LA PREVENTION de la maladie thromboembolique veineuse en milieu chirurgical est depuis de nombreuses années bien codifiée et validée par des consensus d'experts fondés sur les résultats de nombreuses études qui ont porté sur ce sujet.
En revanche, le risque de maladie thromboembolique veineuse chez les patients hospitalisés pour une affection médicale aiguë a longtemps été sous-estimé alors qu'il est aussi élevé que chez les patients chirurgicaux, ce que démontrent clairement de grandes études contrôlées telle que MEDENOX, PREVENT, PREVAIL et ARTEMIS.
Les bénéfices d'un traitement prophylactique par énoxaparine pendant 10 jours ± 4 jours ont déjà été démontrés chez les patients hospitalisés pour infection médicale aiguë dans l'étude MEDENOX (Prophylaxis in MEDical Patients with ENOXaparin (1).
Chez les patients à mobilité réduite.
Néanmoins, la pratique clinique laisse à penser que le risque d'événements thromboemboliques veineux persiste au-delà de 10 jours de traitement, particulièrement chez les patients à mobilité réduite, souligne le Pr Meyer Michel Samama (hôpital de l'Hôtel-Dieu, Paris).
L'efficacité et la sécurité d'une prophylaxie prolongée dans cette population de patients n'ont jamais été évaluées, alors même qu'elles ont été prouvées pour plusieurs catégories de patients chirurgicaux réputés à haut risque (2, 3), d'où les recommandations internationales en faveur de l'instauration d'une prophylaxie prolongée auprès de ces patients (4).
«EXCLAIM est la première étude à évaluer le bénéfice d'une thromboprophylaxie prolongée chez des patients à mobilité réduite souffrant d'une affection médicale aiguë», précise le Pr Russel Hull (université de Calgary, Canada).
EXCLAIM est une étude internationale (21 pays), multicentrique (370 centres), prospective, randomisée, en double aveugle, contrôlée contre placebo, destinée à comparer un traitement thromboprophylactique prolongé (28 ± 4 jours) par énoxaparine à un traitement standard (10 ± 4 jours) dans la prévention des événements thromboemboliques veineux.
Cinq mille cent cinq patients âgés de plus de 40 ans, récemment immobilisés pour une affection médicale aiguë ont été recrutés dans les différents centres.
Quatre mille cent quatorze patients, à très haut risque de thrombose (score de mobilité soit de 1 [alitement complet ou sédentarité], soit de 2 (possibilité de se lever pour se rendre aux toilettes), âge > 75 ans ou antécédents d'événements thromboemboliques veineux ou diagnostic de cancer), récemment immobilisés pendant une durée d'au moins trois jours, ont été traités dans un premier temps par énoxaparine 40 mg (une injection sous-cutanée par jour) pendant 10 ± 4 jours, puis randomisés pour recevoir soit le même traitement, soit un placebo pendant une durée supplémentaire de 28 ± 4 jours.
Le critère principal d'évaluation était l'incidence des cas de thrombose veineuse profonde (TVP) asymptomatique détectés par échographie standardisée systématique, des cas de TVP symptomatiques, d'embolie pulmonaire symptomatique et d'embolie pulmonaire fatale pendant la phase des 28 jours en double aveugle.
Les critères d'évaluation secondaires incluaient l'incidence des événements thromboemboliques veineux après trois mois et l'incidence des décès jusqu'à six mois après l'inclusion dans l'étude.
La tolérance était évaluée sur le nombre de complications hémorragiques majeures recensé au cours de l'étude.
Réduction du risque.
La réduction significative de 44 % du risque relatif d'événements thromboemboliques observée dans le groupe de patients recevant le traitement prophylactique prolongé (2,8 % versus 4,9 % dans le groupe placebo ; p = 0,0011) a été associée à une réduction de 73 % du nombre d'événements thromboemboliques symptomatiques (0,3 % vs 1,1 %, p = 0,0044) et 34 % de thromboses veineuses proximales asymptomatiques (2,5 % vs 3,7 % ; p = 0,0319).
Aucune différence statistiquement significative n'a été observée dans les cas d'embolie pulmonaire symptomatique ou fatale.
La réduction statistiquement significative du risque d'événements thromboemboliques observée sous énoxaparine après 38 jours de traitement est par ailleurs restée inchangée à 90 jours (3 % contre 5,2 % ; p = 0,0015). Six mois après l'inclusion dans l'étude, l'incidence des décès toutes causes confondues était similaire dans les deux groupes (10,1 % vs 8,9 % p = 0,18).
Au plan tolérance, le taux d'hémorragies majeures a été significativement plus élevé chez les patients ayant bénéficié d'un traitement prolongé par énoxaparine que chez les patients sous placebo (0,6 % vs 0,15 % p = 0,019), mais le taux global d'événements a été faible.
«L'étude EXCLAIM en démontrant pour la première fois les bénéfices d'un traitement thromboprophylactique prolongé chez les patients souffrant d'un affection médicale aiguë devrait marquer un tournant décisif dans le standard de prise en charge des patients à haut risque d'événements thromboemboliques veineux», conclut le Pr Russel Hull.
Genève, 21e Congrès de l'Isth (International Society on Thrombosis and Haemostasis). Conférence de presse organisée par le Laboratoire sanofi-aventis.
(1) Samama MM et coll. « New England Journal of Medicine », 1999 ; 341 : 793-800.
(2) Bergqvvist. « New England Journal of Medicine », March 2002/vol. 346, n° 13.
(3) Hull R. « Ann Intern Med » 2001 ; 135 : 858-869.
(4) Geerts WH. « Chest » 2004 ; 126 : 338S-400S.
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