« NOUS DISPOSONS désormais d’un recul de quinze ans dans l’utilisation de la curiethérapie par grains séparés des cancers de la prostate localisés», explique le Dr Abdel-Rahmène Azzouzi (service d’urologie, CHU Angers). Pour que les résultats à long terme puissent être optimisés, il est important que cette technique soit prescrite de façon rigoureuse à des patients sélectionnés : la curiethérapie s’adresse aux cancers circonscrits à la prostate, T1 T2a, sans symptômes obstructifs ; le caractère localisé de la maladie doit être confirmé par une IRM endorectale, le PSA doit être inférieur à 10 nanogrammes par millilitre, la scintigraphie osseuse et le scanner abdomino-pelvien doivent être négatifs, le score de Gleason doit, en outre, être inférieur ou égal à 6. En outre, la prostate doit peser moins de 50 g, en raison du risque de mauvaise application des grains du fait du contact avec l’arche pubienne pour les prostates de plus grande taille. Pour limiter cette contre-indication, il est possible de prescrire des analogues du LH-RH dans le but de faire diminuer le volume global de la prostate de 30 % en trois mois.
Une technique relativement simple.
Par rapport aux autres techniques actuellement disponibles, telles que la chirurgie ou la radiothérapie, la curiethérapie est relativement simple et le temps d’hospitalisation, limité (quarante-huit heures en général). Les complications sont celles de l’anesthésie générale et de l’implantation.
Les grains mis en place vont irradier jusqu’à 4 mm autour de leur lieu d’insertion. Les deux effets secondaires les plus souvent rapportés restent l’incontinence et l’impuissance. Le problème de l’incontinence reste tout à fait exceptionnel après l’application des grains, même avec un recul de quinze ans. Le taux d’impuissance est de 30 % environ à six ans.
Il faut savoir que, pendant les trois premiers mois après la pose des grains, il existe une inflammation réactionnelle de la prostate qui se traduit par des symptômes de prostatite radique. Cette inflammation est inévitable, mais, selon les sujets, elle peut être vécue avec plus ou moins d’intensité : douleur, sensation de pesanteur, simple gêne… En cas de nécessité, un traitement par alphabloquants, anti-inflammatoires, antalgiques sera prescrit afin d’atténuer les symptômes. A un an, ces troubles sont généralement totalement régressifs. L’impuissance en rapport avec la prostatite radique, lorsqu’elle existe, est sensible aux traitements pharmacologiques, mais, dans les premiers mois, elle peut coexister avec une baisse de la libido en rapport avec la symptomatologie prostatique.
Dans les premières années post-implantation, la sexualité, si elle était satisfaisante avant l’intervention, n’est pas modifiée une fois les signes de prostatite disparus.
La survie sans récidive biologique, sans majoration du taux de PSA, est aussi bonne avec la curiethérapie qu’avec les deux techniques de référence. La survie globale spécifique est, elle aussi, assez similaire. Néanmoins, il n’est actuellement pas proposé de curiethérapie chez des patients qui ont une espérance de vie supérieure au recul de la technique, soit quinze ans (chez les moins de 60 ans).
La curiethérapie, par ses résultats et sa morbidité minime, est une technique très intéressante, à condition de sélectionner rigoureusement les patients. A long terme, il est possible d’imaginer que son utilisation soit étendue à des scores de Gleason supérieurs (7), puisque 20 % des patients ayant un score de Gleason de 6 à la biopsie ont en réalité un score de Gleason 7. « Au CHU d’Angers, dans un premier temps, la curiethérapie développée était fondée sur l’utilisation de grains liés. Mais cette technique a progressivement été abandonnée au profit de celle des grains libres depuis juillet 2006. Actuellement, le rythme d’implantations laisse à penser que le nombre de cas annuellement traités pourrait être supérieur à 50, soit 20 à 25% du recrutement dans cette indication. Aux Etats-Unis, certaines équipes prennent en charge actuellement près de la moitié de leurs patients atteints de cancer localisé de la prostate grâce à une curiethérapie par grains libres», conclut le Dr Azzouzi.
D’après un entretien avec le Dr Abdel-Rahmène Azzouzi, CHU Angers.
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