LUTTER contre la radiophobie ambiante. C'est l'objectif que s'est fixé le groupe de recherche en radiotoxicologie (GRRT) en organisant chaque année un colloque sur la radioactivité. «Pourquoi sommes-nous effrayés par la radioactivité ? »: le thème débattu ce vendredi au centre universitaire des Saint-Pères (Paris) sera l'occasion de revenir sur l'histoire de la radioprotection, mais également de présenter de nouvelles avancées scientifiques.
Pour le Dr Nicole Colas-Linhart, du laboratoire de biophysique Bichat - Paris-VII, la mise en garde énoncée par le conseiller d'État Constant Burg, en 1994, dans un rapport sur la radioprotection destiné au Premier ministre de l'époque, Édouard Balladur, s'est révélée juste. «Des normes de base ont été définies qui se sont révélées efficaces. De nouvelles normes beaucoup plus sévères sont en cours de préparation. Elles reposent sur des bases scientifiques totalement incertaines. Leur introduction éventuelle aura en France des conséquences graves», écrivait-il alors. Le Dr Colas-Linhart explique cette situation par trois causes. Tout d'abord, l'adoption, par la Commission internationale de protection radiologique (CIPR), de la relation linéaire sans seuil qui pose le principe qu'il n'existe pas de dose sans danger.
En 1999, l'académie de médecine réagissait en notant qu' «il n'existe aucun argument biologique, épidémiologique justifiant l'abaissement de la dose maximale d'irradiation du public de 5mSv à 1mSv. Cette dose est en effet très inférieure à celle due aux rayonnements naturels auxquels sont exposés depuis toujours et sans conséquence fâcheuse décelable des millions d'êtres humains».
Trop de centres de décision.
La deuxième cause, selon le Dr Colas-Linhart, c'est l'insuffisance, en France, de la recherche sur l'action biologique des faibles doses de radiation. «Seuls des faits scientifiques solides et irréfutables peuvent permettre d'établir des normes de base de radioprotection crédibles et efficaces. Cela est possible aujourd'hui grâce aux progrès considérables réalisés dans les domaines de la biologie moléculaire, de la génétique et de la biologie cellulaire», souligne-t-elle. Enfin, la chercheuse dénonce la multiplicité des centres de décision au niveau international comme à celui de l'Union européenne et s'interroge, au nom du GRRT, sur l'opportunité de la restructuration de la radioprotection au niveau national. «Nous regrettons que les médecins et les biologistes spécialisés en médecine nucléaire et en radiotoxicologie ne soient pas mieux associés ou représentés au sein des organismes chargés de la radioprotection.
« En Suède, par exemple, on a pris conscience du rôle essentiel de la communauté médicale pour le transfert de l'information. Il existe une structure composée de professionnels de santé, étroitement liés à leur Institut national de radioprotection», indique Nicole Colas-Linhart.
Colloque
Le colloque a lieu ce vendredi à l'amphithéâtre Claude-Bernard du centre universitaire des Saints-Pères (Paris 5e) :
à 9 heures : « Récentes données factuelles ». Avec le Pr Maurice Tubiana (sur le rapport « Les causes du cancer »), le Pr Dietrich Averbeck (effets non ciblés et retardés après exposition aux rayonnements ionisants), le Pr Roland Masse (« Relations dose-effet non monotones ») et le Pr André Aurengo (« L'épidémiologie : difficultés méthodologiques ») ;
à 11 h 30 : « Sciences et méfiance ». Avec le Pr Yvon Grall (« Rapports média-public-milieu scientifique ») ;
à 13 h 30 : « Avancées scientifiques ». Avec le Dr Nicolas Foray (effets de voisinage et réparation de l'ADN), le Dr Françoise Vitaux (« Effet de l'âge et du statut iodé sur l'incorporation cinétique au niveau du follicule thyroïdien »), le Dr Gaëtan Gruel (« Mise en évidence biologique d'une exposition aux rayonnements ionisants »), le Pr Raymond Paulin (« Rôle autodécontaminant de l'environnement naturel »).
à 16 heures : « Les normes de la radioprotection en médecine diagnostique et thérapeutique en recherche ». Avec le Dr Nicole Colas-Linhart et le Pr Olivier Mundler.
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