T ROIS données bien établies contribuent actuellement à une nouvelle approche du RGO : - l'absence de parallélisme anatomoclinique (l'incidence des symptômes est peu différente, que la fibroscopie montre ou non des érosions), - la décision de traiter qui repose sur la plainte du malade et la notion nouvelle, dans certains cas, que le RGO est une maladie chronique (certains sujets sont des « reflueurs » à vie).
De nouvelles recommandations (1 et 2) ont également permis de montrer la divergence entre la mesure du symptôme et son réel retentissement, la nécessité de combattre des mesures peu légitimes, voire illogiques, en matière d'attitude thérapeutique et hygiénodiététiques. La question reste posée en ce qui concerne le choix d'un traitement progressif ou d'emblée efficace, par inhibiteurs de la pompe à protons (IPP).
Pour le Pr Jean-François Bergmann, hôpital Lariboisière, Paris, « il est surtout important d'adapter le traitement au cas particulier et aux symptômes de chaque patient ». En pratique, c'est la clinique qui guide la stratégie thérapeutique en cas de reflux typique (pyrosis, régurgitations, brûlures épigastriques), du RGO du sujet jeune, du RGO s'accompagnant de lésions de grade 1 ou 2 à l'endoscopie. Elle reste aussi l'élément de référence pour décider d'une endoscopie. Autrement dit, précise le Pr Gilles Bommelaer, CHU hôtel-Dieu, Clermont-Ferrand, « tout reflux chez un sujet jeune doit être traité sans recourir à l'endoscopie. Néanmoins, la prise en charge thérapeutique au long cours est difficile sans une connaissance globale de l'importance des lésions. On se basera donc sur la fréquence des récidives pour faire ou non un bilan endoscopique ».
Néanmoins, la clinique a des limites et, notamment, elle est trompeuse chez le sujet âgé. En effet, l'sophagite peptique n'est pas obligatoirement accompagnée par une aggravation des symptômes. Il est d'ailleurs reconnu que la gravité des symptômes diminue avec l'âge, alors que la gravité des sophagites augmente. Sachant que plus le patient est âgé, moins la corrélation entre gravité des symptômes et gravité des lésions est valide, l'endoscopie est justifiée pour le reflux du sujet âgé de plus de 50-60 ans, afin de faire le bilan des lésions et guider la thérapeutique.
Un traitement adapté au cas par cas
« Le choix du traitement de première intention dépend de la fréquence du reflux. Des symptômes espacés une fois par mois ou tous les deux mois ne justifient pas un traitement continu, même si cet épisode est très douloureux, explique le Pr Marc-André Bigard, CHU Brabois, Nancy. Un traitement de la crise est préférable dans ce cas en ayant recours aux médicaments qui élèvent le pH très rapidement, c'est-à-dire les anti-acides, les alginates et les anti-H2, surtout lorsqu'ils sont effervescents (offrant une certaine charge anti-acide immédiate. »
Selon le consensus, le traitement de première intention (sans endoscopie ou avec un pyrosis fréquent) offre le choix entre un prokinétique à pleine dose, un anti-H2 à pleine dose ou un IPP à demi-dose. Après la suppression du cisapride (seul prokinétique véritablement évalué), en août 2000, en raison de complications cardiaques, il reste donc au médecin le choix de prescrire un anti-H2 à pleine dose ou un IPP à demi-dose qui présente l'avantage d'une unique prise journalière et d'une plus longue durée d'action, avec un maintien au long cours des effets sur la sécrétion acide.
« La rechute étant imprévisible à titre individuel, remarque le Pr M.-A. Bigard, un traitement initial de quatre semaines est conseillé pour soulager le patient, permettant ensuite d'apprécier l'évolution de la maladie avant de prescrire un éventuel traitement d'entretien. Si les rechutes sont espacées, le traitement d'entretien peut s'envisager au"coup par coup"pendant deux à quatre semaines à chaque épisode. Si les rechutes sont précoces et fréquentes, un traitement d'entretien au long cours est alors nécessaire. Les IPP sont utilisés pour le traitement d'entretien car ils gardent un effet antisécrétoire inchangé dans le temps, même sur plusieurs années. » A cet égard, on peut souligner que le pantoprazole (Eupantol) est le premier IPP demi-dose avec une AMM dans ces indications de traitement d'entretien et préventif des récidives des sophagites par RGO à tous les stades.
Néanmoins, se pose en pratique le problème d'un traitement continu avec un IPP qui n'est autorisé qu'en cas d'sophagite. Autrement dit, si un patient est très gêné mais n'a pas d'sophagite, un traitement d'entretien, qui serait utile, est soumis à des contraintes réglementaires. Il reste la possibilité d'envisager un traitement chirurgical non soumis à des contraintes réglementaires, mais comportant des risques et au coût élevé.
(1) Reflux gastro-sophagien de l'adulte : diagnostic et traitement. Conclusions et recommandations du jury : texte long. « Gastro-entérologie clinique et biologique » 1999 ; 23 : 56-65
(2) Recommandations de bonnes pratiques. Les antiulcéreux : indications chez l'adulte. Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS), juillet 1999. Atelier parrainé par les Laboratoires Byk France.
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