ADOPTE en deuxième lecture par l'Assemblée nationale, le 27 avril, le projet de loi relatif à la politique de santé publique a été quelque peu amendé lors du deuxième examen sénatorial, suivi d'un vote le 10 juillet. Dans ses grandes lignes, il définit une nouvelle architecture de la politique de santé publique, étendue aux plus démunis et aux détenus, en affirmant notamment la « responsabilité de l'Etat ». La mise en œuvre en est confiée à des « groupements régionaux de santé publique » présidés par les préfets de région. Le texte, qui crée un Institut national du cancer, tire les leçons du drame de la canicule de l'été 2003 en consolidant les moyens mis à la disposition des pouvoirs publics pour faire face à une telle crise sanitaire.
Il renforce l'éducation à la santé, la lutte contre l'obésité infantile, l'alcool, le tabac, le saturnisme et les rayonnements ionisants, donne un statut au psychothérapeute et apporte un encadrement supplémentaire aux recherches biomédicales. Telles sont les mises au point des sénateurs adoptées lors de leur lecture en séance publique au début du mois.
- Éducation à la santé.
L'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé (Inpes) aura pour mission d'établir les programmes de formation à l'éducation à la santé. Leur enseignement sera obligatoire dès l'école primaire (décret).
- Obésité infantile. A compter du 1er septembre 2005, les distributeurs automatiques des établissements scolaires contiendront des aliments et des boissons dont la composition nutritionnelle, sans ajout de sucres, sera déterminée par décret rédigé par l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments. Les messages publicitaires télévisés en faveur de boissons avec ajouts de sucres, de sel, ou d'édulcorants de synthèse et de produits alimentaires manufacturés comporteront une information à caractère sanitaire. Les annonceurs de l'industrie agro-alimentaire pourront déroger à cette obligation en versant à l'Inpes une contribution fixée à 1,5 % du montant annuel des sommes destinées aux réclames, « hors remise, rabais, ristourne et taxe sur la valeur ajoutée, payées aux régies » (décret). Cela servira à financer la réalisation d'actions d'information et d'éducation nutritionnelles, en particulier au niveau des collectivités territoriales.
- Alcool. Les boissons alcooliques titrant plus de 1,2 degré conditionnées pour la vente au détail en récipients de moins de 60 centilitres seront soumises à une taxe au profit de la caisse d'assurance-maladie, à raison de 5,5 euros par décilitre d'alcool pur. Les campagnes antialcooliques prévues par le code de la santé publique « doivent porter également sur la prévention du syndrome d'alcoolisation fœtale » et inciter les femmes enceintes à ne pas boire. L'usage d'alcool pendant la grossesse constitue la cause majeure de retard mental et d'inadaptation sociale d'origine non génétique. Une information en ce sens sera délivrée dans les collèges et les lycées, au moins une fois par an. Et la formation initiale et continue de tous les professionnels de santé et du secteur médico-social comprendra un enseignement spécifique consacré aux effets de l'alcool sur le le fœtus.
- Tabac. De manière à écarter les tarifs promotionnels, le prix des cigarettes ne pourront être homologués que s'ils sont inférieurs à un certain pourcentage du prix moyen du tabac (décret), ce qui devrait donner lieu à des écarts entre marques de l'ordre de 5 %. « La taxation est un outil majeur » dans le combat contre les méfaits du tabagisme, commente Philippe Douste-Blazy, qui se félicite d'une chute des ventes des cigarettes de 26 % depuis le début de l'année.
- Saturnisme. Dans le cas d'une source d'exposition au plomb à l'origine de l'intoxication d'un enfant, le préfet prendra « toutes mesures nécessaires » à l'information de la famille, et l'invitera à consulter un médecin. Le délai au cours duquel doivent être réalisés les travaux de mise en conformité est limité à un mois, ou 3 mois si les occupants sont relogés « à l'extérieur ».
- Baladeur. Les fabricants de baladeurs sont tenus de faire porter un message de caractère sanitaire sur leurs articles, « précisant que, à pleine puissance, l'écoute prolongée peut endommager l'oreille de l'utilisateur ».
- Rayonnements ionisants. « Le préfet peut prescrire, en tant que de besoin, la réalisation de mesures des champs électromagnétiques, en vue de contrôler le respect des valeurs limites fixées en application du code des postes et télécommunications, afin de protéger la population exposée. » Des démarches identiques sont autorisées en matière de « radioprotection » sur les lieux de travail ; et, lorsque l'agent chargé de l'inspection a la qualité de médecin, il peut « se faire communiquer les documents comprenant des données médicales individuelles ».
- Psychothérapeute. L'usage du titre de psychothérapeute est réservé aux professionnels inscrits sur un « registre national ». L'inscription est enregistrée sur une liste dressée par le préfet du département, tenue à jour, mentionnant les formations suivies, théoriques et pratiques, en « psychopathologie clinique ». Une nouvelle inscription est obligatoire à chaque changement de département et s'impose après une interruption d'activité de deux ans. Les psychanalystes « régulièrement enregistrés dans les annuaires de leurs associations », les médecins et les psychologues sont inscrits de droit.
- Recherches biomédicales. « Les recherches biomédicales organisées et pratiquées sur l'être humain en vue du développement des connaissances biologiques ou médicales ne s'appliquent qu'aux produits figurant sur une liste fixée par décret. » Les recherches portant sur l'utilisation thérapeutique chez l'être humain d'organes ou de tissus d'origine animal ne peuvent être mises en œuvre qu'après autorisation expresse de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé et avis de l'Agence de biomédecine.
Le projet de loi sur la santé publique passera en commission mixte paritaire le 28 juillet, où des mesures plus contraignantes sur la lutte contre l'obésité seront proposées, avant de retourner devant l'Assemblée et le Sénat pour un vote définitif.
Victimes d'infractions pénales
L'article L. 6 112-1 du code de la santé publique est complété par l'alinéa suivant : « L'accueil et l'orientation des victimes d'infractions pénales ainsi que, en matière médicale, les constatations et examens techniques et scientifiques prévus par le code de procédure pénale sont assurés dans des conditions fixées par voie réglementaire, en concours avec les praticiens et les autres professionnels de santé, personnes et services concernés, et en concertation avec les autorités judiciaires. »
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