LES CHERCHEURS, qui défileront aujourd'hui aux côtés des enseignants, ont adressé une lettre au président de la République. Après avoir symboliquement donné leur démission de leurs fonctions administratives (pour 975 directeurs d'unités de laboratoires et 1 110 chefs d'équipe), les chercheurs du collectif Sauvons la recherche demandent à Jacques Chirac de « donner l'impulsion nécessaire pour que, dès 2004, le gouvernement rétablisse les emplois supprimés », soit un total de 550.
Au-delà des trois milliards de crédits supplémentaires promis par le Premier ministre pour la recherche, sur la période 2005-2007, l'effort consacré aux emplois (chiffré à 20 millions d'euros par an) aurait pour but, selon les chercheurs, de redonner « à nos jeunes et à leurs aînés des raisons de croire dans votre intention de faire de la recherche une priorité de votre quinquennat, une pièce maîtresse de votre projet pour la France ».
« Dans ces conditions, c'est avec détermination et ambition que la communauté scientifique s'attellera avec les autorités concernées au déroulement des assises nationales de la recherche, prélude à la loi d'orientation et de programmation pluriannuelle de la recherche et de l'innovation que vous vous êtes engagés à faire adopter », poursuivent les chercheurs. Sans réponse du chef de l'Etat, ils menacent d'une grève administrative pour vendredi prochain.
La Conférence des présidents du Comité national de la recherche scientifique, instance d'évaluation, a quant à elle, confirmé sa décision de ne pas rendre les rapports d'évaluation des unités de recherche, et de ne pas signer les relevés de conclusions concernant celles-ci, lors de la session de printemps en cours.
Un rapport en juillet.
Parallèlement à la mobilisation, Etienne-Emile Baulieu et Edouard Brézin, président et vice-président de l'Académie des sciences, ont présenté cette semaine, en compagnie du porte-parole du collectif Sauvons la recherche, l'immunologiste Alain Trautmann, les membres du Comité national d'initiative et de proposition pour la recherche scientifique (« le Quotidien » du 11 mars). Ce comité doit recueillir toutes les propositions de la communauté scientifique, publique et privée : des réunions, les états généraux de la recherche, seront organisés à tous les niveaux, local, régional et national. Le comité rendra au gouvernement un premier rapport dès le mois de juillet en vue de la future loi d'orientation et de programmation pluriannuelle pour la recherche, dont la rédaction est prévue pour l'automne.
D'ores et déjà, quatre professeurs du Collège de France, François Jacob (prix Nobel de médecine), Philippe Kourilsky, Jean-Marie Lehn (prix Nobel de chimie) et Pierre-Louis Lions font publiquement part de leurs propositions dans un livre blanc intitulé « Du Nerf ! » (pour donner un nouvel essor à la recherche française).
Ils proposent le « rapprochement des universités et des organismes de recherche par la création de campus de recherche généralement centrés sur des universités, dotés d'une réelle autonomie, et auxquels les universités et les organismes de recherche délèguent les moyens humains et financiers ». Ils souhaitent que les organismes de recherche soient transformés « en agences de moyens, chargées de fournir des ressources aux campus de recherche et d'assurer les actions transversales entre campus ». Il suggèrent qu'au ministère de la Recherche se substitue « une instance allégée à fonction essentiellement stratégique auprès du Premier ministre ». Ils proposent que la politique de l'emploi scientifique soit revue :
- par l'amélioration des dispositifs d'évaluation et de promotion au mérite ;
-par la recherche du bon équilibre entre emplois stables et emplois à durée déterminée ;
- par la décentralisation progressive du recrutement et le suivi des carrières au niveau des campus de recherche, où doivent s'équilibrer les relations entre enseignants, chercheurs et enseignants-chercheurs.
Quant à la mise en œuvre, il faut, selon eux, « conforter d'urgence les ressources des pôles d'excellence existants, engager une réflexion nationale orientée vers les indispensables réformes, réformer progressivement et disposer d'une réserve financière pour éviter les à-coups et diminuer les strates administratives plutôt que de les augmenter ».
Le travail de synthèse du Comité national pour la recherche promet d'être ardu. Car si les chercheurs poursuivent activement leur combat dans la rue, ils sont également nombreux à vouloir participer au renouveau de la recherche française.
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