Signalees par l’assurance-maladie, qui leur reproche d’avoir des dépenses «soutenues», alors que celles des autres secteurs progressent moins vite, voire se stabilisent, les cliniques privées organisent la riposte. Chiffres pas comparables, analyse biaisée, sujette à caution : les critiques fusent de tous côtés dans les rangs de l’hospitalisation privée, qui refuse d’endosser le costume du fossoyeur de la Sécurité sociale. D’après les derniers éléments de la Cnam, les dépenses des établissements sanitaires privés auraient donc progressé de +10,1 % sur les quatre premiers mois de l’année 2006, par rapport aux quatre premiers mois de 2005. «Mais de quoi parle-t-on au juste? s’interroge Emmanuel de Geuser, directeur administratif et financier du groupe la Générale de Santé. On ne nous donne ni les sources ni les modalités de calcul de ces chiffres: on peut leur faire dire n’importe quoi.»
Emmanuel de Geuser n’hésite pas à parler de désinformation, et même de manipulation. «C’est facile, reprend-il, de jeter en pâture des chiffres que personne ne peut vérifier, et de dire ensuite que les cliniques se goinfrent, mais c’est faux: on n’arrête pas les gens dans la rue pour leur dire de venir se soigner chez nous.»
Le responsable financier de la Générale de Santé reproche «plusieurs biais» à l’analyse de l’assurance-maladie. L’intégration dans les tarifs des cliniques de certains produits (prothèses, médicaments…), auparavant financés par une autre enveloppe, pèse notamment sur les dépenses hospitalières depuis un an, argumente-t-il. Pour Emmanuel de Geuser, qui s’appuie sur les données internes de la Générale de Santé, la T2A a certes eu un effet inflationniste au début. «Mais de 5%, pas plus, assure-t-il .Cinq pour cent, est-ce choquant? Cette hausse des dépenses des cliniques s’explique par le paiement d’actes que les cliniques ne pouvaient pas facturer auparavant. L’effet inflationniste de la T2A était attendu, mais il va être gommé rapidement.»
Les cliniques reprochent aussi à la Cnam d’avoir comparé leurs flux de trésorerie entre le premier quadrimestre de 2005 et le premier quadrimestre de 2006, alors que leur entrée en tarification à l’activité (T2A) s’est justement effectuée en mars 2005. Ce passage s’est traduit par des retards de facturation multiples, affirme le Dr Jean-Paul Ortiz, président du Syndicat national des médecins de l’hospitalisation privée (Symhop). Le néphrologue ajoute : «L’année 2005 a été une année transitoire, avec des budgets hospitaliers privés difficiles à évaluer encore aujourd’hui. La comparaison avec 2006 est donc difficile à faire.» S’il ne met pas en doute les chiffres de la Cnam, le Dr Ortiz regrette que l’analyse ne soit pas accompagnée d’une explication. « Est-ce dû à un transfert d’activité des hôpitaux vers les cliniques? Il faut se poser la question.»
Et dans cette hausse des dépenses, quel rôle ont joué les erreurs de codage des actes – volontaires ou non – et les segmentations de séjours abusives, en vue de récolter plus de recettes ? «Je ne pense pas que le problème soit à chercher du côté des médecins codeurs», assure le Dr Ortiz. Mais il est trop tôt pour le savoir : les contrôles sur le terrain, que supervise la Direction de l’hospitalisation et de l’organisation des soins (Dhos), ont démarré en mars 2006.
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