L'effet à court terme des injections de corticoïdes en intradiscal en fait un traitement d'intérêt potentiel, en cours d'expérimentation, chez certains lombalgiques chroniques, en situation de handicap lourd. Ce type d'injection bénéficie plus particulièrement aux patients ayant une discopathie de type Modic 1, donnée riche d'enseignement.
«LE DIAGNOSTIC de lombalgie commune repose depuis longtemps sur l'élimination de pathologies inflammatoires, infectieuses et tumorales. Ce diagnostic d'exclusion est responsable d'un assemblage de patients qui ont des profils anatomocliniques variés. Le diagnostic lésionnel d'une lombalgie commune reste à ce jour difficile. Les modifications dégénératives constatées en imagerie au cours des lombalgies communes sont en effet le plus souvent aspécifiques, puisque également présentes au sein de la population asymptomatique!», rappelle le Dr Beaudreuil. C'est pourquoi toute nouvelle étude contribuant au démembrement du vaste cadre nosologique des lombalgies communes a son intérêt.
Sur le plan clinique, certains patients lombalgiques chroniques lourdement handicapés présentent une histoire d'acutisation inflammatoire d'une lombalgie ancienne. La douleur occasionne des réveils nocturnes, elle est associée à un dérouillage matinal et s'intensifie en dehors de toute autre cause qu'une affection lombaire dégénérative. Elle semble alors particulièrement sensible aux AINS (anti-inflammatoires non stéroidiens) et aux orthèses lombaires.
Des arguments cliniques et radiologiques à mettre en parallèle.
Au niveau des examens complémentaires, chez certains de ces patients, une discopathie lombaire rapidement évolutive (la hauteur du disque intervertébral se pinçant de plus de 50 % en deux ans) a pu être mise en évidence en radiographie standard. En IRM, des données montrent que ces patients présentent une discopathie de type Modic 1, c'est-à-dire un oedème des plateaux vertébraux en regard de leur discopathie, sans aucun argument pour une maladie infectieuse ou inflammatoire rhumatismale.
«Ces données suggèrent l'existence d'une entité radioclinique particulière au sein des lombalgies communes, dans leur forme chronique et invalidante, notamment», insiste le Dr Beaudreuil.
Une étude rétrospective réalisée auprès de 97 patients.
Des travaux récents suggéraient que les patients lombalgiques atteints d'une discopathie de type Modic 1 répondent particulièrement bien à la corticothérapie locale (sous forme d'injection intradiscale ou d'injection épidurale). «Disposant d'une série rétrospective de patients traités par injection intradiscale de méthylprednisolone 20mg, nous avons tenté de vérifier cette hypothèse. Le méthylprednisolone, contrairement à d'autres corticoïdes injectables, n'est pas connu pour entraîner des calcifications intradiscales», précise le Dr Beaudreuil.
Quelque 97 patients lombalgiques chroniques (51 femmes, 46 hommes, âgés en moyenne de 43 à 48 ans) en situation de handicap lourd, avec ou sans discopathie de type Modic 1, ont été inclus dans cette étude rétrospective. Ils ont été répartis en trois groupes : un groupe Modic 1 avec un sous-groupe 1 (rachis non opéré) et un sous-groupe 2 (rachis et étage opérés), ainsi qu'un groupe contrôle (non Modic 1). Les critères de jugements choisis étaient la douleur sur l'échelle d'évaluation analogique et l'amélioration perçue par le patient à 24 heures et à 14 mois en moyenne.
Cette étude montre que la proportion de patients améliorés à 24 heures est plus importante dans les groupes 1 (90 %) et 2 (71 %) que dans le groupe contrôle (30 %). La douleur a diminué dans les groupes 1 (28 ± 5 versus 52 ± 5) et 2 (37 ± 5 versus 62 ± 4), mais n'a pas varié dans le groupe contrôle. En revanche, d'après les dossiers des 76 patients revus à 14 mois, aucun effet antalgique n'a pu être détecté à long terme.
«Ce travail met en évidence une amélioration nette et rapide après une injection intradiscale de méthylprednisolone 20mg chez des patients lombalgiques chroniques lourdement invalidés et ayant une discopathie de type Modic1. Cet effet n'a toutefois pu être détecté qu'à très court terme. Cette étude nous a confortés dans l'idée qu'il existe bien un profil de réponse à la corticothérapie locale et probablement un profil pathogénique, spécifiques à la discopathie de type Modic1», conclut le Dr Beaudreuil.
D'après un entretien avec le Dr Johann Beaudreuil, service de rhumatologie, hôpital Lariboisière, Paris.
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