CONGRES HEBDO
Le phénomène douloureux est souvent le premier signe clinique en rhumatologie. Les cancers sont par ailleurs une pathologie fréquente dans cette spécialité, puisque de 15 à 20 % des patients hospitalisés sont atteints d'une pathologie tumorale maligne. Enfin, les syndromes rhumatologiques sont très fréquents au début ou au cours de l'évolution de la pathologie cancéreuse.
La douleur peut être provoquée par la tumeur elle-même, par la compression d'un organe de voisinage ou par un syndrome paranéoplasique. Une étude publiée en 1999, qui portait sur une série de 1 095 patients, a montré que la douleur ressentie par le patient est de type nociceptive dans un tiers des cas, neuropathique chez près de 4 malades sur 10 et, enfin, qu'il s'agit d'une douleur mixte chez 1 sujet sur 4 environ. Les phénomènes douloureux siègent au niveau d'une articulation dans plus de 40 % de cas, alors qu'ils traduisent une atteinte neurologique chez 1 malade sur 4 environ, de même que les douleurs par atteinte des tissus mous.
Un symptôme révélateur de métastase osseuse
La douleur est le symptôme majeur qui permet la découverte d'une métastase osseuse (68 % des cas pour le cancer du sein). Il s'agit donc d'une circonstance de découverte beaucoup plus fréquente qu'une atteinte neurologique, une hypercalcémie ou une fracture pathologique.
En cas de compression nerveuse, s'il s'agit souvent d'une radiculalgie cervicale ou lombaire, cette atteinte est en général sensitive et motrice d'emblée. Elle est croissante, mais l'atteinte motrice progresse plus nettement que l'atteinte douloureuse. Une métaanalyse portant sur les lombalgies, publiée en 2002, a montré qu'elles étaient en rapport avec un cancer dans 0,7 % des cas. Les infections étaient beaucoup plus rares (0,01 % des cas), de même que les spondylarthrites ankylosantes (0,3 % des cas). Une fracture était en cause chez 4 % des malades dans ce travail.
Une étiologie cancéreuse doit être évoquée devant quelques critères simples : douleur mixte d'emblée, augmentant progressivement, avec paroxysmes, en particulier chez un sujet de plus de 50 ans ayant des signes associés.
Par ailleurs, certains syndromes rhumatismaux peuvent être associés au cancer et rendre compte du phénomène douloureux. C'est par exemple le cas de la dermatomyosite lors d'un cancer de l'ovaire ou du poumon, de la polymyosite ou de certaines vascularites en cas de cancer de l'estomac. Les cryoglobulinémies mixtes ou une périartérite noueuse peuvent se voir avec des hémopathies ou un cancer du rein. Diverses néoplasies, enfin, peuvent être accompagnées ou révélées par des syndromes lupiques ou par un syndrome RS 3 PE (« Seronegative Symmetrical Synovitis With Pitting Edema » des Anglo-Saxons). D'autres manifestations sont encore possibles : nécrose digitale dans le cas du cancer du poumon, syndrome algoneurodystrophique dans divers cancers, fasciite palmaire du cancer de l'ovaire ou du pancréas, par exemple.
Concernant la douleur elle-même, il est admis qu'il n'existe pas de corrélation entre l'importance de la tumeur et l'intensité du phénomène douloureux. A l'extrême, le syndrome rhumatologique peut être présent alors que la tumeur n'est pas cliniquement ou radiologiquement individualisé.
Des mécanismes complexes qui font intervenir le volume et la localisation de la tumeur
La douleur osseuse est la plus fréquente des douleurs chez les cancéreux. Les métastases osseuses surviennent dans 30 à 70 % des cancers selon leur origine et sont révélatrices dans 15 à 20 % des cas. Les localisations les plus fréquentes sont le rachis, le bassin, les côtes, le fémur, la voûte crânienne et l'humérus.
Les douleurs sont d'intensité variable. Elles sont parfois intermittentes, mais le plus souvent permanentes, diurnes et nocturnes, progressivement croissantes, et sont le plus souvent exacerbées par le mouvement, le port de charges et la palpation. Deux fois sur trois, les patients se plaignent de douleurs incidentes paroxystiques. Ils décrivent également leurs douleurs comme coupantes, rongeantes, brûlantes et accablantes. Ils les qualifient une fois sur deux d'épuisantes et d'intolérables.
Certaines métastases sont indolores, ce qui souligne l'intérêt de la scintigraphie et de l'imagerie par résonance magnétique nucléaire.
Les mécanismes de la douleur osseuse cancéreuse sont complexes. Ils font intervenir le volume et la localisation de la tumeur elle-même, en particulier ses rapports avec le périoste, finement innervé. Les molécules impliquées dans le remodelage osseux participent à la genèse de la douleur, qu'il s'agisse des membres de la superfamille du TNF (RANK, RANKL) et de ses récepteurs comme l'ostéoprotégérine (OPG). Des travaux récents ont montré que l'OPG a une action inhibitrice sur les voies de la douleur au niveau de la corne dorsale médullaire.
D'après un entretien avec le Dr Jacques Glowinski, Gonesse.
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