac observée chez les femmes jusque dans les années 90. « La mortalité entre 35 et 44 ans observée aujourd’hui est en effet le résultat des expositions de ces
20 à 25 dernières années dans la mesure où l’entrée dans le tabagisme se fait massivement entre 15 et 20 ans », soulignent les auteurs de l’étude. Or si la consommation de cigarettes a atteint son maximum en 1980 chez l’homme, elle ne tend à diminuer que depuis 1993 chez la femme, et ce de façon plutôt modérée. « Les actions politiques des dernières décennies ont donc eu un effet bénéfique incontestable mais on peut prévoir que l’épidémie va continuer chez les femmes au fur et mesure que vieilliront les générations qui comptent une proportion important de fumeuse régulière », prédit Catherine Hill (institut Gustave-Roussy, Villejuif), premier auteur de cette étude. En d’autres termes, les femmes n’ont pas fini de payer l’addition de leur «?émancipation?» tabagique…
BPCO, les femmes plus vulnérables
Moins médiatique que le cancer bronchopulmonaire, la BPCO n’épargne pas non plus les femmes comme l’a souligné le Dr Anne Prud'homme (Centre hospitalier de Tarbes) à l'occasion du colloque «?Femmes et tabac?» organisé mardi par le ministère de la Santé. Par rapport au cancer du poumon, la bronchite chronique obstructive (BPCO) fait figure «?d'inconnue meurtrière?», a indiqué cette pneumologue. «?C'est la maladie sournoise par excellence?», a-t-elle ajouté. Pourtant, d'après des estimations de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), la BPCO pourrait passer de la sixième cause de mortalité dans le monde en 1990 à la troisième cause en 2020. «?Il faut lutter contre le poids du stéréotype?» qui en fait une maladie masculine, alors qu'elle touche de plus en plus de femmes, a souligné le Dr Prud'homme, déplorant «?un sous-diagnostic évident chez la femme?». Au Canada, les femmes sont davantage touchées par la BPCO que leurs homologues masculins. Pourtant, une étude a montré que les trois-quarts des médecins généralistes de ce pays considèrent les femmes comme minoritaires parmi leurs patients BPCO.
La BPCO présente un tableau clinique un peu différent selon le sexe : les femmes toussent plus mais crachent moins. Elles ont aussi une moins bonne performance à l'effort et une qualité de vie plus altérée que les hommes. Surtout, «?à tabagisme égal, l’impact de la BPCO sur la fonction respiratoire est plus important pour le sexe faible, avec une diminution de la fonction respiratoire de l'ordre de 30 ml par an, contre 9 ml chez l'homme?», a indiqué la pneumologue. Ce déclin plus important de la fonction respiratoire chez la femme est surtout observé autour de la ménopause. Il traduit «?une sensibilité probablement accrue au tabac?», dont on connaît encore mal les causes, même si l'hypothèse du rôle des hormones est évoquée.
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