DE NOTRE CORRESPONDANTE
LORS DE LA DERNIÈRE élection présidentielle, Lille est la grande ville de France où le PS a réalisé son plus beau score avec 60 % de votes... Dans ce contexte, Martine Aubry, la maire sortante, semble jouer sur du velours… D'autant qu'elle peut compter au second tour sur le soutien des Verts, qui avaient passé la barre des 15 % en 2001.
Le bilan de l'élue PS reste cependant en demi-teinte. Si le développement culturel de la ville – avec l'opération emblématique de Lille 2004 – et l'action économique ont connu une forte impulsion sous son premier mandat, la mixité sociale n'existe que sur le papier, et la population reste marquée par les difficultés sociales. La moitié des foyers reste non imposable. Et, dans le classement par revenu des 50 premières villes de France, Lille arrive à la 45e place.
Surtout, la personnalité de Martine Aubry passe mal auprès de nombreux lillois. Tranchante et autoritaire, elle suscite une certaine défiance. D'après un sondage réalisé par l'IFOP en juin 2006 pour « la Voix du Nord », 72 % des personnes interrogées jugeaient excellent le travail de la municipalité… mais 61 % ne souhaitaient pas sa réélection.
Un ralliement qui fait grincer quelques dents.
Son principal adversaire au premier tour sera le candidat UMP Sébastien Huyghe, un jeune élu qui lui avait laissé un souvenir cuisant : totalement inconnu en politique, ce notaire de 32 ans l'avait battu dans la 5e circonscription, en 2002. Aujourd'hui conseiller régional et député, il prend la tête de l'opposition lilloise, succédant à Christian Decocq qui ne s'est pas représenté après sa défaite aux législatives de 2007.
Fin stratège, le challenger de Martine Aubry a décidé de jouer l'ouverture à gauche : en seconde position sur sa liste, il accueille le Dr Brigitte Mauroy, militante du Parti radical de gauche (PRG) et nièce de Pierre Mauroy, ancien Premier ministre de François Mitterrand, et qui a été maire PS de la ville pendant vingt-huit ans. Un ralliement qui a fait grincer quelques dents dans le landernau socialiste lillois…
«Pierre Mauroy a été un grand maire pour la ville. C'est sous son impulsion que Lille a pris le tournant vers une grande métropole. J'admire beaucoup ses qualités de visionnaire et humaines mais, aujourd'hui, la qualité de vie s'est érodée. On y vit moins bien que dans les années quatre-vingts. J'ai décidé de faire quelque chose, en rejoignant le candidat susceptible de poursuivre la grande entreprise initiée par Pierre Mauroy», explique cette urologue de 53 ans, chef de service à l'hôpital Saint-Philibert de Lomme et professeur d'anatomie à la faculté de médecine de Lille.
Brigitte Mauroy apprécie peu celle qui a mis en place la loi sur les 35 heures. «Chef de service dans un hôpital public de Roubaix, j'ai pu mesurer l'impact catastrophique de cette loi sur le fonctionnement de l'hôpital. La loi sur les trente-cinq heures telle qu'elle a été appliquée a précipité la dégradation de la prise en charge hospitalière. Il y a à l'hôpital public des gens formidables qui ont été immobilisés par cette loi», accuse-t-elle.
Les prises de position de Brigitte Mauroy lui ont valu quelques inimitiés à l'hôpital. Après vingt-deux années passées dans le service public, l'urologue a démissionné en 2004… pour rejoindre un hôpital de la Catho.
Aujourd'hui, elle se présente sans étiquette, sur la liste de Sébastien Huyghe. «Je ne suis ni socialiste ni UMP. Simplement militante PRG,mais sans être encartée. Je pense que, pour les municipales, il s'agit surtout de regrouper ensemble des personnes décidées à travailler pour la ville», affirme Brigitte Mauroy.
Dans le domaine de la santé, elle a forcément quelques idées, même si elle regrette que ce thème ne soit pas plus présent dans la campagne. Son credo : il faut traiter de front la santé et l'action sociale. «Nous projetons la création d'une grande maison de la médiation et de l'action sociale dans un lieu facile d'accès, la gare de Lille, pour aider les Lillois à reprendre leurs droits. Par ailleurs, nous souhaitons ouvrir une maison de santé dans chaque quartier. Le niveau de santé des Lillois n'étant pas bon, il est nécessaire d'améliorer leur prise en charge et de développer la prévention», dit-elle . Autre dossier phare de la candidate médecin : l'accessibilité de la ville. L'aménagement des trottoirs et un système de location de fauteuils roulants couplé avec le projet Vélille figurent au programme de la liste UMP.
Les médecins de la liste du MoDem.
Autre médecin engagé dans la campagne, Jacques Richir conduit une liste MoDem. Ce généraliste lillois, connu pour son engagement social, et président depuis 2002 du conseil d'administration de l'Institut catholique de Lille, espère réaliser un aussi bon score que François Bayrou aux dernières présidentielles.
Il s'est entouré de personnalités reconnues pour leurs compétences et non leur couleur politique. Les architectes Martine Pattou et Didier-Joseph François pour l'urbanisme. Les Dr Mohamed Abdelatif, ancien représentant de la CFDT à la Caisse nationale d'assurance-maladie, aujourd'hui président de l'union régionale des caisses d'assurance-maladie (URCAM), et Jean-Marc Rehby, président de l'union régionale des médecins libéraux (URML) pour son volet santé. «Des personnes non cartées au MoDem, qui réunissent toutes les compétences nécessaires à la gestion d'une ville comme Lille, précise le candidat qui souhaite développer la politique de santé au niveau des quartiers. Nous projetons des programmes nutritionnels pour lutter contre l'obésité des jeunes enfants. Pour la prévention, la ville est un bon relais. Elle peut décliner des actions dans les centres sociaux et à l'école.» Jacques Richir entend également développer la culture en scientifique grâce à un partenariat entre l'institut Pasteur de Lille et le musée d'Histoire naturelle. «La vulgarisation scientifique est nécessaire pour que les gens s'approprient un certain niveau de connaissance», insiste le candidat MoDem.
Pour les ralliements du second tour, rien n'est encore décidé. Et Jacques Richir ne dément pas les rumeurs d'un rapprochement avec Martine Aubry : «C'est totalement ouvert… Nous choisirons l'équipe qui présente le projet le plus intéressant pour la ville. Si le projet socialiste est compatible avec le nôtre, pourquoi pas?», dit-il.
Réponse en mars...
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