BIEN ENTENDU, l'idée même que les chancelleries aient pu déceler quelque parti à tirer du cataclysme est moralement choquante. Le cynisme des gouvernements est décidément incorrigible, encore qu'il soit amoindri par la sincérité des peuples donateurs.
Plus que jamais drapée dans sa conscience, la diplomatie française, qui veut tendre à l'impartialité et à l'équilibre ( « Nous n'avons que des amis », disait Pompidou) ne s'est pas contentée de discourir. Elle a apporté une part non négigeable aux secours et les Français, atterrés par la dévastation, ont payé de leur poche. On ne saurait donc s'indigner d'un comportement diplomatique convenu quand il s'accompagne d'une mobilisation efficace.
La « coalition » américaine.
On n'en dira pas autant de l'administration américaine qui, justement, n'a peut-être pas cru que le tsunami était aussi une question de relations internationales : George W. Bush a mis trois jours avant d'exprimer sa consternation, et il ne l'a fait que parce que son silence a été abondamment critiqué aux Etats-Unis et à l'étranger. Il a espéré se rattraper ensuite en demandant la création d'une « coalition » d'Etats qui se porterait au secours des victimes. Dès le début de la conférence de Djakarta, à la fin de la semaine dernière, les Etats-Unis renonçaient à ce projet qui ressemblait trop à la coalition en Irak. Ils souhaitaient atténuer leur image de pays belliqueux, ils n'ont fait que l'aggraver.
Mais ils ont déployé dans l'océan Indien une flotte impressionnante et, loin de coordonner leur action avec celle des autres pays, ils ont apporté leurs secours unilatéralement, souvent avec une efficacité indéniable. Ils ont des moyens et lorsque les comptes seront faits, on verra que les Américains auront le plus donné.
ON NE SAURAIT S'INDIGNER D'UN COMPORTEMENT DIPLOMATIQUE CONVENU QUAND IL EST ACCOMPAGNÉ D'UNE ACTION EFFICACE
Promesses, promesses...
L'autre travers dénoncé par beaucoup d'humanitaires, c'est l'effet d'annonce qui n'est pas suivi d'effet. On a eu le sentiment, la semaine dernière, que c'était à qui allait annoncer le don le plus gros. Les Nations unies elles-mêmes n'ont pas échappé au syndrome, qui prévoyaient de recevoir un milliard et demi de dollars, en réclamaient deux, mais ne disposaient en fait que de promesses. Il est probable que les promesses ne seront pas toutes tenues, mais il est tout à fait possible que les sommes réunies soient en définitive suffisantes.
La récupération du malheur planétaire par quelques gouvernements est certes agaçante. Mais même les violences de la nature relèvent de la politique ; la conférence de Djakarta a été réunie parce qu'il fallait bien coordonner les efforts internationaux. On admettra aussi qu'il y un enjeu global dans cette catastrophe qui se transforme peu à peu en « affaire » : la relation entre les pays riches et les pays pauvres. La querelle sur la mondialisation explique la précipitation de la France quand elle s'est portée au secours des populations sinistrées ; elles appartiennent à un monde qui attend de voir des preuves de notre sincérité. C'est ce que M. Bush et son administration n'ont pas compris, même s'ils se sont quelque peu rachetés ; c'est ce qui n'a pas échappé au gouvernement français.
La réponse est claire : nous sommes tous solidaires ; le cataclysme a frappé deux continents, a fait des victimes en Thaïlande, en Indonésie, au Sri Lanka, en Inde, en Afrique. Des milliers de touristes occidentaux sont morts sur les rives de l'océan Indien. Aucun pays n'a été épargné. Jamais une forme de gouvernance mondiale n'aura paru aussi nécessaire.
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