QUEL EST LE MOYEN de retrouver une mémoire aussi évanescente que celle de la musique ? Les chercheurs de l'Atelier d'études du centre de musique baroque de Versailles (www.cmbv.com), chargés de reconstituer les partitions du patrimoine français de 1580 à 1815, livreront leur secret ce week-end, à l'occasion des Journées du patrimoine*. Il faut savoir que l'impression complète d'une partition d'orchestre, alors très coûteuse, représentait un travail considérable que seuls de très grands succès comme « Atys » de Lully pouvaient bénéficier. En Europe occidentale, l'évolution de la musique de danse et celle de l'écriture polyphonique instrumentale sont liées. Les premiers manuscrits conservent uniquement des monodies. Au XVe siècle, la musique de danse est généralement à trois parties mais les manuscrits musicaux ne précisent jamais l'instrumentation. Avec le développement de l'imprimerie musicale, les danseries du XVIe siècle sont le plus souvent à quatre ou cinq parties mais l'instrumentation n'est pas plus précisée. Au XVIIe siècle, l'orchestre français comportaient cinq parties. Dans les partitions réduites, seules la partie la plus aiguë de dessus de violon et la plus grave de basse de violon étaient reproduites ainsi que les parties vocales solistes et les chœurs. Le travail des chercheurs consiste à reconstituer ces parties intérieures manquantes indispensables même si elles sont moins mélodieuses que les parties principales. Pour les chercheurs, il n'est pas question d'inventer une composition. En analysant les œuvres qui leur sont parvenues complètes, ils les comparent avec les enseignements des traités de composition qui leur sont contemporains et étudient parallèlement les méthodes d'instruments pour connaître les techniques anciennes de jeu. Touchant au domaine du sensible, les chercheurs ne reproduisent bien sûr pas les parties à l'identique, à jamais perdues, mais tentent le plus fidèlement possible de s'en approcher. « Mon travail porte actuellement sur le XVIIe et le début du XVIIIe siècle, mais une connaissance approfondie du Moyen Age et de la Renaissance m'est très utile, explique Gérard Geay, chercheur à l'Atelier. Ces vieilles techniques et théories musicales sont comme les racines étymologiques des musiques plus modernes. Bien que nous ne soyons pas une institution d'enseignement, ce travail nous permet d'accueillir des étudiants que nous formons à la fois à l'édition musicale assistée par ordinateur et à la restauration des parties manquantes. » Pluridisciplinaire, l'Atelier est peut-être « le seul endroit où pédagogues, musiciens, danseurs et chercheurs peuvent collaborer », se félicite Gérard Geay.
L'apport des outils numériques.
Autre démonstration ce week-end, à Paris, à l'Hôtel de Sully (62, rue Saint-Antoine, 75004), la présentation du programme « 3D Monuments » (en partenariat entre le Cnrs et le ministère de la Culture, www.map.archi.fr) pour montrer les apports des outils numériques en matière de relevé et de représentation des monuments. Au même titre que la numérisation 2D, la numérisation 3D répond à deux préoccupations. D'abord la conservation, par la prise « d'empreinte numérique » s'appuyant sur les techniques de relevé par balayage laser et photo-modélisation, dont l'enregistrement constitue une archive qui, exploitée, fournira un modèle géométrique destiné à représenter la morphologie des édifices relevés ainsi que leur aspect. Ensuite, la valorisation, par sa capacité à donner à voir et donc à comprendre par le plus grand nombre l'objets étudiés. L'objectif des chercheurs du laboratoire est de travailler à la définition de systèmes de représentation des édifices étudiés avec comme but de satisfaire simultanément le point de vue des spécialistes (architectes, historiens, conservateurs) et la curiosité du grand public.
* Centre de musique baroque de Versailles, Hôtel des Menus-Plaisirs, 22, avenue de Paris, 78000 Versailles.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature