LA DECISION des assurances complémentaires, notamment des AGF et de la Maaf, de se lancer dans le remboursement de produits alimentaires anticholestérol, comme les produits Fruit d'or Pro Activ ou les yaourts Danacol, est sans conteste la preuve que ces sociétés ont décidé d'investir dans la prévention, et plus spécifiquement dans la prévention cardio-vasculaire.
Ce faisant, elles ne font qu'appliquer la politique qu'elles ont souvent annoncée depuis qu'elles se sont lancées dans le domaine des assurances santé, il y maintenant quelques années. Avec en filigrane le rôle d'assureur-responsable, qu'elles revendiquent et qu'elle veulent assumer de plus en plus.
« Hier, expliquait il y a quelque temps Gilles Johanet, directeur des activités santé et collectivité du groupe AGF (et ancien directeur de la Caisse nationale d'assurance-maladie), nous étions un simple payeur, puis on est devenu un assureur-conseil et aujourd'hui, on entre dans une troisième phase, l'assureur complémentaire partenaire. » C'est dans cette optique que les AGF « conseillent » à leurs sociétaires des établissements de soins, des réseaux de soins, voire demain des médecins (ce qui pourrait d'ailleurs remettre en cause la liberté de choix du médecin par le patient), mais aussi des mesures de prévention, des précautions à prendre dans le cas de certaines affections, ou pour les éviter. C'est ainsi que sur le site Internet des AGF, les sociétaires de cet assureur peuvent consulter des conseils santé, concernant l'asthme et la pollution, l'asthme et les allergies, le mal de dos, les vaccins, le stress ou le sommeil. Pour le groupe AGF, qui avait d'ailleurs réalisé avec Ipsos un sondage auprès des Français sur ce thème de la santé et de la prévention, « il faut aider les patients à prendre en main leur santé grâce à des informations fiables ».
Responsabiliser l'assuré.
La politique de la Maaf est évidemment sur la même ligne : donner aux Français la possibilité de se prendre en charge en leur délivrant des informations crédibles et faciles à appliquer. En clair, il s'agit de responsabiliser l'assuré dans le cadre d'une politique de prévention adaptée aux risques. Les caisses d'assurance-maladie ne diraient pas autre chose. Ainsi, en remboursant - certes partiellement - ces produits destinés à lutter contre l'hypercholestérolémie, la Maaf et les AGF appliquent une politique définie depuis un certain temps. De plus, en s'appuyant sur des travaux reconnus et des déclarations de médecins et de scientifiques confirmant l'efficacité de ces produits lactés, ils s'affranchissent à l'avance de toute critique importante. Ce que confirment les AGF lorsqu'elles affirment qu'elles ne cherchent aucun nouveau client mais participent à la lutte contre les maladies cardio-vasculaires et l'hypercholestérolémie.
La démarche de ces assurances privées rejoint pour une part celle de la Mutualité française, qui s'est depuis longtemps investie dans la prévention nutritionnelle par des informations sur les dangers du manger trop gras, trop salé, trop sucré. Mais aussi sur la nécessité de manger, on connaît le message, au moins cinq fruits et légumes par jour pour éviter les cancers et pour prévenir les maladies cardio-vasculaires. « Mais il n'est évidemment pas question, explique-t-on en souriant à la Fédération nationale de la Mutualité française, de prendre en charge ne serait-ce que partiellement des achats de fruits et légumes. » Tout au plus la Mutualité, par exemple en Corse, a passé parfois un accord avec des supermarchés pour que le prix de ces fruits et légumes soit le plus bas possible. Ce qui apporte de la publicité au supermarché en question et aussi à la mutualité locale.
Mais aussi intéressantes soient-elles, ces initiatives sont beaucoup moins médiatiques que celles qui sont mises en avant aujourd'hui par les AGF et la Maaf.
La politique de maîtrise des dépenses.
Pour autant, il faut placer ces opérations dans le cadre de la politique de maîtrise des dépenses de santé en général et de la réforme de l'assurance-maladie, sans oublier la loi de financement de la Sécurité sociale 2006. Ces textes et ces politiques nouvelles tendent tous à organiser un transfert plus ou moins important de charges de l'assurance-maladie obligatoire vers les assurances complémentaires, dont les dépenses de remboursements vont inéluctablement augmenter. D'où sans doute leur recherche de sources d'économies. Et il est clair dans ce contexte que rembourser des achats de produits laitiers durant une période limitée ou diminuer des coûts d'assurance pour certains sociétaires sera moins onéreux que de prendre en charge, ne serait-ce que le le ticket modérateur de médicaments hypolipidémiants au prix souvent élevé. Le raisonnement n'est pas confirmé par les responsables de ces assurances, qui insistent sur le caractère préventif de la politique qu'ils ont, en l'occurrence, choisie. Reste que la question mérite d'être posée.
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