Formation médicale continue
Actuellement, on recense en France 12 millions de personnes âgées de 60 ans et plus, soit 20 % de la population. Parmi elles, 4,4 millions sont âgées de 75 ans et plus. En 2050, le nombre de sujets âgés de plus de 60 ans aura doublé et celui des 75-ans-et-plus aura été multiplié par trois. Quant aux 80-ans-et-plus, ils seront quatre fois plus nombreux.
Voilà quelques données démographiques qu'a tenu à rappeler Catherine Sermet, directrice de recherches au CREDES (1), en introduction du Forum de gériatrie sur les conséquences du vieillissement de la population sur l'exercice de la médecine. Un forum organisé dans le cadre du 2e Symposium Domedica.
Une espérance de vie de 90 ans?
Catherine Sermet a également évoqué l'évolution de l'espérance de vie au cours des trente dernières années. Aujourd'hui, une femme vit en moyenne jusqu'à 83 ans et un homme jusqu'à 75,5 ans contre respectivement 75,9 ans et 68,4 ans en 1970. « Selon l'INSEE, l'espérance de vie devrait atteindre 90 ans pour les femmes en 2050 », a-t-elle précisé.
Dans quel état de santé se trouve aujourd'hui cette population âgée ? Parmi les nombreux critères permettant de mesurer la santé de la population, Catherine Sermet a notamment retenu celui de la morbidité ressentie, c'est-à-dire fondée sur les déclarations des individus. En moyenne, chaque personne âgée de 65 ans et plus déclare 7,6 maladies un jour donné : 6,8 pour les hommes et 8,1 pour les femmes. Les maladies le plus fréquemment déclarées sont les problèmes oculaires (18 %) et dentaires (16 %), les troubles circulatoires (16 %), les pathologies endocriniennes (10 %) et ostéo-articulaires (8 %). « Il est à noter qu'on ne retrouve que 2 % de désordres psychologiques et mentaux, ce qui démontre qu'il n'y a pas toujours de cohérence entre le ressenti et les déclarations des individus et le niveau de consommation des médicaments, en l'occurrence, dans le cas présent, des psychotropes », a commenté Catherine Sermet. En effet, 31,7 % des hommes de 80 ans et plus, et 34,1 % des femmes du même âge consomment régulièrement des psychotropes, des tranquillisants, des antidépresseurs ou des hypnotiques.
Chef du service de gériatrie du CHU de Montpellier et secrétaire général du Collège national des enseignants en gériatrie, le Pr Claude Jeandel a, quant à lui, évoqué les « quatre clés » d'un bon vieillissement : l'activité physique, les traitements hormonaux substitutifs, un bon équilibre nutritionnel et le maintien d'un projet de vie. « Ce dernier point est particulièrement important. Bien vieillir, c'est avoir toujours envie d'aller de l'avant. Et construire un projet de vie, c'est quelque chose qui se prépare dès l'interruption de l'activité professionnelle », a-t-il souligné.
Sous l'impulsion du Dr Alain Corvez (Mutualité sociale agricole) et Rémy Fromentin (Caisse nationale d'assurance maladie), le débat s'est ensuite centré sur une question de fond : notre système de santé est-il prêt à faire face à ce vieillissement annoncé de la population ? « Au niveau de la formation initiale, notre réaction a été un peu tardive. En effet, on vient tout juste d'introduire un module consacré au vieillissement dans les facultés de médecine », a répondu le Pr Jeandel. « Il convient donc que les médecins, qui n'ont pas eu cette formation initiale, puissent avoir accès à la formation continue. Il faut qu'ils sachent qu'il existe une capacité en gérontologie ainsi que différents DU dans ce domaine. Le problème ensuite est, bien sûr, de pouvoir suivre ces formations, ce qui n'est pas toujours facile pour les généralistes qui ont des contraintes de temps et des contraintes géographiques. »
Le médecine globaliste
Le Pr Jeandel a ensuite souligné la nécessité de disposer de médecins spécialistes pour prendre en charge certains problèmes complexes. « Mais il ne faut plus raisonner uniquement en terme de médecine spécialisée autour d'un seul organe. Aujourd'hui, face à la prise en charge du patient âgé, il faut des généralistes, c'est-à-dire des médecins capables de gérer des problématiques plurielles. »
Pour le Pr Jeandel, il convient donc de rendre son rôle de « médecin globaliste » au généraliste. « Ce qu'il faut aujourd'hui, c'est donner du temps à ces médecins, a-t-il ajouté. Une évaluation gérontologique, ce n'est pas un examen par scanner ou par IRM mais du temps médical pour calculer, peser un IMC, mesurer la taille ou les troubles de l'équilibre. Or aujourd'hui la consultation est mal adaptée à ce type de prise en charge. Et il est plus que nécessaire de revaloriser l'acte intellectuel du médecin généraliste. »
(1) Centre de recherches, d'étude et de documentation en économie de la santé.
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