LES TESTS de diagnostic rapide (TDR) sont des examens complémentaires réalisables par le médecin sans laboratoire, avec un résultat obtenu dans le temps de la consultation. Le terme d'examen complémentaire souligne l'importance des données cliniques dans l'interprétation du résultat. L'évaluation des TDR étudie les qualités de tout examen biologique, à savoir : précision de la mesure, reproductibilité, valeurs diagnostiques, utilité diagnostique, applicabilité, avec une mention spéciale en cas de TDR pour la facilité d'utilisation, la rapidité d‘obtention du résultat et le coût.
Décision.
Dans les décisions en urgence, le raisonnement probabiliste est la règle : le résultat d'un TDR renforce ou diminue la probabilité d'une hypothèse diagnostique, mais permet rarement à lui seul un diagnostic. Quand le praticien utilise un test diagnostique, il est guidé par une suspicion clinique : le test doit confirmer ou exclure la maladie suspectée avec la plus grande certitude possible. L'utilité diagnostique d'un TDR varie aussi selon la prévalence de l'affection dans la population. Ainsi, le test de dosage de la CRP n'est d'aucune utilité dans une population à risque très élevé d'infection bactérienne et rapidement évolutive, c'est-à-dire dans le cas où la notion de gravité et d'urgence abaisserait le niveau de risque tolérable de ne pas faire le diagnostic. Un test de diagnostic rapide n'est utile pour un individu que s'il fait passer le médecin d'une zone d'incertitude diagnostique à une zone décisionnelle.
Streptocoque A.
Les TDR, initialement réservés à l'angine, peuvent être utilisés dans d'autres pathologies. Ils sont d'une aide précieuse au diagnostic et permettent l'économie d'autres examens complémentaires.
• Dans l'impétigo, le TDR apporte peu d'éléments.
• Les otites moyenne aiguës à streptocoque du groupe A (SGA) se présentent souvent sous la forme d'otorrhée survenant chez un enfant de plus de 3 ans, faire un TDR sur l'écoulement permet d'en faire le diagnostic et de prescrire l'antibiotique adapté et à spectre plus étroit (amoxicilline) que ce qui est recommandé habituellement dans les otites.
• En cas d'adénite cervicale isolée de l'enfant, le TDR réalisé sur le prélèvement de gorge est souvent positif alors que la gorge paraît normale à l'examen. Un traitement ciblé par l'amoxicilline permet alors une guérison en quelques jours sans qu'aucun autre examen soit nécessaire, sous couvert d'une surveillance clinique qui s'assurera de la régression de l'adénopathie.
• Quant à la rhinopharyngite à SGA (typiquement dénommée streptococcose), elle atteint le plus souvent le nourrisson âgé de moins de 3 ans qui présente une fièvre modérée, irrégulière, traînante depuis quelques jours avec à l'examen clinique une polyadénopathie, une rhinorrhée séreuse et un pharynx normal ou subnormal. Le TDR effectué sur les sécrétions nasopharyngées confirme le diagnostic.
• Les anites à SGA sont retrouvées le plus souvent entre 2 et 8 ans. Le TDR au niveau anal permet le diagnostic. De même que dans les vulvovaginites de la petite fille où le SGA est responsable de 9 à 20 % des cas.
Procalcitonine.
Quant au dosage rapide de la CRP, l'une des nombreuses protéines de l'inflammation, peu sensible au début (> 18 heures) de l'infection, il ne fait jamais à lui seul le diagnostic d'infection bactérienne : il augmente (quand il est élevé) ou dimininue (quand il est bas) la probabilité qu'un patient présente une infection bactérienne, souligne le Dr Robert Cohen. Son avantage majeur est qu'elle est devenue un docteur-test, dont le résultat peut être obtenu en moins de 5 minutes sur une goutte de sang et pour un coût modique (3 euros). Le dosage de la procalcitonine a pour avantage d'être plus sensible au début de l'infection, et plus spécifique que la CRP. L'outil proposé aujourd'hui est un test de dosage semi-quantitatif qui devrait être amélioré dans l'avenir, notamment en diminuant le seuil inférieur de détection, en standardisant la mesure et en permettant un dosage sur sang total par prélèvement au bout du doigt (aujourd'hui, il faut utiliser du sérum ou du plasma obtenu par centrifugation de sang veineux.) Ce test est donc plus difficile à utiliser en pratique (pas de microméthode sur une goutte de sang) et beaucoup plus couteux que la CRP.
Grippe.
Depuis quelques années, les tests de diagnostic rapide de la grippe ont été mis au point et sont utilisés en France de façon restreinte par les réseaux de surveillance de la grippe (Grog) et par quelques pédiatres d'Activ (Association clinique et thérapeutique infantile du Val-de-Marne). Pour le Dr France de la Rocque, «la pratique de ce test n'est logique que s'il doit entraîner un changement de prise en charge». La crainte que l'utilisation à large échelle des TDR de la grippe entraîne des coûts substantiels par leur pratique et la prescription d'antiviraux doit être pondérée par la réduction des examens complémentaires et la réduction des hospitalisations.
«En réalité, devant un syndrome fébrile, on doit avoir uneconduite qui comporte schématiquement plusieurs étapes», résume le Dr Cohen.
La première étape consiste à apprécier la gravité ; devant un tableau évoquant un sepsis, aucun test ne peut faire surseoir à un traitement antibiotique rapide. Il faut ensuite rechercher la porte d'entrée. Cette démarche est fondamentale en infectiologie car elle permet un diagnostic étiologique présomptif. Puis on doit rechercher par l'anamnèse les facteurs susceptibles de faire varier les probabilités prétest ; car on n'envisage pas les mêmes diagnostics selon l'âge, le sexe, les antécédents infectieux, la saison, les vaccinations, la durée des symptômes. En situation précoce, il faut éviter le dosage rapide de la CRP et se méfier des tests à la bandelette urinaire où la présence de leucocytes peut être retardée de 24 heures. «Les TDR ne peuvent se concevoir que dans le cadre d'une stratégie diagnostique dont la base reste une analyse clinique rigoureuse. Ils sont susceptibles d'améliorer les performances du diagnostic clinique, d'entraîner une mise en route précoce de traitements adaptés, et ils peuvent susciter de réelles économies», conclut Robert Cohen.
D'après les communications des Dr Alain Martinot (service d'accueil et de traitement des urgences, CHU Lille), Alain Wollner (Activ), France de la Rocque (Activ), Robert Cohen (service de microbiologie, CHI de Créteil).
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