• Les raisons d'une réforme
S'ils diffèrent sur les causes actuelles des difficultés du système de santé et d'assurance-maladie, le constat dressé par les différents acteurs se rejoint : absence d'évaluation des besoins médicaux et de définition des priorités sanitaires, coordination des soins insuffisante, manque de transparence et de connaissance des pratiques médicales, dispositif de maîtrise des dépenses inefficace et crise de confiance entre les professionnels de santé et l'assurance-maladie.
C'est la logique de maîtrise « comptable » des dépenses de santé introduite par le plan Juppé en 1996 qui a, selon les membres du G7 (1), conduit le système conventionnel dans une « impasse ».
Leur ambition est donc de rebâtir un système conventionnel fondé sur la mise en place d'une maîtrise médicalisée des dépenses dont l'objectif est de garantir à tous un égal accès à des soins de qualité tout en rémunérant « à leur juste valeur » les actes médicaux.
La philosophie des membres du G14 (2) n'est pas si éloignée, puisque, pour corriger un système qu'il juge « coûteux et inégalitaire », ils proposent d'optimiser les dépenses. Objectif : garantir aux assurés « équité, qualité et utilité » des soins. Quant aux responsables de la CNAM qui partagent ce point de vue, ils jugent urgent de fonder les décisions sanitaires et économiques sur une politique de santé, c'est-à-dire des choix et des priorités clairement identifiés.
• Qualité des soins
Evaluation des pratiques professionnelles, référentiels de bonnes pratiques médicales et coordination des soins sont les trois éléments qui doivent, selon ces deux groupes de travail, concourir à l'amélioration de la qualité des soins. Mais leurs modalités diffèrent ensuite selon les organisations.
Le G7 préconise une évaluation collective et individuelle des pratiques qui permette d'orienter la formation médicale continue des médecins obligatoire.
Egalement favorable à une évaluation des pratiques médicales sur la base de référentiels dont les résultats seraient connus des assurés, le G14 va plus loin dans la coordination des soins, puisqu'il prône la mise en place, autour des patients, d' « équipes pluridisciplinaires » dont cette mise en place serait facilitée par le mode de rémunération.
Quant aux responsables de la CNAM qui partagent l'idée d'un dossier de suivi médical, ils restent attachés aux propositions du plan stratégique, à savoir la certification des professionnels de santé et l'habilitation des structures et des hommes à pratiquer certaines techniques de pointe.
• Démographie
Si le G14 n'aborde pas le chapitre de la démographie, ce sujet fait au contraire l'objet d'un long développement du G7. Lequel n'hésite pas à proposer de contrôler l'installation par le conventionnement. Les médecins qui demanderont à être conventionnés avec l'assurance-maladie devront choisir, pour s'installer, des zones où les besoins ont été identifiés. Cette réforme ne pouvant s'appliquer à ceux qui sont déjà en formation, les membres du G7 proposent des mesures transitoires, notamment des dispositifs d'incitation à l'installation (exonérations fiscales, prêt à taux zéro...) ou, au contraire, au départ de médecins par le biais d'une forte prime de reconversion. La CNAM propose, quant à elle, de mieux répartir les professionnels sur le territoire en jouant sur la modulation à la hausse ou à la baisse de certains avantages conventionnels.
• Rémunérations
S'il y a un relatif consensus sur la nécessité de valoriser l'activité médicale, les solutions préconisées pour y parvenir divergent selon les organisations. Certains, attachés au paiement à l'acte, sont favorables à une revalorisation du tarif de la consultation actuellement à 115 F, d'autres penchent davantage pour une diversification des modes de rémunération. Dans le premier cas, les membres du G7 ont proposé une revalorisation substantielle du tarif de la consultation à hauteur de 30 euros (196,5 F) en échange de l'extinction progressive du secteur à honoraires libres. Il s'agit pour eux de rémunérer l'acte médical à sa juste valeur, c'est-à-dire rémunérer l'acte lui-même mais également le coût de l'acte, notamment les charges sociales, les tâches administratives et le respect de l'engagement conventionnel de FMC.
Les responsables de la CNAM préconisent plutôt de diversifier les formes de rémunération « de façon à inciter à la coordination et à la recherche de complémentarités entre différentes professions ». C'est également cette voie que le groupe des 14 souhaite explorer en imaginant un mode de rémunération par prestation sanitaire recouvrant diverses prestations sanitaires coordonnées au profit d'un professionnel, voire d'une équipe de professionnels.
• Maîtrise des dépenses de santé
Pour le G7, la maîtrise des dépenses doit être « médicalisée et concertée ». Par médicalisée, les membres de ce groupe signifient que ce sont les actions de coordination, d'évaluation, de maîtrise de la démographie, de formation et de suivi des références médicales qui concourent à optimiser les dépenses. Concrètement, ils proposent que les partenaires conventionnels fixent un objectif prévisionnel pluriannuel de dépenses établi à partir des besoins de la population et déclinés annuellement. Chaque année, un bilan d'application est établi. Si les dépenses sont supérieures à l'objectif, deux cas de figure sont envisagés. Soit, après analyse, l'écart est médicalement justifié, et l'objectif est de ce fait réajusté, soit il ne l'est pas, et les partenaires conventionnels définissent les actions à mettre en œuvre pour s'assurer du respect de l'objectif pluriannuel. Les membres du G14 estiment, eux, que les responsabilités économiques doivent être partagées. Une fois que l'Etat a défini les priorités sanitaires et les moyens que la collectivité a décidé d'y consacrer, les professionnels doivent garantir la qualité de leur pratique, notamment en suivant des référentiels de bonne pratique ; et les patients doivent s'engager à respecter certaines règles s'agissant de leur parcours dans le système de soins ou d'hygiène et de prévention. La CNAM insiste de son côté sur la nécessité de cohérence des instruments de régulation en ville comme à l'hôpital et de la fongibilité des enveloppes.
• Relations conventionnelles
Considérées « comme dans une impasse », les relations conventionnelles devront être, de l'avis de tous, reconsidérées. Et redonner aux gestionnaires de l'assurance-maladie un pouvoir de négociation mis à mal ces derniers mois par l'intervention de l'Etat. La redéfinition des compétences respectives de l'Etat et des partenaires sociaux est donc un souhait commun à toutes les organisations et, notamment, des responsables de la CNAM qui n'hésitent pas à s'interroger sur la nécessité de revoir le statut juridique d'établissement public administratif de la CNAM qui fait, selon elle, obstacle à sa liberté contractuelle.
Dans ses relations avec les professionnels de santé, la CNAM, comme le G14, propose une nouvelle architecture à deux étages : un socle conventionnel commun à tous les professionnels qui traiterait des problèmes de base, comme le remboursement ou les tarifs, et serait négocié en accord avec les pouvoirs publics, et ensuite des accords contractuels par profession, spécialités ou régions négociés avec les syndicats promouvant des nouvelles formes d'exercice, de rémunération ou d'organisations des soins auxquels les professionnels seraient libres d'adhérer ou pas.
Les membres du G7 ne remettent pas en cause l'architecture actuelle. Ils prônent, en revanche, le retour à une convention unique pour les médecins complétée éventuellement par des volets spécifiques.
(1) Le groupe du G7 est composé de trois syndicats médicaux, le CSMF, la FMF et le SML, ainsi que de quatre syndicats de salariés, la CGC, la CGT, la CFTC et FO.
2) Le G14 regroupe deux syndicats médicaux, MG-France et l'UCCSF, un syndicat de salariés, la CFDT, ainsi que des représentants de mutuelles et de plusieurs organisations de professionnels de santé.
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