LE TEMPS DE LA MEDECINE
L'interrogatoire est une étape essentielle pour la prise en charge d'un patient venu avec une plainte olfactive. Les quatre principales étiologies des troubles olfactifs sont constituées par les dysosmies postrhinitiques, post-traumatiques, d'origine rhino-sinusiennes et idiopathiques.
Les dysosmies idiopathiques regroupent les troubles olfactifs liés au vieillissement normal ou pathologique (on doit se poser la question de la maladie d'Alzheimer débutante). A côté de cela, les causes possibles sont très nombreuses. On peut citer : des maladies générales, l'exposition à certains produits chimiques, des traitements médicaux, des maladies psychiatriques, la chirurgie dentaire.
L'examen ORL s'impose devant tout trouble de l'odorat. L'exploration d'imagerie par scanner permet d'identifier les causes naso-sinusiennes de dysosmie (atteinte de l'ethmoïde, infections, tumeurs, etc.).
Une batterie de tests
A cela s'ajoute maintenant, dans certains centres spécialisés, une possibilité d'exploration raffinée de l'olfaction, qui fait appel à une batterie de tests.
On distingue :
- Des méthodes subjectives. On recherche le seuil de perception d'une substance odorante en la présentant dans des solutions de moins en moins diluées. Il existe aussi des appareils d'olfactométrie, fondés sur l'insufflation de gaz odorant (la plus petite valeur correspond au « seuil olfactif »). On peut tester chaque fosse nasale à l'aide d'une batterie odorante - thymol, eucalyptol, vanilline, anéthol (un aromatisant) - afin d'explorer le champ olfactif.
La discrimination olfactive consiste à faire reconnaître au patient les yeux fermés des substances connues. On interprète les résultats en fonction de l'âge du sujet et de la mémoire olfactive.
L'adaptation olfactive correspond à l'élévation du seuil de perception et de reconnaissance qui survient après une stimulation prolongée. On fait respirer une solution saturée d'anéthol, par exemple, puis on calcule le temps de récupération du seuil initial (il est normalement de 2 à 4 minutes).
- Des méthodes semi-objectives, qui explorent les réflexes liés à l'olfaction : réflexe olfactopupillaire (apparition d'un myosis une demi-seconde après stimulation olfactive), réflexe olfactorespiratoire (l'inhalation de pyridine, un extrait du goudron de houille, entraîne un blocage de la respiration, aboli chez l'anosmique).
- Les méthodes objectives sont représentées par la mesure des potentiels olfactifs. En réponse à la stimulation olfactive, on peut enregistrer au vertex un potentiel biphasique fait de deux ondes : l'onde 1 est de nature trigéminale et l'onde 2 est de nature olfactive.
Imagerie fonctionnelle olfactive
Sur le plan de la recherche, l'imagerie fonctionnelle olfactive est en développement. L'imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf) des aires corticales impliquées dans les perceptions olfactives (et gustatives) est utilisée pour localiser les sources d'activité corticale concernées par l'arrivée du signal sensoriel et pour observer le fonctionnement cérébral. Récemment, des chercheurs ont montré l'existence d'une dissociation entre les activités corticales induites par le flairage et l'acte de sentir : l'odorat active les gyrus orbito-frontaux latéraux, tandis que l'activité de flairage active le cortex pyriforme.
A lire : « les Troubles du goût et de l'odorat », de Pierre Bonfils et Patrice Tran Ba Huy, un ouvrage très documenté réalisé à l'initiative de la Société française d'oto-rhino-laryngologie et de chirurgie de la face et du cou. Pour se le procurer : Régimédia, 3, rue Maurice-Loewy, 75014 Paris, tél. 01.43.20.62.98.
Définir la dysosmie
Trouble quantitatif :
- hyposmie (diminution de l'odorat) ;
- anosmie (perte complète de l'odorat).
Trouble qualitatif :
- arosmie (impression olfactive erronée en présence d'un stimulus) ;
- phantosmie (hallucination olfactive) ;
- Cacosmie (perception d'une mauvaise odeur provenant du patient).
La double stimulation olfactive et gustative est à l'origine de la flaveur des aliments. L'altération de l'odorat s'accompagne donc presque toujours d'un trouble du goût, ou dysgueusie.
Odorat et tabac
Une personne qui fume a une probabilité double d'avoir des troubles olfactifs comparativement à un non-fumeur du même âge. C'est la conclusion de l'une des études les plus informatives sur les relations entre le tabagisme et la fonction olfactive. Elle a été réalisée par le centre du goût et de l'odorat de Pennsylvanie chez 553 hommes et 85 femmes volontaires, fumeurs occasionnels ou fréquents, repentis ou abstinents depuis toujours. Tous ont eu un test olfactif d'identification comprenant 40 odeurs.
L'étude confirme la diminution de la faculté olfactive, concernant l'ensemble des 40 odeurs testées. Et, surtout, ce qui est intéressant, elle montre une corrélation avec le nombre de paquets-années et non avec l'actualité du tabagisme. Le passé du fumeur est donc important. Chez un sujet qui a fumé deux paquets par jour, le temps qu'il mettra pour retrouver un odorat normal (équivalent à quelqu'un de son âge) est égal à celui qu'il a passé à fumer.
Les bases physiopathologiques exactes de l'effet nocif du tabac sur l'odorat restent à élucider.
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