LE 32e CONGRES de la Société de réanimation de langue française (Srlf)*, qui s'est tenu à Paris, a été l'occasion d'aborder le thème de l'information des familles des patients de réanimation en fin de vie.
Comme l'a montré le Dr B. Regnier, cas clinique à l'appui dispositions réglementaires et recommandations institutionnelles sont précieuses en la matière, mais ne sauraient suffire. Et pour cause. Pour un médecin qui décide de limiter ou d'arrêter une ou des thérapeutique(s) active(s) en réanimation adulte, une seule chose est prise en compte, la situation médicale du patient : échec thérapeutique (ne pas prolonger l'agonie), suppléance des défaillances d'organe apparaissant déraisonnable (pronostic très défavorable en termes de qualité de vie). Pour la famille, ce qui entre en jeu est beaucoup plus complexe : conflits intrafamiliaux, déni, vitalisme, espoirs, angoisse d'avoir à donner le feu vert, niveaux de maturité différents de chacun des membres de la famille, temps nécessaire à chacun pour « dire au revoir ».
Dans ce contexte, quand et comment communiquer avec les familles sur les limitations et l'arrêt des thérapeutiques ? Dans quelle mesure faut-il les impliquer dans les décisions de fin de vie ? La Slrf recommandait, notamment, en juin 2001, « une information orale associée à un complément écrit (observations, dossier de soins, livret d'accueil), apportée à la famille par une équipe structurée et visible (soignants identifiés, réunions régulières, locaux dédiés) », ou encore « un protocole de communication adapté (temps, lieu, contenu) ». Pour ce qui est du processus décisionnel, la Srlf recommandait, en juin 2002, « une réflexion argumentée, raisonnée, raisonnable, et partagée entre l'ensemble des acteurs de soins », à laquelle participent également le patient et ses proches. Consultés, ces derniers « interviennent de manière majeure », mais ne sont pas « décisionnaires ».
Le Dr Regnier plaide pour une décision partagée entre soignants et proches, selon une « logique contractuelle ». Ce modèle de décision tend à réduire les séquelles psychologiques à court terme (Robinson, « The Lancet », 1998) et à faciliter le deuil (J. Friedrichsen, Palliat Care, 2001), argumente le médecin. Et de citer deux études selon lesquelles 65 % des patients des urgences souhaiteraient une décision partagée (E. Rouple, « ICM », 2000) de même que 39 % des familles de patients en réanimation (D.K. Heyland, « ICM », 2003).
Une procédure clinique à part entière.
En outre, le modèle de décision partagée semble atténuer les difficultés liées à la décision unilatérale des soignants (paternalisme, culpabilité, sentiment d'échec) comme à la décision des patients et/ou de leurs proches (ignorance des préférences du proche, conflit d'intérêt, charge émotionnelle excessive). Ce modèle de décision est à l'avantage des soignants comme des familles. Il permet de respecter à la fois la stratégie souhaitable d'un point de vue médical, les valeurs et les préférences du patient.
« Prérequis au modèle de décision partagée, la prise en charge des familles constitue une procédure clinique à part entière et nécessite une formation spécifique », précise le Dr Regnier. « Le temps et l'expérience ne sont pas suffisants. »
* www.srlf.org.
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