14-15 décembre 2006- Paris
L’ALDOSTÉRONE provoque une réabsorption de sel et d’eau par le rein, et provoque ainsi une augmentation de la pression artérielle. Ses effets s’expliquent par l’activation de son récepteur minéralocorticoïde, présent dans les cellules rénales. Les agonistes et surtout les antagonistes de ce récepteur sont très largement utilisés en clinique. Les antagonistes ont en effet des propriétés diurétiques et antihypertensives.
Les mécanismes d’activation du récepteur minéralocorticoïde par l’aldostérone et de son inactivation par les antiminéralocorticoïdes, comme la spironolactone, sont dorénavant mieux compris. Cela devrait permettre le développement d’une nouvelle classe de molécules pharmacologiques antiminéralocorticoïdes, dépourvues d’effets secondaires indésirables. Une mutation au niveau du domaine de liaison de l’aldostérone a en effet été identifiée dans une famille d’hypertendus. Son domaine de liaison de l’aldostérone a été étudiée par M. Oblin et coll. au moyen de la diffraction de rayons X (1).
Ce domaine a alors été produit par génie génétique, puis purifié et cristallisé. Sa structure cristallographique a été étudiée. La connaissance de la relation structure-activité devrait permettre la conception de molécules antiminéralocorticoïdes efficaces et spécifiques.
Le rôle des molécules ayant une activité antialdostérone ne se limite pas à des actions sur le rein. Des récepteurs sont en effet présents au niveau cardiaque, vasculaire et dans d’autres tissus, comme les adipocytes ou le système nerveux central par exemple. L’aldostérone est ainsi impliquée dans des processus physiopathologiques divers qui aboutissent à des pathologies cardio-vasculaires. Différents essais cliniques ont indirectement confirmé ce lien physiopathologique. Dans l’étude RALES (Randomized Aldactone Evaluation Study), par exemple, 1 663 patients ayant une insuffisance cardiaque de classe III ou IV de la Nyha ont reçu un traitement conventionnel auquel a été associé aléatoirement soit de la spironolactone, soit un placebo (2). La mortalité a été réduite de 30 % dans le groupe affecté à la spironolactone et l’état clinique des patients s’est davantage amélioré que dans le groupe témoin. Ces bénéfices sont en rapport avec une diminution de la progression de l’insuffisance cardiaque et du nombre de morts subites, en dehors de tout effet hémodynamique. Cette étude a ainsi confirmé le rôle important de l’aldostérone dans la physiopathologie de l’insuffisance cardiaque sévère. De même, l’étude EPHESUS (Eplerenone Post-AMI Heart failure Efficacy and Survival Study) a porté sur 6 632 patients en postinfarctus avec dysfonction ventriculaire gauche et insuffisance cardiaque. L’association de l’éplérénone, un antagoniste sélectif de l’aldostérone, au traitement conventionnel a permis de diminuer de 15 % la mortalité totale et de 13 % la mortalité cardio-vasculaire ou les hospitalisations pour cause cardio-vasculaire.
En étudiant un modèle animal, L. Perrier et coll. (4) ont pu récemment montrer que l’amplitude du courant calcique de type L, à charge longue, est corrélée aux taux plasmatiques d’aldostérone. La concentration sérique d’aldostérone régule ce courant, ainsi que le couplage excitation-contraction dans les cardiomyocytes de l’animal.
Deux dogmes remis en cause.
Le « dogme » de l’action exclusive de l’aldostérone sur les tissus épithéliaux a ainsi été remis en question. Il en va de même de celui de la synthèse uniquement surrénalienne de l’hormone. Le coeur est en particulier un organe stéroïdogénique, ce qui confirme l’hypothèse selon laquelle il possède une fonction endocrine.
Certaines souris transgéniques surexpriment l’enzyme finale de la biosynthèse de l’aldostérone, l’aldostérone synthase. Leurs taux d’ARN sont 100 fois supérieurs à la normale et la concentration cardiaque en aldostérone est 1,7 fois plus élevée que chez les souris sauvages. Néanmoins, aucune altération structurelle myocardique n’a pu être mise en évidence. En particulier, la masse ventriculaire et son contenu en collagène sont normaux chez ces animaux. De même pour la fonction cardiaque évaluée par échocardiographie, étude sur coeur isolé ou technique du patch-clamp. Toutefois, A. Garnier et coll. ont montré que cet excès d’aldostérone endogène se matérialise par une anomalie endothélium dépendante de la réserve coronaire (5). Même si cette anomalie n’est pas détectable à l’état basal, son rôle potentiellement délétère sur l’adaptation coronaire doit être envisagé. En tout état de cause, en cas de fistule aorto-cave expérimentale, elle se matérialise par une hypertrophie cardiaque, une augmentation du diamètre diastolique et par une diminution de la fraction de raccourcissement ventriculaire gauche. Cette dysfonction peut être prévenue par l’administration de spironolactone.
D’après les communications de M. Oblin, F. Jaisser et C. Delcayre.
(1) Fagart J et coll. « Nat Struct Mol Biol » 2005 ; 12 (6) : 554-555. (2) Pitt B et coll. « N Engl J Med » 1999 ; 341 : 709-717.
(3) Pitt B et coll. « N Engl J Med » 2003 ; 348 : 1309–1321.
(4) Perrier R et coll. « J Physiol » 2005 ; 569 (Pt 1) : 153-162. (5) Garnier A et coll. « Circulation » 2004 ; 110 (13) : 1819-1825..
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