Un faible nombre d’établissements ont répondu à l’appel d’offres FMESPP2 et les établissements qui ont engagé une démarche en sont le plus souvent restés à la rédaction des fiches métiers et à la généralisation des entretiens annuels d’évaluation, renonçant aux aspects prévisionnels. Cette déception peut être nuancée via la notion de « l’effectivité » qui montre l’aspect irréaliste des objectifs fixés et les avancées néanmoins observables sur le terrain.
Évaluer « l’effectivité » plutôt que « l’efficacité ».
François Jullien3, sinologue français, a comparé les conceptions européennes et chinoises des stratégies d’efficacité : en partant d’une analyse de la pensée grecque, il explique que l’Europe se caractérise par la prédominance d’une logique de planification de l’action à partir de raisonnements théoriques sur les futurs souhaités. À cette vision volontariste de l’efficacité dominante en Europe, Jullien oppose la vision chinoise traditionnelle pour laquelle fixer des buts théoriques ex ante n’a pas de sens, car les buts sont contenus dans le réel. En Chine, le résultat du changement ne dépend pas de la qualité du plan d’action, mais de la capacité à bien comprendre les circonstances pour en tirer profit.
Une recherche a été réalisée en 2011 dans quatre centres hospitaliers de la région Île-de-France qui avaient engagé en 2008 une démarche de GPMC.
Un changement dont les effets sont inscrits dans la situation initiale a davantage de chance d’aboutir. Ainsi, des fiches métiers ont été élaborées et les entretiens annuels d’évaluation ont été généralisés. Ce succès peut s’expliquer par l’existence préalable de pratiques similaires, souvent informelles :
- des entretiens d’évaluation sommaires étaient réalisés depuis plusieurs années,
- de nombreux cadres utilisaient des référentiels de compétences informels dans leurs fiches de poste.
Lorsque les objectifs sont « surplombants », déconnectés de la situation initiale, les risques d’échec du changement sont importants. Ainsi en est-il quand la prospective sur l’évolution des métiers et la mise en œuvre d’actions de GRH4 dépassent le potentiel de la situation initiale :
- un décalage entre les statuts et les métiers complique la mise en œuvre d’une GRH fondée sur le critère des compétences détenues par les agents ;
- les agents ne voient pas les conséquences pratiques de la GPMC sur leur formation, leur rémunération et leur carrière.
Les résultats montrent que des changements, discrets mais bien réels, sont en œuvre dans les établissements. Les futurs projets pourront s’appuyer sur ces dynamiques pour atteindre de nouveaux objectifs qui seront moins ambitieux, mais mieux reliés aux pratiques existantes de gestion des savoir-faire des professionnels de santé et aux attentes de formation et de parcours professionnels. Dans les établissements qui ont adopté une démarche de GPMC, une partie du chemin a été parcourue. Il faut persévérer, sans grands discours, mais avec une grande attention aux changements en cours, pour les accompagner.
2. Fond de modernisation des établissements de santé publics et privés.
3. Jullien, F. (1996). Traité de l'efficacité. Paris. Éd. Grasset.
4. Gestion des ressources humaines.
*Association de recherche appliquée au management des organisations de santé.
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