Testée chez le singe

Les débuts d'une prothèse de bras à commande corticale

Publié le 28/05/2008
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LES CINÉPHILES se souviennent probablement du bras artificiel de Luke Skywalker, dans la « Guerre des Étoiles ». Il fonctionnait et réagissait exactement comme membre naturel. C'est une première étape vers une telle perfection prothétique que viennent de franchir des chercheurs de Pittsburgh (États-Unis). Meel Velliste et coll. ont permis à deux singes de contrôler un bras artificiel directement à partir de leur cortex cérébral. Les animaux ont pu se saisir d'un aliment et le porter à la bouche. Que les âmes sensibles se rassurent, pour les besoins de l'expérimentation, les macaques avaient simplement les membres supérieurs entravés.

Chez deux macaques, des microélectrodes ont été implantées dans le cortex cérébral, au niveau des aires motrices primaires. Elles étaient connectées à une logistique informatique, qui commandait les moteurs d'un bras artificiel. Cette prothèse était fixée au niveau de l'épaule. Elle dispose de cinq niveaux de mouvements (épaule, coude) et se termine par une pince.

Une étape préliminaire a consisté à entraîner les singes à manipuler le bras grâce à un joystick, puis ont eu lieu les essais.

Les résultats ont dépassé les espérances des chercheurs, notamment pour l'un des deux macaques.

Récupérer l'aliment et le porter à la bouche.

Des friandises étaient placées devant les animaux, mais en des emplacements variables. Alors qu'il fallait une précision de 5 à 10 mm, les deux singes ont réussi à récupérer l'aliment et à le porter à la bouche plus d'une fois sur deux. Sur deux journées consécutives, le taux de réussite s'est amélioré avec le temps, avec une série de sept succès d'affilée pour l'un des singes. L'équipe admet qu'il était plus facile de retirer la gourmandise de la pince, en s'aidant de mouvements de la tête.

La surprise est venue de l'analyse des mouvements. Rapidement les animaux ont pu retendre le bras artificiel alors qu'ils étaient encore en train de mastiquer l'aliment précédent. Les mouvements naturels des bras et des yeux n'affectaient pas le déplacement du bras artificiel. Et, enfin, comme dans un geste naturel, la pression de la pince se relâchait progressivement à mesure que l'aliment approchait de la bouche. La pince s'ouvrant totalement à proximité de la bouche.

L'analyse des enregistrements cinétiques montre l'absence de délai entre la volonté d'étendre le bras et le départ du mouvement de la prothèse. La latence était la même que celle d'un mouvement naturel.

Par rapport aux essais antérieurs de contrôle cérébral d'un curseur sur un écran d'ordinateur, le progrès est énorme. L'équipe est passé d'un déplacement en deux dimensions à un mouvement en quatre dimensions. Ils incluent, en effet, la notion de temps, en mesurant la vélocité de déplacement. Enfin, d'autres équipes avaient réalisé des tentatives avec des bras robotisés, mais n'avaient jamais créé d'interactivité en fixant une cible à récupérer.

Bien sûr l'objectif ultime sera de fournir un appareillage à des individus amputés d'un membre ou paralysés.

« Nature », doi : 10.1038/nature06996.

> Dr GUY BENZADON

Source : lequotidiendumedecin.fr: 8380