Données de santé

Les craintes d’une révolution numérique mal maîtrisée

Publié le 06/12/2014
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La révolution numérique touche tous les domaines d’activités humaines. La santé n’y échappe pas. Elle est déjà en route, mais son impact est annoncé comme de plus en plus déterminant pour l’avenir de l’offre de soins, hôpital compris. Avec, à la clé, espoirs mais aussi peurs grandissantes.

« À l’avenir, les chambres d’hôpital, en réanimation-soins intensifs mais aussi en court et moyen séjours, comporteront un grand nombre d’outils informatiques de types tablettes – permettant au personnel soignant d’accéder directement au dossier médical du patient et de réaliser les prescriptions adaptées – et d’outils connectés », estime David Delerue, directeur et fondateur de la société Alicante, fournisseur de solutions informatiques en santé. En outre, des capteurs plus ou moins invasifs évalueront la température et le taux d’humidité de la pièce, détecteront les chutes, mesureront les paramètres vitaux des patients, etc. De tels capteurs existeront également au domicile des patients afin d’assurer le télésuivi de leur maladie chronique ou de leur convalescence après une intervention chirurgicale, par exemple. « Encore faudra-t-il que les établissements disposent des équipes, organisations et compétences nécessaires pour traiter et interpréter les données recueillies puis réagir de manière appropriée et personnalisée », souligne le Dr Vincent Leroux, Dr Vincent Leroux, médecin de santé publique aux hôpitaux de Saint Maurice (Val-de-Marne) et vice-président-fondateur de Centrale Santé.

Cloud computing

En parallèle, les « infrastructures cloud », se généraliseront. Actuellement, le programme Région Sans Film, par exemple, compte 38 établissements publics et privés adhérents au groupement de coopération sanitaire pour le développement des systèmes d’information de santé partagés en Île-de-France (GCS D-SISIF). Ces centres médicaux ont fait le choix d’une plateforme mutualisée de dématérialisation et de partage pour leur imagerie médicale et leur système d’information en radiologie. « Cela permet de simplifier le système d’information au sein des établissements et de rationaliser les coûts grâce au paiement à l’usage », précise Benjamin Sarda, directeur marketing chez Orange Healthcare. Le CHRU de Montpellier a quant à lui choisi une gestion externalisée de l’ensemble de son système d’informations. Si les prestataires parlent des avantages de la mutualisation en terme de « souplesse » offerte en matière de gestion des données de santé et de « sécurité garantie 24h/24 » par l’hébergeur de données de santé qui dispose des équipes spécialisées et compétentes, ils éludent certaines failles du dispositif qui provoquent pourtant l’inquiétude des équipes soignantes et des patients.

Une plus grande dépendance aux réseaux

En adoptant ce type d’architecture informatique, présentée aujourd’hui comme incontournable, les hôpitaux deviennent dans le même temps dépendants de la qualité et de la sécurité des réseaux de télécommunication. La crainte du « plus de réseaux, plus de soins » est réelle. D’autre part, certains, et pas seulement des « techno-septiques », s’inquiètent de la concentration des données de santé auprès d’une poignée d’opérateurs privés non issus du secteur de la santé. Les interrogations concernent la sécurité (qui ne peut jamais être garantie à 100 %), mais aussi les utilisations frauduleuses. Surtout si les opérateurs en question ne sont pas français ou européens, donc hors de notre système juridique et législatif. L’affaire « Prism » (du nom du programme de surveillance mis en place par la CIA chargé de recueillir auprès des entreprises américaines, et notamment les géants du Web, un certain nombre de données personnelles) est encore dans toutes les mémoires…

Nathalie Ratel

Source : Décision Santé: 299