EH OUI, les bactéries présentent une forme de sexualité, mais elles sont très discrètes. Les chercheurs de l'unité Inserm 571 « Génétique moléculaire évolutive et médicale » (Ana Babic et coll.) lèvent un peu plus le voile sur ce phénomène connu mais mal décrit jusqu'ici.
Au cours de l'acte sexuel bactérien appelé « conjugaison », bactéries mâle et femelle (ou donneuse et receveuse) se rapprochent et de l'ADN de l'une passe dans l'autre, via les « pilus », des appendices microscopiques en forme de tube situés sur la paroi externe de la bactérie donneuse, et dont le rôle demeurait obscur jusqu'à présent.
Cet échange horizontal d'ADN entre bactéries joue un rôle clé dans l'acquisition et la propagation des gènes de résistance aux antibiotiques et de facteurs de virulence. L'ADN transféré s'installe durablement au coeur du chromosome receveur, et noue ensuite des échanges successifs, dynamiques, sous la forme de recombinaisons, au sein de la bactérie receveuse. «Les recombinaisons contribuent au brassage génétique et donc à la diversité des espèces, moteur de l'évolution.»
Le développement des résistances aux antibiotiques.
Ces travaux devraient contribuer à élucider le développement des résistances aux antibiotiques des bactéries et «apporteront de précieuses informations sur l'instabilité des chromosomes, souvent associée à la cancérisation des cellules». Pour parvenir à ces observations, les chercheurs ont construit une protéine fluorescente capable de marquer uniquement l'ADN transféré, puis intégré par la receveuse. Cela leur a permis de visualiser ce transfert d'ADN en temps réel.
Dans un premier temps ils ont mis en évidence un taux de succès très élevé : dans 96 % des cas, la bactérie receveuse intègre cet ADN sans le dégrader. De même, ils ont pu observer des échanges efficaces entre bactéries très éloignées, de dix fois leur taille, et n'ayant pour tout point de contact qu'un pilus.
« Science », 14 mars 2008.
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