Découverte d’une HTA

Les examens à prescrire en première intention

Publié le 09/02/2006
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XVIes Journées européennes de la Société française de cardiologie (SFC)
18-21 janvier 2006 - Paris

EST-IL NÉCESSAIRE de pratiquer un bilan devant la découverte d’une hypertension artérielle modérée et confirmée, soit par Mapa, soit par automesure (voir encadré) ? La question peut être posée en ces termes, selon le Pr Gilles Chatelier. En effet, compte tenu de la très grande fréquence de l’HTA, toute procédure, si elle est systématisée, va s’appliquer à des millions d’individus et aura un retentissement économique important. Dès lors, la pertinence de chaque geste ou de chaque examen doit être évaluée ; ainsi, on peut s’interroger sur la sensibilité et la spécificité de la recherche minutieuse d’un souffle abdominal ou sur la recherche de signes cliniques rarement identifiés d’un phéochromocytome ou de marqueurs d’un hyperaldostéronisme primaire, étiologies en outre exceptionnelles…

Il n’en reste pas moins, pour le Dr Jacques Blacher, que l’examen clinique garde toute sa place dans le bilan d’une HTA. Un examen complet et minutieux, qui doit être réalisé au moins une fois au moment du diagnostic, insiste t-il, après avoir rappelé les trois objectifs de ce bilan initial : le premier reste la recherche d’une étiologie, autrement dit, l’identification d’une HTA secondaire, le deuxième, l’évaluation du niveau de risque du patient, et le troisième, l’objectif ultime, la diminution du risque de survenue d’une complication de cette hypertension, un accident coronaire ou cérébrovasculaire au premier chef, mais aussi une insuffisance rénale, voire une complication exceptionnelle, mais gravissime, comme la cécité liée à une HTA maligne.

Bilan sanguin et ECG.

Outre l’examen clinique complet, un consensus pour réaliser le bilan « OMS » est, semble-t-il, établi. Ce bilan de base comprend le dosage de la kaliémie, de la créatinine, de la glycémie, du cholestérol total, du LDL cholestérol et des triglycérides, et une bandelette urinaire à la recherche d’une protéinurie ou d’une hématurie. Troisième volet de ce bilan : un ECG. Donc, a priori, l’échographie cardiaque n’est pas systématique. Elle est prescrite en cas de signe d’hypertrophie ventriculaire gauche à l’ECG ou d’autres anomalies électrocardiographiques, en présence d’une symptomatologie thoracique ou d’un souffle cardiaque. Si certains considèrent quand même aujourd’hui impensable de ne pas prescrire une échographie chez tout « nouvel » hypertendu, plusieurs arguments vont à l’encontre d’une systématisation, explique le Dr Jacques Blacher : d’abord le caractère opérateur-dépendant de cet examen et sa faible reproductibilité, ensuite la mauvaise fiabilité de la mesure de la masse du VG chez un nombre non négligeable de patients et la question des valeurs « normales » de cette mesure, enfin l’absence de conduite à tenir consensuelle en cas d’HVG. Malgré les résultats émanant de quelques études cliniques, même en cas d’HVG, le choix de la classe thérapeutique reste ouvert, le bénéfice du traitement pharmacologique dépend de la baisse des chiffres tensionnels, quelle que soit la classe antihypertensive, note le Dr Blacher.

L’échographie abdominale est sous-utilisée.

Autre examen débattu : l’échographie abdominale à la recherche d’un anévrisme. S’il n’est pas question de la rendre systématique, elle devrait être plus largement prescrite : en effet, la découverte d’un anévrisme de plus grand diamètre supérieur à 55 mm permet de proposer une intervention chirurgicale et d’éviter un accident susceptible de mettre en jeu le pronostic vital du patient. Il serait donc judicieux d’en étendre les indications, notamment chez les hommes âgés.

La prise en charge de l’HTA impose l’évaluation du risque cardio-vasculaire global du patient, c’est d’ailleurs le deuxième objectif du bilan. Des échelles spécifiques ont été largement diffusées ces dernières années, elles sont utiles, mais la simple addition des facteurs de risque permet d’estimer le niveau du risque avec une précision suffisante. On sait que, dès qu’à l’hypertension s’ajoute ne serait-ce qu’un autre facteur, comme une hypercholestérolémie, ce niveau augmente de façon importante. Si l’on compare, par exemple, les patients se situant à la fois dans le quintile le plus faible de pression artérielle et celui le plus faible de la cholestérolémie à ceux se situant dans les quintiles les plus hauts, le risque global est multiplié par dix.

Quant à l’objectif ultime, celui de la prévention des complications de l’HTA, il requiert des mesures hygiéno-diététiques et, le plus souvent, un traitement pharmacologique. Les premières, dans le cadre d’une prise en charge globale, sont essentielles. Les mesures pharmacologiques font, bien entendu, appel aux antihypertenseurs, mais aussi à d’autres médicaments à tropisme cardio-vasculaire, comme l’a bien montré l’étude Steno 2, menée chez des diabétiques, qui a comparé un traitement « conventionnel » à une « polychimiothérapie » intensive avec des objectifs exigeants. La différence est spectaculaire, avec une réduction de plus de 50 % des événements cumulés (44 % dans le premier groupe, contre 24 % dans le second). La réduction du risque absolu atteint 20 %.

D’après les communications du Pr G.Chatellier (hôpital Georges-Pompidou, Paris) et des Drs J. Blacher (Hôtel-Dieu, Paris) et J-P. Baguet (CHU de Grenoble).

Mapa ou automesure ?

Le profil tensionnel nycthéméral est un paramètre fondamental à prendre en compte dans l’évaluation de la sévérité d’une hypertension artérielle. On sait en effet que le pronostic des patients dont la PA ne baisse pas de 10 % pendant le sommeil est moins bon que celui des sujets qui présentent cette diminution physiologique. D’où l’intérêt de la Mapa avant de commencer un traitement antihypertenseur. Elle permet aussi, et c’est l’un de ses principaux avantages sur la mesure au cabinet, de vérifier l’authenticité de l’HTA et de dépister certaines hypertensions masquées. La Mapa est également un examen de choix en cas d’HTA résistant au traitement.

L’automesure fournit aussi des informations complémentaires à la mesure prise par le praticien. Elle offre en outre l’avantage de faire prendre conscience au patient de sa maladie et de l’impliquer dans sa gestion. Elle peut également améliorer l’observance thérapeutique.

Il ne s’agit donc pas d’opposer ces deux méthodes, qui apparaissent plutôt complémentaires. La Mapa peut être réalisée avant la mise sous traitement antihypertenseur, sauf chez les patients qui doivent, de toute façon, bénéficier d’un traitement agressif, comme les diabétiques ou les insuffisants rénaux. L’automesure, quant à elle, s’intègre dans la prise en charge thérapeutique pour en vérifier l’efficacité dans les conditions de la vie réelle...

> Dr MARINE JORAS

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7896