De notre correspondante
à New York
La résistance acquise aux chimiothérapies anticancéreuses reste un obstacle à l'obtention de meilleurs taux de guérison. L'instabilité génomique, une propriété importante des cellules tumorales, en est la principale force motrice.
Au fur et à mesure qu'une tumeur croît, des mutations spontanées donnent naissance à une population hétérogène de cellules, certaines ayant acquis par hasard un phénotype résistant aux médicaments. La chimiothérapie élimine alors les cellules plus sensibles tout en laissant croître les sous-clones résistants.
Une nouvelle approche anticancéreuse évaluée en clinique, seule ou en association avec des traitements cytotoxiques conventionnels, est représentée par les inhibiteurs de l'angiogenèse. Ils empêchent la formation des nouveaux vaisseaux (néovascularisation) nourriciers autour de la tumeur. Puisqu'ils ciblent les cellules endothéliales normales - génétiquement stables - du système vasculaire, ils offraient l'espoir de ne pas poser de problème de résistance acquise.
Des cellules du cancer colo-rectal humain
Une étude chez la souris, dirigée par Robert Kerbel, de l'université de Toronto, montre que le profil génétique d'une cellule tumorale est en fait un déterminant important de la réponse au traitement antiangiogénique.
Yu, Kerbel et coll. ont découvert que des souris porteuses de tumeurs sous-cutanées (cellules du cancer colo-rectal humain) déficientes en gène tumeur-suppresseur p53 répondent moins bien que les tumeurs non déficientes en p53 au traitement antiangiogénique (le DC101, un anticorps anti-VEGFR 2), combiné ou non à une chimiothérapie faible dose continue de vinblastine.
Lorsque les souris portent des tumeurs composées de cellules mixtes, déficientes et non déficientes en p53, le traitement antiangiogénique détruit davantage les cellules non déficientes en p53 et sélectionne les cellules déficientes en p53.
Ces observations confirment que, comparées aux cellules normales en p53, les cellules déficientes en p53 résistent davantage à l'hypoxie, avec un taux plus faible d'apoptose induite par le milieu pauvre en oxygène. Il est clair que d'autres altérations génétiques pourraient modifier la dépendance vasculaire ou la sensibilité à l'hypoxie des cellules tumorales.
Trois approches sont proposées
Les chercheurs proposent donc trois approches pour améliorer l'efficacité des inhibiteurs de l'angiogenèse :
1) les combiner avec des inhibiteurs du signal de transduction médié par l'oncogène, dans le but de contrecarrer la baisse de la dépendance vasculaire ;
2) les combiner à des cytotoxines cellulaires hypotoxiques, une nouvelle classe de médicaments qui surmonte la résistance des cellules hypoxiques à la radiochimiothérapie ;
3) les combiner à des agents qui détruisent les vaisseaux sanguins existants ou qui interrompent le flux sanguin tumoral.
Les cellules tumorales mutantes ne devraient en effet tout de même pas survivre à l'anoxie. Ces résultats, déclarent les chercheurs, ont des implications importantes pour la conception des futurs essais cliniques et l'interprétation des résultats des essais en cours.
« Science » du 22 fevrier 2002, p. 1526.
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